L'ex-garde des Sceaux Michel Mercier condamné à 3 ans de prison avec sursis pour emplois fictifs
- Avec AFP
Des faits «d'une gravité certaine» : l'ancien garde des Sceaux Michel Mercier a été condamné à trois ans de prison avec sursis pour avoir octroyé des emplois parlementaires fictifs à son épouse et une de ses filles entre 2005 et 2014.
L'ancien ministre de Nicolas Sarkozy (2010-2012), âgé de 75 ans, s'est rendu coupable de détournement de fonds publics pour avoir versé, dans le cadre de ses fonctions de sénateur, 50 000 euros de salaire à son épouse Joëlle entre 2005 et 2009, et plus de 37 000 euros à sa fille Delphine de 2012 à 2014.
Jugeant que les faits étaient «d'une gravité certaine» et que Michel Mercier avait fait «prévaloir son intérêt personnel sur l'intérêt commun», le tribunal correctionnel l'a également condamné à 50 000 euros d'amende, cinq ans d'inéligibilité et trois ans d'interdiction d'exercer toute fonction publique.
«Volonté de dissimuler permanente et déterminante»
Dans le délibéré, les juges ont estimé que la «volonté de dissimuler» de Michel Mercier avait été «permanente et déterminante» et regretté «l'absence affichée de remise en question» de la part de l'ancien ministre et sénateur centriste.
L'ex-ministre a également été reconnu coupable de détournement de fonds publics par négligence pour avoir continué à payer un assistant parlementaire qui ne travaillait plus pour lui.
Il était enfin jugé pour prise illégale d'intérêts, mais les faits qui lui étaient reprochés à ce titre ont été déclarés prescrits par le tribunal.
Reconnues coupables de complicité et de recel, son épouse Joëlle et sa fille Delphine ont été condamnées respectivement à 18 mois de prison avec sursis et 40 000 euros d'amende pour la première, et à 12 mois avec sursis et 10 000 euros d'amende pour la seconde.
L'avocat de Michel Mercier n'a pas souhaité faire de commentaire. Dénonçant «les contradictions et le flou artistique le plus total» de l'homme politique tout en lui reprochant d'opter «pour l'esquive et les réponses à contre-courant», le parquet avait requis contre lui quatre ans d'emprisonnement, dont un ferme, dix ans d'inéligibilité et une interdiction de toute fonction publique pendant cinq ans.
Michel Mercier dénonce les «Parisiens» du PNF
Lors du procès, l'ancien ministre avait nié toute volonté de mal faire et mis en avant son statut d'élu rural, plaidant le bon sens paysan face aux «Parisiens» du parquet national financier (PNF).
Justifiant l'emploi de sa fille de 2012 à 2014, alors qu'elle vivait à Londres et n'a jamais mis les pieds au Sénat, il avait affirmé qu'elle lui servait de «conseillère culturelle». Delphine Mercier n'a toutefois pas gardé de trace de ses travaux, qu'elle dit avoir jetés «lors d'un déménagement».
Dans son délibéré, le tribunal a estimé que «ces déclarations étaient dénuées de tout vraisemblance».
Son épouse, de son côté, avait tenté de justifier son emploi d'assistante parlementaire de 2005 à 2009 en expliquant qu'elle représentait son mari à des kermesses ou des enterrements et l'assistait dans des missions de secrétariat.
Des explications partiellement entendues par le tribunal, qui a toutefois évalué son travail à 17 heures par semaine, soit moins de 50% du temps de travail prévu par son contrat. Conséquence : alors que le préjudice estimé était de 84 000 euros, il a été ramené à 50 000 euros par le tribunal.
Jusqu'en 2013, Joëlle Mercier a également organisé aux frais du Conseil général du Rhône des «événements culturels» à destination d'épouses de notables rhodaniens, qui valaient à Michel Mercier l'accusation de prise illégale d'intérêts.
L'enquête du PNF n'ayant été ouverte qu'en 2017, et la prescription pour ces faits étant de trois ans, l'ancien sénateur a échappé à ces poursuites.
Les faits jugés s'étalent sur une période où les emplois parlementaires familiaux n'étaient pas encore interdits. Ils le sont depuis l'été 2017 après la retentissante affaire Fillon.
L'ancien ministre et sénateur reste mis en cause dans un autre dossier d'emplois fictifs. Depuis 2019, il est mis en examen dans l'affaire des assistants d'eurodéputés du MoDem aux côtés d'autres cadres du parti centriste, dont son président François Bayrou.