«Ce n'est pas de l'abus, c'est du viol !» : manifestation en Espagne contre le laxisme de la justice
Des dizaines de milliers de manifestants ont défilé dans toute l'Espagne le 26 avril pour protester contre la cour de Navarre qui a retenu la qualification d'abus sexuel et pas de viol, pour des actes commis par cinq hommes sur une fille de 18 ans.
Les Espagnols ne décolèrent pas. Ils s'insurgent contre une décision du tribunal de Navarre envers une bande qui se surnommait La manada (la meute). Celui-ci a qualifié le 25 avril d'abus sexuel, plutôt que de viol collectif, des actes de pénétration commis par cinq hommes sur une jeune fille de 18 ans. Les foule est spontanément descendue dans la rue le 26 avril aux cris de «Yo te creo hermana» («je te crois ma sœur»), pour protester contre cette qualification. Le ministère public a annoncé faire appel de cette décision judiciaire le 27 avril.
✊🏾 Nos tocan a una, respondemos llenando las calles de Madrid ✊🏾
— Comisión 8 de Marzo Madrid (@FeminismosMad) 27 avril 2018
La justicia te cuestiona, nosotras te creemos.
📣 HERMANA, AQUÍ ESTÁ TU MANADA 📣 pic.twitter.com/XZXOQ8IcYz
📌 Podemito @Pablo_Iglesias_ y socialisto @sanchezcastejon ¿ahora pedis qué se endurezcan las penas por la sentencia de la 'manada'? La sociedad lo lleva reclamando a gritos 🔊 🔊 PRISIÓN PERMANENTE REVISABLE. Tomad nota 📝 y de @CiudadanosCs ni hablamos. https://t.co/rdT3wxrePXpic.twitter.com/cM65vR5p3k
— Javier Barreña (@Javi_Barrena) 27 avril 2018
Une indignation unanime, la foule dans la rue
Le verdict était très attendu dans un pays qui a connu une «grève générale féministe» sans précédent et des manifestations massives le 8 mars pour les droits des femmes. Or les condamnations dévoilées le 25 avril sont très inférieures aux réquisitions du parquet de 22 ans de prison pour viol. La cour de Navarre n'a condamné les cinq hommes qu'à neuf ans de prison pour «abus sexuels continus» avec circonstances aggravantes. Selon les magistrats, la victime n'a pas agi sous l'effet de l'«intimidation» ou de la «violence».
Une foule indignée s'est immédiatement réunie devant le palais de justice aux cris de «Ce n'est pas de l'abus, c'est du viol !». Des manifestations ont ensuite éclaté à Madrid, à Barcelone, à Séville mais aussi dans de petites villes. D'autres rassemblements avaient déjà eu lieu en novembre dans toute l'Espagne pour la même affaire, à la suite de la décision du juge de mener une enquête sur la vie de la jeune fille, pour remettre en cause sa moralité.
Je te crois ma sœur
De nombreux politiques espagnols ont réagi à l'affaire. La maire de Barcelone, Ada Colau, a estimé que la décision, «sexiste et injuste», devait être revisée.
Hoy en Barcelona y en ciudades de todo el estado hemos sido miles gritando #NoEstásSola y #YoSíTeCreo
— Ada Colau (@AdaColau) 26 avril 2018
Exigimos que se revise una sentencia que es machista e injusta. La víctima de #laManada tiene que saber que no está sola y que la creemos.@ctxt_espic.twitter.com/EqghBqIwbR
Pedro Sanchez, le secrétaire général du parti socialiste a tweeté : «Si ce qu'a fait la manada n'était pas de la violence collective contre une femme sans défense, alors qu'entendons-nous par viol ?»
Ella dijo NO. Te creímos y te seguimos creyendo. Si lo que hizo #LaManada no fue violencia en grupo contra una mujer indefensa, ¿qué entendemos entonces por violación? #NoesNo#YoSíTeCreo
— Pedro Sánchez (@sanchezcastejon) 26 avril 2018
L'affaire a fait la couverture de toute la presse ibère. Les Espagnols réclament le départ du juge à corps et à cris, une pétition dans ce sens sur change.org a collecté plus d'un million de signatures. Les internautes protestent fermement sur les réseaux sociaux.
Cet utilisateur de Twitter outré fait remarquer que la police conseille de ne pas résister à son agresseur sexuel, tandis que les juges ne retiendront la qualification de viol que si «l'on se défend avec les ongles et les dents».
¡No es abuso, es violación! se grita a las puertas del Palacio de Justicia de Pamplona ante la INJUSTA sentencia a #LaManada
— jcmata233 (@JuanCar33719929) 26 avril 2018
La Policía te dice que no te resistas
Los jueces te dicen que para que sea violación te tienes que defender con uñas y dientes#EstaEsNuestraManadapic.twitter.com/WSxwMxdKqq
Citoyens, personnalités et associations féministes à travers le monde se sont insurgés contre la qualification d'abus sexuel.
Impressionnante et immédiate réaction des espagnoles suite au verdict de #LaManada où les juges ont estimé que le viol collectif, prémédité et filmé, d'une jeune fille de 18 ans alcoolisée par 5 hommes aux fêtes de Pampelune...n'en était pas un. Colère et soutien. pic.twitter.com/QLijbW8iY8
— Margaux Collet (@Margaux_Collet) 27 avril 2018
"Under Spanish law, the lesser offence of sexual abuse differs from rape in that it does not involve violence or intimidation." No intimidation? 5 strangers luring an intoxicated woman to an unknown location is incredibly scary & intimidating. How many women are killed each year?
— Jessica Chastain (@jes_chastain) 26 avril 2018
Un viol collectif par cinq ultras
Le 7 juillet 2016, aux fêtes San Fermin de Pampelune, au pays basque espagnol, cinq Sévillans de 27 à 29 ans cherchaient à faire des rencontres sexuelles. Parmi ces supporters ultra de football, un gendarme de la Guardia civil et un militaire.
Ils avaient croisé la route d'une Madrilène alcoolisée de 18 ans. La jeune fille a embrassé l'un d'entre eux. Les quatre autres sont aussi devenus pressants et tous l'ont obligée à entrer dans un hall d'immeuble. Selon ses dires, elle ne pouvait échapper à leur emprise qu'en s'exécutant, ne s'étant pas débattue pendant l’agression survenue sept minutes après leur rencontre, en raison de son «état de choc». Ils l'ont alors forcée à faire des fellations puis à avoir des rapports vaginaux et anaux sans préservatif. Puis la «meute» l'a laissée à demi-nue, lui volant son portable. Mais ils avaient pris soin de diffuser une vidéo de leurs misérables ébats dans leur groupe Whatsapp en la titrant : «en train d'en b... une à cinq». La victime y apparaît passive, les yeux fermés, cernée et rivée au mur. Elle a ensuite été retrouvée sur un banc, en pleurs, par des passants.
D'autres échanges de leur messagerie Whatsapp ont circulé dans la presse espagnole, mais le juge a empêché qu'ils ne figurent parmi les pièces du procès. Les conversations évoquaient notamment le souhait de «baiser une nana à cinq».
#YoSiTeCreo#LaManadaSomosNosotras#Madrid#Barcelonapic.twitter.com/RSQChaeYwX
— Teresa Rovira (@PisandoFuerte10) 17 novembre 2017
Chaque année, les fêtes de Pampelune attirent des dizaines de milliers de personnes habillées en blanc et rouge. On déplore à chaque édition des agressions sexuelles et parfois des viols.