Des mal logés, dont les sinistrés de l’assaut de Saint-Denis, squattent un gymnase près de l'Elysée
Une centaine de mal logés, dont les sinistrés de l’assaut antiterroriste de Saint-Denis, occupent un gymnase près de l’Elysée pour envoyer un message clair à Emmanuel Macron : ils veulent un toit. La mairie de Paris n'a pas demandé d'évacuation.
Une centaine de personnes, soit 46 familles, ont pu occuper, grâce à l’association Droit au logement (DAL), un gymnase près de l'Élysée, dès le 22 novembre. Outre le besoin immédiat d'un abri, il s'agit aussi pour les occupants de réclamer un logement. Cinq sinistrés de l'assaut contre le repaire des terroristes de Saint-Denis, opéré à la suite des attentats du 13 novembre 2015, figurent parmi eux. La mairie de Paris n'a pas demandé d'évacuation.
Un gymnase occupé à quelques pas de l'Elysée par le DAL pour que Macron respecte sa promesse de ne plus laisser personne dormir dans la rue pic.twitter.com/dNuvO0yHH7
— Jonathan Moadab (@Jonathan_RTfr) 23 novembre 2017
Le choix des lieux, proches du palais présidentiel, permettent d'interpeller son locataire, Emmanuel Macron, qui avait asséné de belles paroles le 28 juillet 2017 à Orléans. Le président avait en effet déclaré : «Je ne veux plus personne dans les rues d'ici la fin de l'année.»
Rappeler à Monsieur Macron ses promesses, plus personne ne doit dormir dans la rue cet hiver
Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du DAL présent aux côtés des occupants confirme à RT France qu'ils s'adressent aujourd'hui au chef de l'Etat : «On a mené cette action à proximité de l’Elysée pour rappeler à Monsieur Macron ses promesses, plus personne ne doit dormir dans la rue cet hiver.» Il ajoute au sujet des déclarations du président : «Pour l’instant c’est une parole en l'air. Il y a de plus en plus de personnes dans les rues ! Même si l’Etat a augmenté le budget de l‘hébergement, à notre sens il ne l’utilise pas de manière très efficace. Héberger à l'hôtel, ça coûte cher, il faut trouver des modalités moins coûteuses et plus stables.»
46 familles ont trouvé refuge à côté de l'Elysée grâce au DAL. Elles espèrent une solution pour trouver un toit. pic.twitter.com/rAICsGP9Sy
— Jonathan Moadab (@Jonathan_RTfr) 23 novembre 2017
La mairie de Paris aurait pu décider d'expulser les squatteurs. Mais elle a déclaré ne pas avoir «fait de demande d'évacuation» du gymnase, même si cette occupation n'était «ni une solution pour les personnes qui occupent le lieu, ni pour les habitants du VIIIe arrondissement». Ian Brossat, adjoint à la maire de Paris chargé du logement, de l'habitat durable et de l'hébergement d'urgence est venu rendre visite aux occupants. «C’est une bonne nouvelle pour nous que la Ville de Paris nous ait laissé passer la nuit ici pour poursuivre notre mouvement», estime Jean-Baptiste Eyraud. La maire du VIIIe, Jeanne d'Hauteserre, s'est aussi rendue sur les lieux le 22 novembre, comme on peut le voir sur ce tweet du DAL.
#OnSMetAuChaud - #GymnaseRoquepine Visite de @jdHAUTESERRE , Maire du 8e arrondissement aux occupants pic.twitter.com/qmXgGAUnwb
— Droit Au Logement (@federationdal) 22 novembre 2017
Elle est où la responsabilité de l’Etat ?
Dans la nuit du 17 au 18 novembre 2015, les mal logés à la suite de l'assaut de Saint-Denis avaient dormi dans des tentes au pied de leur ancien immeuble. D'autres protestataires les avaient rejoints et tous ont manifesté le 18 novembre pour qu'ils obtiennent un nouveau logement. Les sinistrés voulaient également être reconnus comme victimes du terrorisme. Jean-Baptiste Eyraud explique à RT France : «A Saint-Denis, cinq personnes sont victimes de l’action antiterroriste en 2015 menée par le Raid, leur immeuble a été évacué, il devenait dangereux. Ces dernières semaines, l’Etat a suspendu l’hébergement pour cinq personnes, c’est la raison pour laquelle on a commencé un campement à Saint-Denis.»
Mohamed, 30 ans, vivait dans l'immeuble de Saint-Denis depuis six ans au moment de l'assaut de Saint-Denis. Cet occupant du gymnase, raconte son parcours à RT France : «J'étais juste en dessous de l’assaut à 4h20 du matin, ça s’est effondré chez moi. On a vécu dans un gymnase pendant huit jours, puis à l'hôtel Campanile. On nous a promis que 3 ou 4 mois plus tard, on serait chez nous mais on est resté plus d’un an dans l’hotel. On nous a promis qu’on aurait nos papiers, mais ni moi ni mon petit frère ne sommes régularisés.» Mohamed explique que les services auxquels ils s'adressent sont toujours débordés ou disent qu'ils ne s'occupent pas des autorisations. «Nous on n’a rien demandé, on est sorti de chez nous. Si on dort à la rue, on ne peut pas aller travailler, alors on perd tout. Il ne se passe jamais rien, elle est où la responsabilité de l’Etat ? Où sont les gens avec lesquels parler ? Ils nous donnent que des promesses», dénonce-t-il.
Le 18 novembre 2015, cinq jours après les attentats qui avaient fait 130 morts, les troupes d'élite du Raid avaient donné l'assaut dans l'immeuble de la rue du Corbillon au centre de Saint-Denis, où vivait Mohamed. Abdelhamid Abaaoud, coordinateur des attentats, et son complice Chakib Akrouh s'étaient retranchés dans un appartement du troisième étage. L'assaut, mené dans l'urgence, a conduit à un siège de plusieurs heures d'une grande violence, à quelques mètres de voisins terrés chez eux ou évacués à la hâte. L'immeuble a été décrété par la suite inhabitable.
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