Juncker pointe une part de responsabilité allemande dans la faible intégration de l’Union monétaire
A quatre mois de son départ, le président de la Commission européenne est interviewé sur son mandat. Il constate une faible solidarité entre les économies européennes, responsable selon lui de la lenteur de la réforme de la zone euro.
«L’approfondissement de l’union monétaire ne progresse pas car les Pays-Bas, l’Autriche et, trop souvent, l’Allemagne se mettent en travers de la route qui mène vers la solidarité et la responsabilité partagée», déclare sans ambages Jean-Claude Juncker dans une interview publiée le 2 mai par le quotidien allemand Handelsblatt.
A propos de l'Autriche, le président de la Commission européenne a sûrement ses raisons de passer sous silence les avancées réalisées lors de sa présidence tournante de l'Union (de juin à décembre 2018). Il est vrai que l'accord intervenu le 4 décembre sur les mesures législatives visant à réduire les risques dans le secteur bancaire de l'UE sont timides et se limitent largement à de nouveaux critères de ratios de créances sur fonds propres.
Dans le cas des Pays-Bas, sa remarque fait en revanche écho aux propos tenus par l’ancien président de l’Eurogroupe (de 2013 à 2018), le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem qui avait déclaré le 20 mars dans le quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung : «Durant la crise de l’euro, les pays du nord ont fait montre de solidarité avec les pays touchés par la crise. En tant que social-démocrate, j’accorde une importance exceptionnelle à la solidarité. Mais on a aussi des obligations. Je ne peux pas dépenser tout mon argent en schnaps et en femmes et ensuite vous demander de l’aide.»
L'Europe du Nord hostile à la garantie des dépôts dans la zone euro
A l’époque, cette déclaration avait choqué, mais les questions des journalistes du Handelsblatt montrent que cette vision d’une Europe divisée entre rigueur budgétaire nordique et laisser-aller méridional est largement partagée en Allemagne. Ainsi quand le président de la Commission européenne défend l’idée «d'inclure des éléments supplémentaires dans la construction de l'union monétaire, par exemple, l'assurance-dépôts [garantie qu’en cas de faillite d’une banque de la zone euro, ses clients ne perdront pas les sommes déposées sur leur compte ouvert auprès de cette banque]», les journalistes, plutôt censés l’interroger, lui répondent sèchement : «Les Allemands n'ont aucune envie de payer pour les pertes des banques italiennes.»
«La zone euro est un échec», constate un économiste de la banque Natixis
— RT France (@RTenfrancais) 6 septembre 2018
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A propos de la réforme de l’euro, Jean-Claude Juncker revient aussi sur les euro-obligations, ces titres de dette émis non pas au nom d’un seul Etat membre, mais de l’ensemble de l’union monétaire. Ce produit financier permettrait à la devise européenne de réduire la toute-puissance du dollar dans les échanges internationaux. Et l’ancien Premier ministre du Luxembourg se dit convaincu qu’elles existeront un jour, «mais sous une forme différente et avec un nom différent».
Il rappelle toutefois que quand il a «insisté» sur ce projet en tant que patron de l'Eurogroupe, «le "non" a été la première réponse». Ici Jean-Claude Juncker se garde bien de citer la chancelière allemande Angela Merkel. Or, fin juin 2012, à la veille d’une rencontre avec François Hollande qui venait d’être élu président de la République française, elle avait déclaré devant le Bundestag, que tant qu’elle vivrait il n’y en aurait pas, jugeant en outre que les euro-obligations étaient «contraires à la Constitution allemande» et «économiquement erronées».
Pas rancunier contre la première économie de l’Union européenne qui s’est objectivement opposée à une plus grande intégration monétaire, Jean-Claude Juncker a malgré tout, en termes prudents, évoqué le nom de Jens Weidman, président de la Bundesbank pour la succession, en novembre, de Mario Draghi, actuel président de la Banque centrale européenne.
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