«100 000 morts» si le coronavirus se propage dans les Ehpad : les soignants donnent l'alerte
Les personnels de santé en gériatrie lancent l'alerte et mettent en garde contre le risque d'un bilan de 100 000 morts en Ehpad. Dans une lettre adressée au ministre de la Santé, ils réclament 500 000 masques par jour pour leurs établissements.
Dans une lettre envoyée au ministre de la santé, Olivier Veran, et révélée par France Télévisions le 20 mars, les professionnels de santé travaillant au contact de personnes âgées lancent une alerte pour indiquer la nécessité impérieuse de mieux les équiper en matériel de protection, et notamment de masques chirurgicaux. Ces professionnels des Ehpad (établissements de logement pour personnes âgées dépendantes), maisons de retraite et services à domicile, disent redouter la mort de 100 000 personnes si le virus venait à se propager parmi ces populations particulièrement fragiles. «En raison du nombre élevé de comorbidités, cette population est assortie d'un taux de mortalité de 15%, ce qui pourrait se traduire par plus de 100 000 décès dans l'éventualité d'une généralisation que nous n'osons imaginer», alertent les auteurs de la lettre adressée au ministre.
#Alerte : +++information FTV
— François Beaudonnet (@beaudonnet) March 20, 2020
Les professionnels des #EHPAD Viennent d'envoyer une lettre à Olivier Veran.
Il craignent qu'il y ait 100 000 morts du #coronavirus dans leurs établissements si des mesures immédiates de protection ne sont pas prises, dont la livraison de #masques. pic.twitter.com/JE2nHRoa8J
«La situation préoccupante observée dans un nombre de plus en plus élevé d’établissements et services révèle que l’extension du nombre de cas est rapide et qu’elle est, dans la très grande majorité des cas, consécutive à la transmission virale d’un soignant asymptomatique», écrivent ces professionnels. Ils rappellent à cet égard que leurs patients cumulent en moyenne «près de 8 maladies chroniques» et constituent par conséquent «une cible à très haut niveau d’exposition au risque d'infection au coronavirus Sars-CoV-2». «Dès que le virus est rentré dans l’Ehpad, c’est 5, 10, 15, 20, 75% de résidents atteints par le virus, et des taux de mortalité qui dépassent dans certains Ehpad les 30%», déplorait Gaël Durel, président de l’association nationale des médecins coordinateurs, MCOOR, sur France 2 le 19 mars.
500 000 masques par jour
Un million de résidents, dont l'âge moyen est de 85 ans, vivent aujourd'hui dans ces structures de soin. Pour éviter le désastre, les auteurs de la lettre réclament sans délai la livraison de pas moins de «500 000 masques par jour» à l'ensemble du personnel soignant. Le port du masque chirurgical pour tous les membres du personnel soignant des Ehpad, résidences et services à domicile, constitue de leur point de vue «une mesure centrale». Les auteurs de la lettre reviennent ensuite sur la stratégie gouvernementale en matière de gestion des masques, actuellement très difficiles à trouver. «La création d’un secteur dédié aux malades du Covid-19, actuellement préconisée par vos directives dans le cadre de la stratégie de gestion des masques chirurgicaux, nous paraît totalement inadaptée à la situation réelle des Ehpad», estiment-ils.
«Nous sommes vraiment mobilisés en permanence pour que les masques arrivent aux professionnels de santé», a assuré le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, lors de sa conférence de presse, le 20 mars au soir, alors qu'il était interrogé à ce sujet.
Dans un Ehpad de Thise (Bourgogne-Franche-Comté), 12 personnes âgées sont décédées en deux semaines, alors que l'établissement a été touché par la pandémie. Ces 12 personnes présentaient des symptômes similaires à ceux provoqués par le coronavirus. Les premiers cas de Covid-19 ont été détectés le 5 mars, a fait savoir à l'AFP un porte-parole de cet établissement, au sein duquel la moyenne d'âge est de 88 ans. «C'est difficile de savoir si ces décès sont liés au coronavirus car, comme partout en France, on ne dépiste plus systématiquement les nouveaux cas», a toutefois noté le porte-parole. En France actuellement, seules les personnes présentant des symptômes sévères de la maladie sont testées. Pourtant, l’utilité d’un dépistage précoce fait consensus dans les milieux scientifiques et tous les pays n’ont pas limité les tests aux formes sévères de Covid-19. En Corée du Sud ou en Allemagne, par exemple, des campagnes massives de dépistage sont mises en œuvre, et ces deux pays semblent pour le moment maîtriser l'épidémie.