La rave party de Redon «emblématique des dérives du maintien de l'ordre», selon Amnesty
Amnesty International a estimé dans un rapport que la force employée par la gendarmerie en intervention lors d'une free-party non déclarée fin juin n'était «ni nécessaire ni proportionnée» et contraire aux «principes de base des Nations unies».
L'usage prolongé de gaz lacrymogènes et de grenades pour disperser de nuit des centaines de participants à la rave party illégale de Redon (Ille-et-Vilaine) en juin, dont un a eu la main arrachée, est «emblématique des dérives du maintien de l'ordre en France», selon un rapport d'Amnesty International publié ce 14 septembre. La force n'était «ni nécessaire ni proportionnée» et les conditions d'intervention contraires aux «principes de base des Nations unies», d'après ce document réalisé à partir d'entretiens, d'articles et de vidéos.
De violents affrontements avaient éclaté dans la nuit du 18 au 19 juin entre les forces de l'ordre et des participants à une rave party non déclarée, organisée en hommage à Steve Maia Caniço, mort noyé à Nantes en 2019 à la suite d'une opération de police lors des Fêtes de la musique. Plusieurs dizaines de blessés ont été recensés parmi les participants, selon Amnesty, et 11 chez les gendarmes.
Selon le préfet d'Ille-et-Vilaine, les gendarmes avaient «essuyé toute la nuit des jets de cocktails Molotov, boules de pétanque, etc». «Aucune violence n'a été observée de la part de participants avant l'intervention violente des forces de l'ordre», affirme pourtant Amnesty. L'ONG critique un usage de la force «en premier recours», l'absence de médiation et des sommations «peu audibles».
«A Redon, les forces de l’ordre ont lancé pendant plus de sept heures des grenades lacrymogènes et assourdissantes sur une foule, de nuit, y compris des grenades susceptibles de mutiler les personnes. L'utilisation de ces armes dans des conditions aussi dangereuses a conduit à des dizaines de blessures : plaies, fracture, brûlures, mais aussi des crises de panique et détresse respiratoire», relève Amnesty.
Amnesty plaide pour l'interdiction des grenades explosives en maintien de l'ordre
«La durée de l’intervention révèle à quel point l’approche était inefficace», considère l'ONG qui dénonce aussi une absence totale de plan de secours aux blessés. «Un usage de la force qui n'est pas nécessaire peut s'apparenter à une punition corporelle, ce qui est illégal au regard du droit international relatif aux droits humains», ajoute Amnesty. Selon elle, «le cas de Redon se place dans un contexte de répétition des cas d'usage excessif de la force dans des opérations de maintien de l’ordre», précise encore Amnesty.
L'ONG alerte le gouvernement «sur l'urgence d'interdire les grenades explosives en maintien de l'ordre» et de «revoir les stratégies d'intervention pour qu'elles reposent sur des approches de dialogue et de désescalade». Elle demande aussi la création d'«un organe indépendant chargé d'enquêter sur les plaintes déposées contre les agents de la force publique».
Un élément de langage d'ailleurs utilisé par l'Elysée, qui a récemment fait savoir que le président de la République devrait prochainement annoncer les modalités d'un «contrôle indépendant» de «l'action des forces de l'ordre».
A la suite des événements de Redon, la justice avait ouvert deux enquêtes pour «blessures involontaires» et pour «organisation illicite d'un rassemblement festif à caractère musical».