Hollande : «Pour la droite, l'identité est défensive, pour la gauche, elle doit être positive»
Alors que sa candidature se précise, le président détaille sa pensée politique. Dans un entretien à la revue le Débat, dont Le Monde publie des extraits, le président sortant défend son bilan et tente de donner un sens nouveau au terme de «gauche».
François Hollande semble préparer le terrain de sa candidature, après les fâcheux contre-temps Emmanuel Macron et Arnaud Montebourg. Et un candidat doit avoir une doctrine, une stature idéologique. Aussi le président de la République s'est-il prêté à un entretien à la revue bimestrielle Le Débat, vendue 20 euros. Le Monde en a publié de larges extraits, afin que la confidentielle revue trouve un écho plus large.
«Tout l'enjeu est de savoir si la gauche [...] a un avenir dans le monde»
«Je suis socialiste mais je ne suis pas dans la socialisation des moyens de production», répond-il ainsi à ses intervieweurs, en l'espèce, l'historien Pierre Nora, et le philosophe Marcel Gauchet, fondateurs de la revue bimestrielle éditée par Gallimard. «Je ne l'ai jamais été», poursuit le président. Précisons : pour la socialisation des moyens de productions.
Donc, bien que se réclamant de Léon Blum et invoquant les combats ouvriers du XIXe siècle, François Hollande précise qu'il est pour un socialisme, donc non marxiste, dont il ne subsiste qu'une idée assez indéfinissable de «justice» : «Je poursuis cette idée de justice tout en assurant le destin d'une nation, pas n'importe laquelle, la France, dans le monde».
Un peu plus loin, François Hollande tente de préciser sa pensée : «Le socialisme est une idée qui a la vie dure. La question est de savoir ce que l'on met derrière ce mot».
«La gauche est toujours belle dans l'opposition»
Non pas que le président souhaite retourner dans l'opposition, mais selon lui, la gauche devient suspecte dès qu'elle accède aux responsabilités, un fardeau qui s'explique par la destinée : «Son destin est de toujours être accusé[e] de trahison.»
Voici "la France fraternelle" que "porte" François Hollande selon ses mots dans une interview parue aujourd'hui ! pic.twitter.com/DO0H47o22V
— Eric Ciotti (@ECiotti) 15 septembre 2016
«Il n'y a pas d'exemple d'une gauche au pouvoir qui n'ait été sous la pression des procureurs de l'alternative», déplore-t-il. Pierre Nora et Marcel Gauchet n'ont pas demandé à François Hollande, ce qu'il en était des «procureurs» de la droite lorsqu'elle est au pouvoir. Les députés de gauche quand la droite est aux affaires ?
Il faut «montrer que la France, c'est une idée»
Ce qui fédère toutes les extrêmes droites européennes, analyse le chef de l'Etat français, «et même au-delà», c'est le rejet «d'une religion qui voudrait imposer ses règles, ses façons de s'habiller ou de se nourrir. C'est en ce sens que les populistes sont dans une dynamique en Europe et aux Etats-Unis», analyse François Hollande. Il affirme par-là que la France ne se définit pas par sa population, mais parce qu'elle est une «idée» qui permet de rassembler des «citoyens venant d'origines multiples». Et le président de constater : «Pour la droite, l'identité est défensive. Pour la gauche elle doit être positive.»
«Mieux vaut supprimer l'élection du président au suffrage universel»
François Hollande maintient la formule du «président normal» inventée lors de la campagne présidentielle pour fustiger un Nicolas Sarkozy «hyper-président». Pourquoi ? A cause de la nécessité «d'un président maîtrisé parce que la fonction est exceptionnelle», explique Hollande, «les caractéristiques personnelles sont très importantes». Et, lorsque le peuple élit le président de la République, il choisit une orientation, une politique, mais, aussi, un caractère, une conception de l'Etat, une vision de la République, une vision de la France, détaille-t-il. «Sinon, mieux vaut supprimer l'élection du président au suffrage universel», conclut François Hollande. Doit-on en conclure qu'on garderait un président non élu ?