Loi narcotrafic : un texte amputé qui cristallise les tensions à l’Assemblée

Loi narcotrafic : un texte amputé qui cristallise les tensions à l’Assemblée© Compte X @GDarmanin
Gérald Darmanin à la prison de Vendin-le-Vieil, dans le Pas-de-Calais le 7 mars 2025.
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La proposition de loi contre le narcotrafic, vidée de mesures phares en commission, arrive ce 17 mars à l’Assemblée. Entre contestations de la gauche et sursaut répressif du gouvernement, les débats s’annoncent électriques.

Lundi 17 mars, l’Assemblée nationale entame l’examen d’une proposition de loi «visant à sortir la France du piège du narcotrafic», portée initialement par les sénateurs Étienne Blanc des Républicains (LR) et Jérôme Durain du Parti socialiste (PS). Adopté à l’unanimité au Sénat le 4 février, le texte, destiné à muscler la lutte contre un fléau en pleine explosion, avec 53,5 tonnes de cocaïne saisies en 2024, soit +130 % en un an, débarque dans l’Hémicycle dans une version amputée et sous haute tension. Les débats, prévus toute la semaine, promettent de raviver les fractures politiques.

En commission des lois, le texte a été sérieusement raboté. Parmi les mesures retoquées : l’accès aux messageries cryptées (WhatsApp, Signal) par les enquêteurs, jugé trop intrusif, ou le «dossier coffre», qui aurait permis de soustraire certaines techniques d’enquête (infiltrations, écoutes) aux avocats de la défense. Supprimée aussi au nom de la présomption d’innocence, l’«injonction pour richesse inexpliquée» qui obligeait les suspects et leurs proches à justifier leur train de vie.

 

Un test pour les ministres Darmanin et Retailleau

 

Le gouvernement, emmené par le ministre de la Justice Gérald Darmanin et son homologue à l’Intérieur Bruno Retailleau, entend réintroduire les éléments supprimés en commission. Gérald Darmanin, fort d’un aval du Conseil d’État, veut ainsi passer par des amendements, dont la création de prisons de haute sécurité pour 200 narcotrafiquants jugés dangereux, avec isolement strict et fouilles systématiques.

Sur le plateau de RMC, le garde des Sceaux a déclaré le 17 mars : «La drogue tue plus, en règlement de comptes, que le terrorisme, chaque année en France ! Si le narcobanditisme est un danger pour la nation alors on doit se doter des mêmes moyens que pour la lutte contre le terrorisme !».

Bruno Retailleau, lui, défend le «dossier coffre» comme «essentiel» pour protéger les sources. «Quand la loi est faible, il faut la changer», martèle-t-il, voyant dans le narcotrafic une «menace existentielle».

 

Des détracteurs inquiets de la méthode du gouvernement 

La gauche, remontée contre le texte, s’est montrée active en commission en supprimant nombre des mesures voulues par le gouvernement. Sur le plateau de France 2, le député du Nouveau Front Populaire (NFP) a ainsi appelé à s’en prendre aux «gros bonnets au porte-monnaie» et a dénoncé «les coups de com de Darmanin et Retailleau, avec des amendements improvisés».

Des critiques ont aussi vu le jour dans le gouvernement : la secrétaire d'État chargée du Numérique, Clara Chappaz, s’est opposée à l'obligation pour les messageries chiffrées de permettre aux enquêteurs d'accéder aux échanges. La députée Renaissance Eléonore Caroit a de son coté mis en garde dans le journal L’Opinion : «Il faut agir, mais pas au détriment de notre État de droit». 

Les débats s’annoncent donc houleux à l’Assemblée nationale. Le texte qui doit être voté le 25 avril, s’il contient les dispositions mises en cause par ses détracteurs, pourrait être présenté devant le Conseil constitutionnel.

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