Le procureur de Paris s'alarme du «microfinancement» de Daesh et botte en touche sur Lafarge
Lors d'une conférence, François Molins a déclaré que 416 donateurs de Daesh avaient été identifiés en France. Selon lui, le groupe aurait été financé par «des sommes modiques mais en nombre important» en provenance de France.
Depuis le 26 avril au matin, près de 500 experts et 80 ministres de 72 pays se sont réunis à huis clos à Paris, afin d'échanger leurs expériences et leurs «bonnes pratiques» en matière de lutte contre le financement du terrorisme, dans le cadre de la conférence «No money for terror». En ligne de mire : les groupes terroristes djihadistes Daesh et Al-Qaïda.
Interrogé sur France Info, le procureur de Paris François Molins a révélé le 27 avril qu'un total de 416 donateurs ayant participé au financement du groupe Daesh avaient été identifiés en France. Il s'est alarmé d'un «microfinancement» du terrorisme alimenté par des sommes «modiques mais en nombre important».
Interrogé sur Lafarge, Molins botte en touche
En revanche, interrogé sur le scandale du financement indirect de Daesh en Syrie par le cimentier Lafarge et qui pourrait impliquer l'Etat français selon de récentes révélations, le procureur n'a pas voulu s'exprimer, affirmant qu'il s'agissait d'«une affaire en cours». Il a toutefois reconnu qu'elle démontrait «effectivement que les moyens de financement du terrorisme sont pluriels».
Sur le coût des attaques djihadistes de 2015 en France, le magistrat a estimé que les terroristes avaient eu besoin de 25 000 euros pour organiser les attentats de janvier 2015 (contre Charlie Hebdo et le supermarché Hyper Cacher) et 80 000 pour ceux du 13 novembre à Paris et Saint-Denis.
Financement du terrorisme : en France, 416 donateurs ont été identifiés ces deux dernières années, "grâce à qui les jihadistes en Irak ou en Syrie pouvaient recevoir des fonds", explique François Molins, procureur de la République de Paris. pic.twitter.com/KeEEVvQOlp
— franceinfo (@franceinfo) 26 avril 2018
C'est notamment face à ce «terrorisme low cost», qui mobilise des sommes d'argent limitées, difficiles voire impossibles à tracer et repérer à l'avance, que sont confrontés les enquêteurs et services antiterroristes du monde entier depuis plusieurs années.
Dans les colonnes du journal Le Parisien, François Molins a détaillé les moyens utilisés pour financer Daesh sur leurs théâtres d'opération, notamment au Moyen-Orient : «D'abord la zakat, la charité : on envoie de l'argent à des associations à but humanitaire ou directement à des membres de sa famille qui sont sur place [...] Ensuite, il y a la ghanima, le butin de guerre, c'est-à-dire le financement par des actes délictueux.»
Plusieurs dossiers, dans lesquels des parents sont soupçonnés d'avoir envoyé de l'argent à leur enfant parti combattre aux côtés de groupes djihadistes, sont entre les mains de la justice, et des condamnations pour de tels faits ont déjà été prononcées.
Les failles du système de mandat cash, qui permet de transférer très rapidement de l'argent à un tiers, ont aussi été utilisées pour financer les djihadistes partis combattre en zone irako-syrienne. Soupçonnée d'avoir manqué de vigilance en la matière, La Banque postale est visée depuis septembre par une enquête préliminaire du parquet de Paris.