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Bruxelles et l'OTAN main dans la main pour préparer les pays européens à la guerre

A la demande de l'OTAN, l'UE a élaboré un plan de mise à niveau et d'uniformisation des infrastructures civiles. Ponts et tunnels seront mis au gabarit afin de permettre aux chars d'assaut de l'OTAN de mieux circuler partout dans l'Union européenne.

Démonstration de force, bluff, ou intimidation ? Quoi qu'il en soit, la décision de Bruxelles de se plier, avec bonne grâce, aux demandes de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) pourrait contribuer à renforcer le sentiment de vivre une période d'avant-guerre. L'Union européenne (UE) a ainsi annoncé le 28 mars un plan visant à améliorer la mobilité des troupes des Etats membres qui se sont placés sous le commandement de l'organisation militaire, dont Washington est le fer de lance.

Bruxelles se conforme ainsi à la demande faite par le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, en novembre 2017. «L'Alliance souhaite que les axes routiers européens soient prêts à supporter la mobilisation rapide de chars d'assaut de pièces d'artillerie et autres», avait alors déclaré le patron de l'organisation militaire. Aussi ce projet militaire présenté officiellement ce 28 mars, baptisé «Action Plan on Military Mobility», prévoit d'unifier les réglementations et standards des Etats membres de l'UE, afin de mettre, par exemple, les tunnels au même gabarit.

«En optimisant la mobilité militaire dans l'Union européenne, nous pourrons être plus à même de prévenir des crises, de déployer nos missions, et de répondre plus rapidement face aux défis qui se présenteraient», s'est ainsi félicitée Federica Mogherini, membre de la Commission Juncker et patronne de la diplomatie européenne, alors que le plan doit ensuite être transmis aux gouvernements des Etats membres ainsi qu'au Parlement européen.

Intégration militaire de l'UE et «menace russe»

La formulation très générale de la haute représentante de l'Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité semble toutefois confirmer deux choses. Premièrement, Bruxelles se donne bien pour vocation de prendre en charge la défense de ses Etats membres. Accélérant l'agenda de la création d'une force militaire supranationale, 23 pays européens ont d'ailleurs lancé en novembre 2017 une structure de coopération militaire permanente, baptisée en anglais PESCO.

Ce qui est bon pour l'Europe est bon pour l'OTAN

Deuxièmement, la Défense européenne s'inscrit non pas en opposition avec l'OTAN mais en complémentarité. «Ce qui est bon pour l'Europe est bon pour l'OTAN», s'était ainsi félicité Jens Stoltenberg à l'annonce de la signature de la PESCO en novembre dernier. Dans le même temps, semblant tracer les limites de l'intégration militaire européenne tolérées par l'OTAN, Jens Stoltenberg a demandé en février dernier que l'UE «ne se substitue pas à ce que fait l'OTAN». «Cela n'aurait aucun sens pour l'UE et l'OTAN d'entrer en concurrence», avait-il martelé.

Enfin, si la Russie n'est pas ici nommément ciblée, les «défis» évoqués par Federica Mogherini pourraient bien faire allusion à cette dernière. Depuis plusieurs années en effet, l'OTAN brandit la «menace russe» pour justifier une expansion continue vers l'est du continent, jusqu'au frontières mêmes de la Fédération de Russie.

Dans ce contexte, les manœuvres conjointes Zapad de la Russie et de la Biélorussie de septembre 2017, bien que menées dans la stricte limite de leurs territoires nationaux, ont été présentées comme des exercices aux portes de l'Europe, menaçant curieusement le «flanc est» de l'OTAN, lui-même aux portes de la Russie.

Usant de cette curieuse inversion, Washington a décidé d'acheminer chars d'assaut et matériel militaire dans plusieurs pays d'Europe de l'Est. Dans le même temps, l'Alliance atlantique multiplie les exercices sur un continent en pleine remilitarisation. En juin 2017, l'OTAN avait conduit des exercices d'une ampleur sans précédent en Pologne, mobilisant des avions britanniques et des hélicoptères américains. Mais l'Alliance se montre également très active dans des pays frontaliers de la Russie comme l'Estonie. A cela s'ajoutent de nombreux vols de reconnaissance d'avions de l'OTAN, jouant dangereusement avec l'espace aérien russe.

A plusieurs reprises, Moscou a estimé qu'une accumulation des forces de l'OTAN aux frontières du pays nuisait à l'équilibre des forces. La Russie a en outre démenti à plusieurs reprises l’existence de supposés projets d’attaque contre ses voisins. Moscou dénonce pour sa part le renforcement militaire de l’OTAN près de ses frontières, le qualifiant même de menace pour sa sécurité.

Alexandre Keller

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