France

Dupond-Moretti nommé ministre de la Justice : une chance pour Assange d'obtenir l'asile en France ?

Parmi ses célèbres clients aux profils très différents, Dupond-Moretti a défendu Assange. En février, il voulait demander à Emmanuel Macron d'accorder l'asile au journaliste que les Etats-Unis veulent juger. Il est désormais en bonne place pour agir.

Julian Assange pourra-t-il continuer de compter sur celui qui a été, jusqu'à il y a peu, son avocat français ? Eric Dupond-Moretti, fraîchement nommé ministre de la Justice du gouvernement Castex le 6 juillet, tenait il y a quatre mois, le 20 février, une conférence de presse à Paris en compagnie de John Shipton, père du journaliste australien, et de ses autres avocats, dont l'Espagnol Baltasar Garzon, ainsi que du secrétaire général de Reporters sans frontières Christophe Deloire. «Les 175 ans de prison qu'on lui promet aux Etats-Unis, c'est une peine indigne, insupportable et contraire à l'idée que l'on peut tous se faire des droits de l'Homme», avait alors déclaré Eric Dupond-Moretti.

Nous allons demander à rencontrer le chef de l'Etat sur le fondement de l'article 53 de la Constitution qui permet à un homme de demander l'asile à la France

Le même jour, sur le plateau de l'émission C à vous, sur France 5, l'avocat le plus célèbre de France dénonçait le traitement «inhumain, dégradant» subi par le fondateur de WikiLeaks auquel il a expliqué avoir rendu visite en prison. «On a eu en face de nous un homme extrêmement diminué, qui peine à s'exprimer. Il est dans une espèce de prostration extrêmement inquiétante», avait-il décrit sur un ton grave.

Dupond-Moretti demandait l'asile français pour Assange

La star du barreau français annonçait alors son intention de demander audience à Emmanuel Macron pour étudier la situation de Julian Assange.

«Nous allons demander à rencontrer le chef de l'Etat sur le fondement notamment de l'article 53 de la Constitution qui permet à un homme de demander l'asile à la France», avait-il fait savoir. 

Eric Dupond-Moretti rappelait à cet égard les liens professionnels et personnels de Julian Assange avec la France, d'une part, car WikiLeaks a «été en partie hébergé» sur le sol français et parce qu'Assange «a un fils mineur qui est français». En outre, il comptait saisir avec des avocats belges la Cour européenne des droits de l'Homme. «Pour des raisons techniques, cette juridiction a déjà été saisie», expliquait-il, ajoutant que la requête avait été jugée «irrecevable». «Mais nous allons la saisir sur un autre fondement», précisait-il.

Aujourd'hui ministre de la Justice, continuera-t-il à plaider la cause d'Assange et réussira-t-il à convaincre Emmanuel Macron de se dresser face à l'administration américaine dans un dossier aussi sensible ? Rien ne permet de l'affirmer à l'heure actuelle. D'autant plus que, sans aborder le cas du lanceur d'alerte en particulier, Eric Dupond-Moretti a affirmé lors de sa prise de fonction ce 7 juillet : «Je mettrai entre parenthèse mon métier d'avocat.»

Le fondateur de WikiLeaks se trouve actuellement en détention préventive à la prison de haute sécurité de Belmarsh, au Royaume-Uni, en attendant l'issue de son procès d'extradition vers les Etats-Unis. Il ne purge aucune peine de prison à proprement parler. La juge britannique en charge du dossier, Vanessa Baraitser, a refusé ses demandes de libération conditionnelle.

Si l'extradition devait aboutir, Julian Assange risque 175 ans de prison pour avoir publié, par le truchement de lanceurs d'alerte, des documents de l'armée américaine, dans lesquels sont exposés ce qui s'apparente à des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Le rapporteur spécial de l'ONU sur la torture ainsi que d'innombrables organisations de défense des droits de l'Homme et des journalistes, exigent du gouvernement britannique la libération immédiate et sans condition de Julian Assange, érigé au rang de héros du droit des peuples d'être informés.

Meriem Laribi