Olivier Faure va-t-il relancer la machine socialiste ? L'objectif est de taille pour celui qui va devenir le nouveau premier secrétaire du Parti socialiste. Arrivé en tête des voix en recueillant plus de 48% des suffrages des militants, Olivier Faure sera officiellement investi lors du Congrès d'Aubervilliers les 7 et 8 avril. Il aura pour tâche de faire refleurir une rose largement fanée après la débâcle de la présidentielle et des législatives.
Evitant soigneusement de tacler le quinquennat de François Hollande, Olivier Faure est probablement son digne héritier en termes de stratégie politique. Entre ses différentes prises de position en tant que député, que ce soit sous le quinquennat précédent ou actuel, ou comme candidat lors de la campagne pour prendre la tête du PS, Olivier Faure symbolise le consensus, la recherche permanente d'entente.
L'échec de François Hollande entre 2012 et 2017 ? Olivier Faure assure qu'il ne faut pas «agonir le quinquennat». On ne lui connaît d'ailleurs qu'un seul désaccord frontal avec la politique de l'ex-président : son opposition au projet (avorté) de la déchéance de la nationalité, après les attentats de 2015, Olivier Faure se retrouvant alors sur la même position que l'aile gauche du PS.
«Nous avons mis en place beaucoup de choses, mais sans jamais expliquer de quel chemin elles étaient les étapes», avait-il déclaré à Libération en octobre 2017. En clair, la faute reviendrait à une mauvaise pédagogie des mesures prises sous François Hollande, et non à la qualité de celles-ci. En ce sens, en novembre dernier, Olivier Faure avait assuré que les citoyens se rendaient compte, malgré tout, «que même si [le gouvernement socialiste] n'a pas été à la hauteur de tous leurs espoirs, toutes les grandes avancées sont liées de près ou de loin à ce que la gauche a porté». Il élude ainsi toute critique sur les décisions qui ont provoqué l'ire d'une certaine gauche et des syndicats à l'époque... et que lui-même avait d'ailleurs défendu publiquement : CICE, pacte de responsabilité, adoption du pacte budgétaire européen (TSCG), loi Macron...
C'est lors des débats houleux sur la loi travail portée par Myriam El Khomri en 2016 qu'Olivier Faure était relativement sorti de l'anonymat auprès du grand public. Dans le contexte tendu suscité par cette réforme qui avait cristallisé toutes les oppositions de la gauche du PS, Olivier Faure n'avait pas fait le choix de l'opposition.
Néanmoins, il s'était montré critique vis-à-vis du mode opératoire choisi par Manuel Valls – le Premier ministre de l'époque avait eu recours au 49.3 pour imposer le texte.
En somme, Olivier Faure fut celui qui chercha désespérément à réconcilier les frondeurs et l'aile social-libérale du PS en proposant une synthèse au gouvernement. Cette tentative se solda par un échec.
La recherche de la paix idéologique permanente
Toujours fidèle à ce positionnement, il avait prôné en juin 2017, en tant que président des députés socialistes à l'Assemblée nationale, l'abstention sur le vote de confiance au gouvernement Edouard Philippe, «pour préserver l'unité» et éviter une (nouvelle) explosion entre ex-frondeurs et sociaux-démocrates. En d'autres termes, une décision dictée par une nécessité davantage politicienne que politique.
Olivier Faure rappelle encore qu'il ne voulait être «ni dans l’obstruction, ni dans une forme d’opposition pavlovienne, ni dans une forme de robotisation de la pensée qui serait celle qui conduirait [le PS] à être, d’ores et déjà, dans une majorité présidentielle». Toutefois, le député a tout de même estimé qu'il se définissait comme un opposant à LREM et à Emmanuel Macron – mais un opposant capable de parfois dire «oui» tout en apportant ses propositions. Ce «oui critique» est-il audible ? A Libération qui lui posait la question, Olivier Faure répond : «L’opposition a plus de force quand elle n’est pas un réflexe ou un automatisme. C’est parce que je sais dire "oui" que mon "non" a du poids», avait-il répondu.
L'irénisme d'Olivier Faure a certes l'avantage de lisser les divisions actuelles au sein du PS, mais il évite aussi de clarifier la ligne idéologique... et rend toujours plus obscure la position de son parti sur l'échiquier. Le PS est-il plus proche de la macronie ou des Insoumis ? En toute logique, Olivier Faure estime que le débat n'est pas là : «Notre place n’est pas entre ces deux formations ! [...] Je revendique ma volonté de rassembler les socialistes. L’heure est au dépassement des clivages obsolètes.» Il serait donc le Modem du PS, un centriste qui cherche en permanence des alliances entre son aile gauche et droite.
Olivier Faure, figure de la «synthèse molle» ?
Mais avec cette modération presque outrancière, ses opposants comme certains commentateurs politiques reprochent à Olivier Faure d'être finalement le partisan de la «synthèse molle». Notion qu'il réfute le 16 mars lors d'un point presse : «Chacun avait compris que je pouvais être celui qui pouvait faire dialoguer des forces différentes et non pas les tirer vers la synthèse molle [...] Quand sur la déchéance [de nationalité] ou la loi travail j'ai proposé des solutions, c'était une façon de faire en sorte que nous puissions tous ensemble avancer sans nous renier les uns ou les autres», souligne le député de Seine-et-Marne.
Force est de contester que, durant la campagne pour le poste de premier secrétaire du PS, Olivier Faure a en effet réussi à rassembler toutes les mouvances, de Martine Aubry aux sociaux-démocrates.
Cette position centriste et conciliatrice semble rappeler celle de François Hollande lors des primaires pour l'élection présidentielle de 2012. Une habile tactique qui l'avait finalement mené vers la marche présidentielle, tout en lui assurant le soutien des cadres socialistes. Que ce savoir-faire hollandiste se retrouve chez l'élu de Seine-et-Marne n'est pas insensé : de 2000 à 2007, Olivier Faure a tout de même été directeur adjoint de cabinet de François Hollande.
Bastien Gouly
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