L'Assemblée nationale sourde face à des signalements visant un député ex-LREM ?

L'Assemblée nationale sourde face à des signalements visant un député ex-LREM ?© Michel EULER Source: AP
L'hémicycle de l'Assemblée nationale, à Paris, le 1er avril 2021 (image d'illustration).
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Selon Mediapart, le député Benoît Simian, bientôt jugé pour «harcèlement» présumé sur son épouse, a fait l'objet de signalements pour divers motifs : propositions suggestives, demande de logement social pour un proche... L'intéressé nie les faits.

En novembre 2021, le député Benoît Simian a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Bordeaux pour des faits présumés de harcèlement sur son épouse, qu’il conteste. Dans une enquête publiée le 29 décembre, Mediapart révèle que l'élu serait également accusé par certains témoignages – dont certains envoyés par courrier au président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand – d'une demande de logement social pour un collaborateur, de propositions suggestives à une collaboratrice, et d'autres incidents. Des agissements qu'il nie en bloc, mais qui auraient fait l'objet de signalements sans susciter, selon Mediapart, de réaction des instances du Palais Bourbon. L'Assemblée avait d'ailleurs rejeté une demande de levée d’immunité parlementaire de l'élu en décembre 2020.

Le déontologue de l'Assemblée nationale saisi par une collaboratrice 

Comme l'indique le site d'information sur base de témoignages et de documents auxquels il a eu accès, une collaboratrice parlementaire de Benoît Simian a, en septembre 2021, saisi le déontologue de l’Assemblée nationale pour dénoncer l’attitude présumée de ce député de la Gironde à son égard. «Je suis irascible et je pleure régulièrement depuis un mois. J’en suis à mon troisième arrêt de travail en un mois et le médecin m’a prescrit des médicaments pour réduire le stress et pouvoir dormir. J’ai des boules au ventre de stress, je suis fatiguée et parfois j’ai l’impression que ma tête vacille», a-t-elle témoigné, en alertant également sur la situation d’une collègue – également en arrêt maladie – et que le député n’aurait selon elle «cessé de déprécier à tort».

Mi-octobre 2020, lors d'un déplacement de trois jours avec l'élu dans sa circonscription, la collaboratrice se serait vue proposer de dormir dans le même lit que Benoît Simian, après un dîner chez ses parents. Elle aurait refusé, et aurait donc passé la nuit sur le sol. Sollicité par Mediapart, le député livre une autre version et précise avoir souhaité dormir sur place car ils ne pouvaient prendre la route, ayant consommé de l’alcool. Il a par ailleurs contesté tout comportement déplacé à l’égard de sa salariée.

Lors de la seconde nuit de ce déplacement dans le Médoc, Benoît Simian aurait à nouveau annoncé à sa collaboratrice qu’ils dormiraient dans la même chambre, cette fois à l'hôtel. L'élu aurait expliqué à la jeune femme qu’il n'avait plus de domicile depuis son divorce, et qu'il faisait face à des problèmes financiers. Selon la collaboratrice, le député aurait lors de cette soirée tenté d’entrer dans la salle de bain, et elle s’y serait opposé fermement. De son côté, Benoît Simian explique à Mediapart avoir seulement sollicité sa collaboratrice pour lui «demander du dentifrice», sans aucune volonté d’entrer dans la salle de bain pendant sa douche.

D'après l'enquête de Mediapart, ces situations feraient suite à de nombreux messages intimes envoyés par le député à son employée entre septembre 2020 et janvier 2021, bien qu'elle lui aurait indiqué être en couple. Benoît Simian lui aurait même proposé, sur le ton de la blague, de s’afficher ensemble dans Paris Match, et de partir en croisière dans l’océan Pacifique pour écrire un livre politique.

Le député justifie pour sa part la dégradation des relations avec sa collaboratrice par des «divergences politiques» et des problèmes liés à l’organisation du télétravail. 

Ce signalement est pour l'heure resté lettre morte, selon le site d'information.

Un statut de député mis au service de déboire conjugaux ? 

En septembre 2020, c'est le successeur de Benoît Simian à la mairie de Ludon-Médoc qui avait écrit au président LREM de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand. Philippe Ducamp avait rédigé une missive de 40 pages dénonçant le fait que son prédécesseur «essaye de se servir de la mairie pour régler le différend qui l’oppose à son épouse». «Il nous demande notamment de remettre à Madame le chèque de pension alimentaire qu’il a déposé en mairie et de prendre un arrêté de péril sur sa maison et de la reloger», affirmait celui qui fut le premier adjoint de Benoît Simian avant que celui-ci ne soit élu député sous les couleurs du parti macroniste, après avoir été membre du Parti socialiste.

L'épouse n'avait pas demandé ce relogement, mais le député explique agir en «bon père de famille», auprès de Mediapart : «C’est une maison ancienne. Quand je vois une fissure dans la cheminée, je me dis, s’il arrive quelque chose, c’est sur moi que ça va retomber, je fais ça pour me couvrir», appuie-t-il. 

Au début de l’été 2020, Benoît Simian aurait par ailleurs tenté de réinvestir le domicile conjugal, en installant une permanence parlementaire dans un studio de jardin de la propriété. Un projet auquel la justice aurait mis court, au motif que l'élu désormais membre du groupe d'opposition Libertés et Territoires n’avait pas le droit d’approcher son épouse. 

Benoît Simian aurait par ailleurs tenté de faire payer à sa femme la facture d'une ligne téléphonique qu'il avait ouverte, et tenté de faire fermer la ligne téléphonique qu’elle utilise en passant par le responsable des relations institutionnelles de son opérateur.

Toujours selon Mediapart, il aurait également fait appeler, toujours par son équipe parlementaire, le service d’indemnisation de Pôle emploi pour dénoncer une «escroquerie à l’allocation chômage» de la part de son épouse, qui ne sera pas mise en cause.

Tout semble indiquer que Benoît Simian cherche à mettre la main sur des biens situés sur la commune mais dont il n’est pas le propriétaire ou l’usager

Dans son courrier, Philippe Ducamp avait également tenu à porter à la connaissance de Richard Ferrand le fait que des déclarations préalables de travaux avaient été déposées en mairie «tout au long de l’été» au nom du député par ses attachés parlementaires. Mediapart estime que «tout semble indiquer que Benoît Simian cherche à mettre la main sur des biens situés sur la commune mais dont il n’est pas le propriétaire ou l’usager».

Le 20 août 2020 par exemple, un collaborateur parlementaire avait rempli au nom du député une demande pour un projet d’éco-pâturage sur une parcelle dont Benoît Simian n’est ni propriétaire ni locataire. «J’ai toujours eu à cœur de lancer ce type d’exploitation [...] Sauf qu’après je prends conseil auprès de mon notaire, il me dit : "Ne faites rien, monsieur Simian, tant que votre procédure de divorce n’est pas prononcée". Donc je stoppe tout, tout est en sommeil»s'est expliqué l’élu auprès de Mediapart.

Un mois plus tôt, Benoît Simian aurait saisi le directeur général de l’Agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine, dans un courrier à en-tête de l’Assemblée nationale, pour «signale[r] l’état de danger [d'une] personne âgée autour de 80 ans, vivant seule, sous assistance respiratoire, dans une maison insalubre». Dans un courrier de réponse au député, l'ARS aurait alors indiqué en ces termes que le signalement était infondé : «Le logement est bien entretenu, en bon état, sans aucun signe d’insalubrité ou de péril.»

Le mois suivant, en août 2020, Benoît Simian aurait alerté – toujours avec un courrier portant l’en-tête de l’Assemblée nationale – le préfet de Gironde de la situation d’une seconde personne âgée vivant, selon lui, «dans des conditions indignes» à Ludon-Médoc. Le député aurait également lancé une procédure d'acquisition de cette propriété auprès des services fiscaux et aurait déposé en mairie une déclaration de travaux pour ce bien qui ne lui appartenait pourtant pas. Le député a affirmé à Mediapart que le logement était un «taudis» et a expliqué aussi avoir déposé une déclaration de travaux dans le but de l’aider et de rénover le logement rapidement. «Je me dis, si la propriétaire ne bouge pas, moi je vais faire le nécessaire pour faire les travaux, je suis choqué par ce que je vois», a-t-il affirmé.

«J’arrête là ce qui ressemble à un inventaire à la Prévert mais qui est encore loin d’être exhaustif », conclut Philippe Ducamp dans son courrier, en joignant à celui-ci «l’ensemble des documents qui illustrent chacun de [ses] propos». Le maire attendrait toujours une réponse de Richard Ferrand. 

Une demande de logement social pour un collaborateur

En octobre 2020, Benoît Simian aurait par ailleurs appuyé la demande de logement social de l'un de ses collaborateurs parlementaires, Rotui Tehei, avec lequel il aurait un temps habité. Dans le formulaire concernant une maison T4, Rotui Tehei aurait évoqué une demande «urgente» au motif de «l'exercice d’une activité complémentaire ponctuelle en télétravail» ainsi que par «l’arrivée de [sa] fille adoptive». Il renseigne alors, selon Mediapart, l'identité de sa nièce âgée d'une vingtaine d'années, auprès de laquelle il jouerait un rôle important, selon les explications de Benoît Simian à Mediapart. La démarche auprès de Domofrance n’a pas abouti et les équipes du député auraient alors démarché en janvier 2021 Gironde Habitat, l’office public de l’habitat du département.

Là encore, Benoît Simian a une explication. Comme le rapporte Mediapart, «Benoît Simian justifie son intervention auprès des bailleurs par le fait que, selon lui, son collaborateur pourrait avoir droit à un logement social pris sur le contingent des logements sociaux réservés pour les fonctionnaires (5 % du parc). "Les bailleurs sociaux considèrent que nos collaborateurs sont des personnels comme des personnels fonctionnaires", soutient le député.» De son côté, le collaborateur de Rotui Tehei n'a pas répondu aux sollicitations de Mediapart. 

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