Eric Morvan, directeur général de la police nationale, annonce son départ à la retraite

Eric Morvan, directeur général de la police nationale, annonce son départ à la retraite© JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN Source: AFP
Eric Morvan lors d'une cérémonie devant la CRS 30, le 10 janvier 2019 à Châtel-Saint-Germain.
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Gilets jaunes, déboulonnage de la préfecture de police de Paris, affaire Benalla ou encore vague de suicides dans la police: Eric Morvan a traversé de nombreuses crises. A 62 ans, il annonce son départ dans une lettre de vœux à ses confrères préfets.

Selon une information du journaliste Aziz Zemmouri, du magazine Le Point, confirmée par l'AFP, le directeur général de la police nationale, Eric Morvan, a annoncé le 7 janvier son départ lors de ses vœux de nouvelle année à ses confrères préfets. A 62 ans, il entend faire valoir ses droits à la retraite de manière anticipée (au lieu d'un départ à 65 ans comme les autres hauts fonctionnaires) après plus de deux années à ce poste très exposé. Selon Le Point, la rumeur concernant son départ circulait déjà depuis l'été 2019. Il avait auparavant occupé le poste de directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur de François Hollande, Bernard Cazeneuve, notamment pendant les attentats de 2015.

Selon le journaliste de l'hebdomadaire, Eric Morvan avait déjà été décrit comme «exténué» par les différentes crises qui ont traversé la maison police depuis le début du mandat d'Emmanuel Macron : l'affaire Benalla, les très nombreux suicides au sein des forces de l'ordre et particulièrement dans la police nationale, qui a perdu plus d'une centaine d'agents de cette manière depuis sa prise de fonction en août 2017 (dont 59 en 2019), et bien entendu la crise des Gilets jaunes qui a entraîné la chute des têtes pensantes de la préfecture de police de Paris en mars 2019. Eric Morvan n'était pas particulièrement connu pour être enclin au dialogue avec ses contradicteurs au sein des associations de policiers en colère et de certains syndicats minoritaires, comme ViGi et France Police, préférant la négociation avec les organisations syndicales majoritaires du secteur à l'instar d'Unité-SGP, Alliance et Unsa-Police.

Dans un courrier de vœux adressé à ses pairs, préfets, que l'AFP a pu consulter, Eric Morvan souhaite «à [son] successeur/[sa] "successeure" toute l'énergie nécessaire pour conduire "le grand paquebot" qui a mobilisé tout [son] engagement au cours des 31 derniers mois» et précise : «Je souhaite surtout à tous les policiers de ne pas céder aux sirènes du découragement face à l'adversité plurielle mais au contraire d'affirmer leur fierté d'appartenir à une très belle institution, quelles que soient les difficultés.»

C'est un signal catastrophique pour cette institution qui aurait besoin de stabilité et de solidité, les rats quittent le navire !

Contacté par RT France, le secrétaire général de ViGi, Alexandre Langlois, a salué «une première victoire, en attendant que la justice le condamne pour ses méfaits». En effet, le syndicat est à l'origine d'une plainte au pénal déposée en septembre 2019 contre Eric Morvan pour les 110 suicides survenus au sein de la police nationale pendant son exercice, à l'image de ce qui s'est passé chez France Télécom : «Il part à la retraite de façon anticipée, bon débarras. Mais notons qu'il s'agit de quelqu'un qui a participé à la réforme des retraites dans la police nationale et qui part en avance... pendant que nos collègues de terrain partiront plus tard, donc "faites ce que je dis pas ce que je fais", encore une fois !»

Le policier militant fulmine encore : «On nous dit qu'il est épuisé, certes : avec 110 suicides au compteur depuis sa prise de fonctions, on le comprend, mais nous n'en avons pas fini avec lui et espérons que maintenant qu'il ne sera plus en fonction, la procédure judiciaire va s'accélérer. Je rappelle qu'avec 35 tentatives de suicide et 19 morts, chez France Télécom, la direction a sauté et il y a eu des suites judiciaires.»

«Peut-être qu'il ne veut pas servir de fusible au regard de l'Histoire ?»

Interrogé par RT France, le porte-parole de l'Union des policiers nationaux indépendants (UPNI) défendant les intérêts des policiers de terrain, Jean-Pierre Colombies, fait part quant à lui de son désarroi : «Il annonce son départ à la veille d'une énorme mobilisation sociale qui va mobiliser de nombreux collègues pour le maintien de l'ordre, il n'aurait pas pu attendre une semaine ? C'est un signal catastrophique pour cette institution qui aurait besoin de stabilité et de solidité, les rats quittent le navire ! De Gérard Collomb [ancien ministre de l'Intérieur qui a démissionné au moment de l'affaire Benalla] à Eric Morvan, tout le monde part, on dirait... Il n'est pas idiot, il doit bien sentir que la réforme des retraites va impacter frontalement la maison police dont la base en a assez de servir de variable d'ajustement social face à une population en crise.»

L'ancien commandant de police et ancien syndicaliste appelle aussi les partenaires sociaux du secteur à réagir : «Il serait temps que les grandes organisations syndicales interpellent directement le gouvernement, sans quoi ils vont définitivement acter le divorce avec leur base, parce que les policiers de terrain ne sont pas forcément d'accord avec les déclarations triomphantes de leurs représentants syndicaux majoritaires, ce n'est pas la symbiose, loin de là ! Si ces organisations majoritaires veulent sortir la tête du sable, elles auront l'air moins amorphe. Ce serait le moment de dire : "La direction se tire alors que les policiers du maintien de l'ordre seront encore en première ligne jeudi !" On dirait le Costa Concordia, cette institution, ce n'est plus possible. Les grands chefs montent dans les canots de sauvetage et laissent les soutiers gérer la catastrophe. Ce n'est pas courageux et c'est symptomatique d'un état d'esprit général. Toutes les franges de la population sont opposées à cette réforme mal ficelée, alors peut-être que Morvan l'a compris et ne veut pas servir de fusible au regard de l'Histoire ?»

Selon les informations du Point, Eric Morvan va «mettre à profit sa retraite pour s'occuper de sa famille et vivre pleinement sa passion pour le bateau» et ne donne qu'une piste permettant éventuellement d'imaginer un successeur à ce DGPN, qui avait conseillé aux policiers d'organiser des barbecues pour améliorer la convivialité dans les commissariats contre le phénomène du suicide : «Le candidat doit également être adoubé par Patrick Strzoda, le directeur de cabinet du président de la République, qui avait convaincu Emmanuel Macron de nommer Didier Lallement préfet de police à Paris.» Le candidat devra-t-il donc être à 100% compatible avec les vues de l'actuel chef de l'Etat sur l'ordre et la sécurité publique ? A suivre...

Antoine Boitel

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