Loi Sécurité globale : la crise politique s'étend au Sénat, Castex interpellé
- Avec AFP
Les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale dénoncent vigoureusement la méthode de Jean Castex visant à créer une commission pour réécrire l'article 24 de la loi Sécurité globale. Jean Castex assure qu'elle n'aura pas ce rôle-là.
Les présidents des deux chambres françaises ne cachent plus leur irritation. Le Républicain (LR) Gérard Larcher, à la tête du Sénat, a ainsi demandé le 27 novembre au Premier ministre Jean Castex de «renoncer à sa décision de nommer une commission consultative» pour réécrire l'article 24 controversé de la loi Sécurité globale encadrant la diffusion d'images de policiers, selon un communiqué transmis à l'AFP.
.@gerard_larcher : "C’est au Parlement dans le cadre d’un débat démocratique et public de rédiger ou réécrire les textes de loi. Ce rôle ne revient pas à une commission ou un comité d’experts qui n’a aucune légitimité démocratique"#PPLSecuriteGlobale
— Sénat (@Senat) November 27, 2020
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«Cela va à l'encontre du fonctionnement normal de nos institutions et c'est en totale contradiction avec les droits du Parlement», souligne-t-il, rappelant que la proposition de loi «est en cours de discussion au Parlement».
«Si le Premier ministre persistait, le président du Sénat considérerait les travaux de cette commission comme nuls et non avenus», avertit Gérard Larcher.
«Le débat parlementaire a été engagé. Il doit se poursuivre conformément à nos institutions dans la navette entre l'Assemblée nationale et le Sénat», affirme-t-il avant de s'interroger : «Que vient faire une commission dans cette séquence sinon porter une atteinte inacceptable aux droits du Parlement ? Le gouvernement veut-il modifier le processus d’élaboration de la loi ?»
Le président du Sénat souligne également que selon la Constitution, c'est «au Parlement, dans le cadre d’un débat démocratique et public, de rédiger ou réécrire les textes de loi, ce rôle ne revient pas à une commission ou un comité d’experts de plus qui n’a aucune légitimité démocratique».
Plus surprenant, le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand, pourtant membre de La République en marche (LREM), a également exprimé au chef du gouvernement sa «vive émotion» et son «opposition» à la création d'une commission extérieure. Lors d'un entretien téléphonique, Richard Ferrand lui «a indiqué que s'il était loisible au gouvernement de s'entourer des éclairages qu'il souhaite recueillir, il n'appartient pas au gouvernement de substituer aux prérogatives parlementaires les travaux d'une commission extérieure», selon son entourage, contacté par l'AFP.
In fine, seuls les parlementaires écrivent et votent la loi
Dans cette rare mise au point institutionnelle, le titulaire du perchoir, très proche d'Emmanuel Macron, a rappelé «qu'in fine, seuls les parlementaires écrivent et votent la loi».
Face à cette crise institutionnelle, Matignon a annoncé à l'AFP que la commission indépendante ne sera finalement pas chargée de réécrire le controversé article 24. La «réécriture d'une disposition législative (...) ne saurait relever que du Parlement», a ainsi insisté Matignon.
Ce projet de commission répondait au tollé provoqué par cet article 24 qui encadre la diffusion d'images de policiers. Jean Castex avait ainsi annoncé le 26 novembre la création d'une «commission indépendante chargée de proposer une nouvelle écriture» de l'article, sur proposition du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.
L'initiative a provoqué une crise politique, au sein même des macronistes, Christophe Castaner, président du groupe LREM à l'Assemblée, faisant part de son «étonnement» face à l'initiative de Jean Castex.
Parlementaires de gauche et de droite ont dénoncé quant à eux une nouvelle marque de «mépris» pour leur travail de la part du gouvernement.