France

Président et ministres suivis à la trace : la majorité peut-elle encore sortir sereinement ?

Cordons de policiers, président pisté, comités d'accueil hostiles : les opposants à Emmanuel Macron se sont donnés le mot pour perturber la moindre sortie des membres de la majorité. A mi-mandat, les actions de ce type se multiplient.

«S'ils veulent un responsable [...] qu'ils viennent le chercher !», bravait Emmanuel Macron devant ses soutiens réunis à la Maison de l'Amérique latine à Paris en juillet 2018. Mais le président de la République s'attendait-il à être pris au mot par ses opposants, qui peinent toujours à se faire entendre après plus d'un an de crise sociale ? Le mi-mandat à peine passé, force est de constater que les différentes sorties des membres de la majorité, qu'elles soient publiques ou non, sont de plus en plus compliquées.

Pas plus tard que le 30 janvier, c'est un comité d'accueil particulièrement hostile, composé d'au moins 200 manifestants, qui attendait Emmanuel Macron, venu inaugurer le festival de la BD à Angoulême (Charente).

La veille déjà, la venue d'Emmanuel Macron à la septième édition du dîner annuel du Conseil de coordination des organisations arméniennes de France (CCAF) à l'Hôtel du Collectionneur (VIIIe arrondissement), fut l'occasion d'une manifestation. Si le rassemblement était de moindre ampleur, la fuite sur les réseaux sociaux, de la présence du président de la République avait suscité une forte mobilisation des forces de l'ordre, afin d'éviter tout incident.

Et pour cause, si les forces de l'ordre étaient sur le qui-vive, c'est que le 17 janvier, la sortie d'Emmanuel Macron et de son épouse au théâtre des Bouffes du Nord, avait déjà été particulièrement perturbée. Un important dispositif de sécurité avait en effet dû s'assurer de la sortie sans incident du chef de l'Etat tandis que des manifestants s'étaient massés sur place afin de protester contre la politique sociale du gouvernement. Là encore, c'est sûr les réseaux sociaux que la localisation du président de la République avait été divulguée.

Si Emmanuel Macron est particulièrement visé par ce type d'actions, il n'est pas le seul.

La porte-parole du gouvernement n'est pas en reste. En déplacement à Nantes ce 30 janvier pour évoquer l'intégration des réfugiés, Sibeth Ndiaye, pourtant entourée d'un cordon de forces de l'ordre, a été copieusement huée.

Griveaux et ses soutiens pris pour cible 

Le même sort a en outre été réservé aux ministres du gouvernement et à d'autres élus associés au parti présidentiel ces dernières semaines. Les candidats marcheurs ou proches de LREM aux municipales ont particulièrement fait les frais de ce climat de mécontentement ambiant.

Ainsi, le lancement de campagne pour l'élection municipale à Paris du candidat LREM Benjamin Griveaux a été perturbé par la venue des Gilets jaunes le 27 janvier, tenus à l'écart.

Cette même opération n'était pas sans rappeler l'accueil réservé à Marlène Schiappa le 16 janvier dans le XIVe arrondissement de Paris, où la secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes se présente pour les mêmes élections en soutien au même Benjamin Griveaux. Mais cette fois, une poignée de manifestants étaient parvenus à perturber la prise de parole de Marlène Schiappa depuis l'intérieur.

La scène la plus spectaculaire reste peut-être encore celle qui s'est déroulée le 28 janvier à la mairie du XXe arrondissement de Paris où le maire local, Frédérique Calandra, ex-socialiste qui a rallié la candidature de Benjamin Griveaux, a vu ses vœux à la mairie perturbés très bruyamment... au point de devoir faire évacuer les mécontents de la salle.

«Paroles paroles»

Autres événements plébiscités des opposants à la majorité : les traditionnels vœux de début d'année. C'est ainsi que, le 28 janvier au ministère des Sports, la célèbre chanson de Dalida, Paroles paroles, s'est invitée sur une enceinte portable pour interrompre le discours de la ministre Roxana Maracineanu. Cette dernière a été forcée de faire un pas de côté, laissant s'exprimer les organisations syndicales.

Les vœux de Frédérique Vidal, ministre de l'Enseignement supérieur, au corps professoral, ont pareillement été plombés le 21 janvier lorsque des manifestants hostiles aux réformes Vidal et Blanquer sont venus perturber l'événement sur l'esplanade du Trocadéro, à Paris (XVIe).

Peut-être plus prudent, le ministre de la Culture, Franck Riester, ne s'est pour sa part pas rendu à ses vœux, le 20 janvier à Paris. Cela a néanmoins provoqué la colère de 250 manifestants présents sur place qui étaient venus protester contre la réforme des retraites et les coupes budgétaires dans la culture.

Les manifestants opposés au programme réformiste de l'actuel gouvernement ont-ils pris au mot le président de la République, qui, à propos de l'affaire Benalla apostrophait ses détracteurs depuis la Maison de l'Amérique latine de Paris le 24 juillet 2018 ?

Emmanuel Macron avait alors déclaré : «On ne peut pas être chef par beau temps. S'ils veulent un responsable, il est devant vous. Qu'ils viennent le chercher. Je réponds au peuple français [...]. C'est moi qui ai fait confiance à Alexandre Benalla. C'est moi qui ai confirmé la sanction.»

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