Décidément, alors qu’il n’a même pas commencé, l’Euro 2016 est déjà pollué par des affaires extra-sportives. Après la polémique Cantona-Deschamps-Benzema en France, les commentaires racistes de deux animateurs roumains lors d’un match amical, c’est au tour de l’Allemagne de composer avec des sorties polémiques.
Dans un entretien accordé au magazine Spiegel, le vice-président de l’AfD a regretté que la «Nationalmannschaft» ne soit plus allemande : «L'équipe nationale allemande ou anglaise n'est plus depuis longtemps allemande ou anglaise, au sens classique du terme», affirme M. Gauland qui, la semaine passée, avait choqué en affirmant que les gens appréciaient Jérome Boateng «en tant que footballeur» mais ne voulaient pas l'avoir «comme voisin».
Foot-business et multiculturalisme
Après avoir regretté que le sport numéro un au monde ne soit plus «une question d'identité nationale» mais «une question d’argent», il s’en est pris à nouveau à l’immigration.
Selon lui, le fait que l’équipe d’Allemagne, championne du monde en titre et favorite de l’Euro, soit multi-ethnique ne signifie pas que le pays ait un désir de multi-culturalisme. «Les gens ne sont pas si “multikulti” (multiculturels), souligne-t-il. Il y a encore un lien très fort au sol, aux gens, à l'histoire et à la tradition. Certes, ils vibrent avec le football mais ce monde multiculturel est étranger à la plupart».
Le voyage de Mesut Özil, membre de la sélection nationale, à La Mecque a particulièrement fait réagir Alexander Gauland qui ose un parallèle qui ne manquera pas de faire parler : «Dans le cas de fonctionnaires, de professeurs, d'hommes politiques ou de personnes décisionnaires, je poserais volontiers la question: est-ce que quelqu'un qui va à La Mecque est vraiment à sa place dans la démocratie allemande ? Est-ce que sa loyauté va à la Loi fondamentale (la constitution allemande) ou à un islam qui est un islam politique ?»
Le président de la fédération au secours de son équipe
Ces déclarations ont entraîné une vive réaction du président de la fédération allemande de football (DFB), Reinhard Grindel. Il les a qualifié de «propos isolés». «Ce n'est pas l'esprit qui règne dans notre population», a-t-il estimé, soulignant «l'élan de sympathie» qui s'est exprimé dans les clubs pour accueillir les réfugiés.
«Nous vivons volontiers avec les réfugiés ainsi que les gens originaires de l'immigration et nous nous faisons un devoir de bien les intégrer dans nos clubs. Et si nous ne parvenons pas à bien accueillir ces enfants dans nos clubs, c'est le football allemand dans son ensemble qui en pâtira à l'avenir», a affirmé M. Grindel.
Il a poursuivi avec enthousiasme son argumentaire en faveur d’une société multi-culturaliste : «La vague de sympathie qui s'est exprimée à l'égard de Jérome Boateng mais aussi de Mesut Özil montre qu'une large part de la population voit l'équipe nationale comme un exemple réussi d'intégration.»
Depuis plusieurs mois, l’AfD connaît un succès grandissant. Il a remporté plusieurs victoires électorales d’importance et ne cesse de croître dans les sondages. Lors des dernières élections régionales, le parti a fait son entrée dans trois parlements. En Saxe-Anhalt, l’AfD a même obtenu un score historique pour un parti populiste de droite : de 21,5% à 22,8 des électeurs ont voté pour eux. Cet essor coïncide avec l’inquiétude d’une partie du peuple allemand face au flot de réfugiés qui continue d’arriver dans le pays. En 2015, plus d’un million de demandeurs d’asile ont rejoint l’Allemagne.