Le sénateur russe Kerimov mis en examen et placé sous contrôle judiciaire à Nice

Arrêté à l’aéroport de Nice, l'élu russe soupçonné de blanchiment de fraude fiscale par la justice française a été contraint de verser une caution de cinq millions d’euros. Moscou dénonce une violation de l'immunité diplomatique.

Le milliardaire et sénateur russe Souleïman Kerimov a été mis en examen le 22 novembre par un juge d'instruction de Nice pour blanchiment de fraude fiscale et placé sous un strict contrôle judiciaire, qui lui interdit de quitter les Alpes-Maritimes. Il devra remettre son passeport russe aux autorités, et verser une caution de cinq millions d'euros, d’après le procureur de la République de Nice, Jean-Michel Prêtre, cité par l’AFP.

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Le sénateur, dont l'interpellation le 21 novembre à l'aéroport de Nice a provoqué la colère de Moscou, a également l'obligation de «se présenter plusieurs fois par semaine» aux services de police et l'interdiction d'entrer en contact avec certaines personnes liées au dossier.

Le parquet avait requis son placement en détention provisoire, mais le juge des libertés et de la détention a choisi de lui imposer ce strict contrôle judiciaire.

Souleïman Kerimov est soupçonné par le parquet français de s'être approprié plusieurs propriétés mitoyennes sur la presqu'île du Cap d'Antibes, havre pour milliardaires, par des achats successifs réalisés sous un prête-nom et pour des montants sous-déclarés. Il pourrait avoir à rembourser «plusieurs dizaines de millions d'euros» au fisc français, selon une source proche du dossier.

Son factotum dans l'Hexagone, un homme de nationalité française, a été mis en examen également. Trois autres gardés à vue seront convoqués ultérieurement par le juge, selon une source proche du dossier.

L'affaire, à l'instruction depuis trois ans, avait déjà débouché sur des saisies, une perquisition en février et les mises en examen d'un avocat fiscaliste de la Côte d'Azur et de deux hommes d'affaires suisses.

Crise diplomatique avec Moscou

Avec la mise en examen de Souleïman Kerimov, la justice française a frappé plus fort : le milliardaire est détenteur d'un passeport diplomatique, qu'il n'aurait pas utilisé le 21 novembre, voyageant pour raisons privées. Ce statut lui garantit pourtant une immunité diplomatique et empêche théoriquement sa mise en détention en territoire étranger.

Le chargé d'affaires français à Moscou a été convoqué après que la Douma, chambre basse du Parlement, eut voté une résolution dénonçant une violation de la convention de Vienne sur l'immunité diplomatique. Le ministère russe des Affaires étrangères a fait parvenir une note officielle à Paris en lien avec l’arrestation.

«Le statut de sénateur de Souleïman Kerimov, ainsi que le fait qu'il soit citoyen de la Russie, constituent un gage que nous entreprendrons tous les efforts possibles, les efforts maximaux pour protéger ses intérêts juridiques», a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. «Monsieur Kerimov bénéficie d'une immunité de juridiction pénale étrangère pour les seuls faits accomplis dans l'exercice de ses fonctions», a réagi le service de presse du Quai d'Orsay.

Classé 21e fortune de Russie par le magazine Forbes qui estime son patrimoine à sept milliards de dollars (environ six milliards d'euros), l'oligarque de 51 ans représente sa république natale de Daguestan à la chambre haute du Parlement russe.

Souleïman Kerimov a fait fortune lors de la chute de l'URSS. Il a notamment détenu des parts dans le numéro un mondial des engrais agricoles Uralkali et contrôlé le club de football daguestanais d'Anzhi Makhachkala, qu'il avait hissé un temps au sommet en achetant des joueurs de premier plan comme le Camerounais Samuel Eto'o ou le Brésilien Roberto Carlos.

Après d'importantes pertes financières, il a cédé la plupart de ses actifs et détient désormais, avec sa famille, le producteur d'or Polyus.