Les tensions diplomatiques entre Washington et Ankara virent à la guerre des visas
Les Etats-Unis ont annoncé qu'ils réduisaient le nombre de visas délivrés aux ressortissants turcs, avant que la Turquie ne prenne la même décision. Au cœur des tensions : l'arrestation d'un employé turc de l'ambassade américaine à Ankara.
Les Etats-Unis et la Turquie ont décidé de réduire leurs services de délivrance de visas respectifs le 8 octobre. Ces deux décisions conjointes risquent d'alimenter un climat diplomatique déjà tendu et qu'a récemment accentué l'arrestation d'un employé turc à la mission américaine à Istanbul la semaine précédente.
C'est l'ambassade des Etats-Unis à Ankara qui a été la première à annoncer que le gouvernement américain avait réévalué «l'engagement» de la Turquie dans la sécurité du personnel et des services de ses missions diplomatiques «à la lumière des événements récents». Si la formule est délibérément vague, il ne fait aucun doute que c'est bel et bien l'arrestation de l'employé turc de l'ambassade américaine qui est ici évoquée.
Concrètement, les Etats-Unis ont «suspendu tous les services de visas pour les non-immigrants dans tous les bureaux diplomatiques américains en Turquie», selon un communiqué de presse de l'ambassade. Les visas de non-immigrant sont en général délivrés aux personnes se trouvant sur le territoire américain pour tourisme, traitements médicaux, affaires, travail temporaire ou études.
La Turquie réagit sous forme de «moquerie»
Dès le 8 octobre, la Turquie a décidé de réagir en annonçant la suspension de «tous les services de visas» pour les ressortissants américains souhaitant se rendre en Turquie, quel que soit le motif de leur voyage. Les délivrances de visas en ligne et à la frontière sont également concernées.
Le chef de la diplomatie syrienne ne reconnaîtra pas les résultats du #référendum des #Kurdes en #Irak
— RT France (@RTenfrancais) 26 septembre 2017
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Dans ce que l'AFP décrit comme une «tentative apparente de se moquer de l'annonce américaine», l'ambassade turque à Washington a choisi de publier deux déclarations reprenant presque mots pour mots les termes employés dans le communiqué de l'ambassade américaine à Ankara.
Des accusations d'espionnage rejetées par Washington
Un tribunal turc a placé en détention un citoyen turc salarié de l'ambassade américaine le 3 octobre dernier, créant de vifs remous entre Ankara et Washington. L'individu, inculpé pour espionnage et tentative de renversement du gouvernement, est suspecté d'avoir entretenu des liens avec le prêcheur Fetullah Gulen, que le président turc Recep Tayyip Erdogan estime impliqué dans la tentative de coup d'Etat de l'été 2016.
Rapidement, l'ambassade des Etats-Unis avait réagi à cette arrestation en se disant «profondément préoccupée» par l'arrestation de son employé. Elle avait en outre rejeté les allégations visant celui-ci, assurant qu'elles étaient «totalement sans fondement». De son côté, le porte-parole de la présidence turque, Ibrahim Kalin, avait défendu cette arrestation, affirmant «qu'il [devait] y avoir des preuves sérieuses» la justifiant. Il pointait notamment du doigt un appel téléphonique passé du consulat américain d'Istanbul à un suspect clé le soir du coup d'Etat, le 15 juillet 2016.
L'employé placé en détention nie entretenir des liens avec Fetullah Gulen. Ce prêcheur, exilé aux Etats-Unis depuis 1999, est à la tête d'un puissant mouvement politico-religieux portant son nom. S'il comptait parmi les proches soutiens de Recep Tayyip Erdogan avant 2010, il multiplie désormais les critiques envers le gouvernement turc, notamment au sujet des négociations entreprises par ce dernier avec les mouvements kurdes, ou encore sur ses rapports conflictuels avec Israël.