Pénuries de médicaments : le gouvernement se décide à agir en sanctionnant les laboratoires
- Avec AFP
Lors d'un point presse, le Premier ministre et le ministre de la Santé ont annoncé une série de mesures pour tenter de mettre fin à la pénurie de médicaments qui frappe la France depuis plusieurs années. Des sanctions pécuniaires sont prévues.
Après des difficultés d'approvisionnement de médicaments ces dernières années, le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé le 19 septembre le «renforcement d'un certain nombre de sanctions» qui pourront aller jusqu'à un million d'euros contre les laboratoires qui n'anticipent pas assez les pénuries. Ces sanctions seront introduites dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2020.
En l'espèce, des pénuries ont particulièrement observées pour un traitement contre la progression de la maladie de Parkinson en 2018, le Sinemet, mais également certains types de traitement par cortisone utilisés pour traiter les rhumatismes, les scléroses en plaque ou certains cancers. C'est aussi le cas de médicaments contre la tension et de certains vaccins comme le BCG (contre la tuberculose) et le DT Vax (diphtérie, tétanos).
Le chef du gouvernement a donc fait savoir lors d'une conférence de presse que le renforcement des sanctions interviendrait «lorsque l'information de l'agence nationale n'est pas suffisante, lorsqu'elle est trop tardive ou lorsque la constitution de stocks n'est pas à la hauteur de l'exigence et de l'intérêt que nous décelons».
Edouard Philippe a également souligné «la nécessité d'avoir un comportement exemplaire», évoquant un «sujet difficile et qui suscite des inquiétudes du côté des Français», après avoir reçu à Matignon une délégation d'entreprises du secteur du médicament (Leem). Le ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, a pour sa part détaillé les trois cas pour lesquels des sanctions seront prévues et qui figureront dans le PLFSS 2020. Les industriels devront désormais «augmenter la durée des stocks disponibles sur le territoire national pour pallier d'éventuelles pénuries», s'il s'agit de «médicaments d'intérêt thérapeutique majeur ou qui n'ont pas d'alternative». Pour ces médicaments, «deux à quatre mois de stock de sécurité obligatoire» seront requis, a détaillé Edouard Philippe sur Twitter.
Nous bénéficions déjà d'un arsenal très complet. Je ne suis pas sûr que de nouvelles sanctions amélioreraient la situation.
Matignon a ensuite précisé qu'en cas de rupture, l'entreprise pourra se voir appliquer une sanction pour chaque jour de rupture pouvant aller jusqu'à un maximum de 30% du chiffre d'affaires journalier moyen réalisé en France, dans la limite de 10% du chiffre d'affaires annuel ou un million d'euros.
Réagissant à l'annonce de ce plan, Frédéric Collet, le président du Leem, a souligné auprès de l'AFP qu'il y avait déjà des sanctions prévues : «La France fait partie des pays dont le cadre réglementaire autour de la disponibilité des médicaments est le plus large. Nous bénéficions déjà d'un arsenal très complet. Je ne suis pas sûr que de nouvelles sanctions amélioreraient la situation. [...] Lorsque l'on parle de sanctions supplémentaires, il faut comprendre de quoi il s'agit et surtout comprendre si elles viennent contribuer à résoudre une situation ou au contraire potentiellement à la rendre plus complexe.»
Agnès Buzyn avait déjà dévoilé une «feuille de route provisoire» qui prévoyait notamment la généralisation en 2020 d'une plateforme permettant entres autres aux pharmaciens de signaler les ruptures d'approvisionnement au laboratoire concerné.
Les tensions d'approvisionnement des médicaments se sont amplifiées ces dernières années, en raison de multiples facteurs: hausse de la demande mondiale, prix de vente de certains traitements jugés peu attrayants par les laboratoires ou les intermédiaires mais aussi politique de flux tendu visant à limiter les stocks, forte concentration des sites de production, parfois situés à grande distance, en Inde ou en Chine. Un quart des Français s'est déjà vu refuser la délivrance d'un médicament ou d'un vaccin pour cause de pénurie, selon une enquête publiée en janvier à l'initiative de France Assos Santé.
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