La Tunisie va supprimer l'autorisation pour les violeurs de mineures d'épouser leurs victimes
L'affaire avait suscité un scandale : une jeune fille de 13 ans tombée enceinte d'un violeur, membre de sa famille, avait dû l'épouser conformément à une décision de justice. Le Premier ministre a dit vouloir en finir avec «ces lois dépassées».
«Notre pays ne peut pas continuer à se référer à des lois dépassées et qui ne reflètent pas l'esprit des droits et des libertés», a déclaré le Premier ministre tunisien Youssef Chahed pour annoncer l'abrogation de la loi autorisant les violeurs de mineures à échapper aux poursuites judiciaires en épousant leur victime.
#Tunisie : la justice valide le mariage d'une fille de 13 ans et du violeur dont elle est enceinte https://t.co/OiLonfc0N1pic.twitter.com/Xa9xzSdl6F
— RT France (@RTenfrancais) 14 décembre 2016
Cette annonce intervient alors qu'un scandale secoue le pays depuis quelques jours. La justice tunisienne avait en effet autorisé le mariage d'une jeune fille de 13 ans, abusée par un membre de sa famille de 20 ans, qui l'avait mise enceinte avec son bourreau. Des manifestations ont eu lieu dans la foulée et une pétition réclamant la suppression de l'article 227 du code pénal, précisant que «le mariage avec la victime arrête les poursuites» a été lancée.
Si «l'application de cette loi est assez rare», de l'aveu d'une représentante de l'Association tunisienne des femmes démocrates, elle n'en constitue pas moins un «gros problème» dans ce pays pourtant réputé pour être à la pointe du respect des droits des femmes dans le monde arabe. Le ministère tunisien de la Femme, de la famille et de l'enfance, entendait «rendre nulle l'autorisation judiciaire et invalider le contrat du mariage afin de préserver l'intérêt supérieur de la fille».
La mobilisation, dans la rue et sur les réseaux sociaux, avait été assez intense, les manifestants réclamant l'application de peines sévères à l'encontre des violeurs.
Un avocat tunisien se félicite de cette avancée pour le droit des femmes, tout en disant s'attendre à «une jurisprudence». Il félicite le procureur de la République du Kef, qui avait demandé l'annulation de la décision de justice autorisant le mariage de la jeune fille de 13 ans, signale que la société tunisienne, parcourue de tensions sur fond de montée de l'islamisme, est partagée jusque dans les milieux politiques et judiciaires.
Au mois d'octobre 2016, une autre affaire avait déclenché un véritable tollé dans le pays, attirant l'attention des médias étrangers. Un animateur de télévision avait interrogé une jeune femme victime de viol et lui avait fait demander pardon à son agresseur, lui suggérant alors de l'épouser. «C'est de ta faute, marie-toi avec ton violeur», avait-il conclu.