Retour des néonicotinoïdes «tueurs d’abeille» : une décision gouvernementale controversée
De Brune Poirson – ex-membre du gouvernement – à des députés Europe Ecologie les Verts, en passant par Benoît Hamon, de nombreuses personnalités politiques s'opposent à la réintroduction des néonicotinoïdes dans les cultures françaises.
Brune Poirson – ancienne secrétaire d’Etat auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire – s’oppose aujourd’hui au gouvernement sur un sujet dont elle avait la charge. Le 8 août, elle a en effet regretté dans un tweet la réautorisation partielle des pesticides néonicotinoïdes qui attaquent mortellement le système nerveux des insectes pollinisateurs. «Quelle agriculture française voulons-nous construire ? La réautorisation des insecticides tueurs d'abeilles est regrettable. Investissons dans l'agriculture durable et la nature, et non l'inverse !», s'est-elle indignée.
Quelle #agriculture française voulons-nous construire ? La réautorisation des insecticides tueurs d'abeilles est regrettable. Investissons dans l'agriculture #durable et la #nature, et non l'inverse ! #neonicotinoides#abeillespic.twitter.com/bQaNpez5fO
— Brune Poirson (@brunepoirson) August 8, 2020
Le 6 août, le ministère de l'Agriculture avait annoncé qu'à l’automne, une «modification législative», permettrait «pour la campagne 2021 et le cas échéant les deux campagnes suivantes tout au plus» des dérogations à l’interdiction de semences enrobées de néonicotinoïdes. Interdits par la loi biodiversité de 2016, ces substances pourront de nouveau être utilisées dans les cultures de betteraves, sujettes à une maladie virale, la jaunisse de la betterave, transmise par un puceron (Myzus persicae).
La Confédération générale des planteurs de betteraves – syndicat spécialisé affilié à la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) – estime que la France produira «600 000 à 800 000 tonnes de sucre» en moins cette année faute de solution face au mal qui touche les denrées. «C’est une perte probable supérieure à 150 millions d’euros et qui pourrait même atteindre les 200 millions d’euros pour les planteurs, l’ampleur de l’épidémie étant croissante», assurait Franck Sander, président de la CGB, le 31 juillet, dans une lettre ouverte au Premier Ministre. Le syndicat a ainsi demandé de pouvoir recourir à nouveau aux néonicotinoïdes pour garantir les rendements.
Rapidement, une partie de la classe politique a exprimé sur Twitter son incompréhension face à la décision annoncée.
«Véritable scandale», «régression démocratique majeure»
La députée européenne Europe Ecologie les Verts (EELV), Karima Delli, a qualifié de «véritable scandale» ce recul en matière environnementale, montrant du doigt le gouvernement et ses «actes qui détruisent la biodiversité».
Véritable scandale 😡! Le gvt revient sur une avancée de la loi #Biodiversité de 2016. Il réintroduit les insecticides ! 2020 c’est la fin de leur usage, désormais c’est leur retour.En matière d’écologie ce Gvt : grands discours et des actes qui détruisent la biodiversité ! pic.twitter.com/0mqyTlwQOy
— Karima Delli (@KarimaDelli) August 7, 2020
A son tour, Damien Carême, maire de Grande Synthe et député européen EELV, s’est insurgé contre le comportement «affligeant» d’Emmanuel Macron et de son Premier ministre Jean Castex, chantres du «virage écologique» réclamé par la convention citoyenne, peu prise en compte selon lui.
Et dire qu’@EmmanuelMacron et son 1er ministre @JeanCASTEX nous ont juré qu’ils avaient tout compris et qu’ils opéraient le virage écologique indispensable et réclamé par la convention citoyenne... Paroles, paroles, paroles... Affligeant ! https://t.co/elZVqFolGG via @lemondefr
— Damien CAREME 🌍 (@DamienCAREME) August 6, 2020
L'ancien candidat de gauche à l’élection présidentielle, Benoît Hamon, lui, a ironisé sur la réintroduction de ces «tueurs d’abeille» : «Dans les zones concernées, les abeilles devront obligatoirement porter un masque.»
Donc, le gouvernement ré-autorise le poison des #neonicotinoides tueurs d'abeille. Mais @barbarapompili assure que la mesure sera "strictement encadrée". Dans les zones concernées les abeilles devront obligatoirement porter un masque. https://t.co/zY1hlhGfPp via @lemondefr
— Benoît Hamon (@benoithamon) August 7, 2020
De son côté, le député Génération.s – mouvement fondé par Benoît Hamon en 2017 – Régis Juanico s’est désolé devant «une régression démocratique majeure».
Sous la pression des betteraviers, le gouvernement réintroduit les néonicotinoïdes : une régression démocratique majeure quand on sait que le législateur a inscrit dans la loi l’interdiction des insecticides « tueurs d’abeilles » à compter du 1/9/2018... https://t.co/fyyGNTOIjQ
— Régis JUANICO (@Juanico) August 7, 2020
Esther Benbassa, sénatrice EELV de Paris s'est elle adressée directement à la nouvelle ministre de l’Ecologie, Barbara Pompili. «On découvre au passage qu'au sein de cet exécutif elle a moins de poids qu'une betterave... C'est bien dommage.», a-t-elle fait fait savoir.
#Néonicotinoïdes. Le gvt va réintroduire les #insecticides tueurs d’#abeilles. Alors ? Merci qui ? Merci @barbarapompili ! Dont on découvre au passage qu'au sein de cet exécutif elle a moins de poids qu'une #betterave... C'est bien dommage. https://t.co/0MxcP7kzUa
— Esther Benbassa 🌻 (@EstherBenbassa) August 7, 2020
Le 7 août, des éleveurs de maïs ont à leur tour demandé dans un communiqué à pouvoir utiliser des néonicotinoïdes afin de lutter contre les mouches, une position défendue par le syndicat des producteurs de maïs AGPM, une autre branche de la FNSEA.