Boeing plus vulnérable qu’Airbus face à la guerre commerciale de Donald Trump

L’aviation paie le prix fort dans la guerre commerciale lancée par Donald Trump. Si Airbus est en première ligne, le constructeur américain Boeing, déjà fragilisé, semble encore plus menacé par les nouvelles taxes. Des chaînes de production mondialisées aux sous-traitants exposés, les conséquences s’annoncent lourdes pour les deux géants.
La guerre commerciale déclenchée par Donald Trump ces dernières semaines cible directement le secteur aéronautique. Les nouvelles taxes douanières américaines sur les produits européens, fixées à 20 %, impactent les échanges transatlantiques, et notamment les activités d’Airbus et Boeing. Si le premier semble logiquement le plus exposé, c’est pourtant Boeing qui pourrait subir les plus lourdes pertes.
Airbus est effectivement visé. Le constructeur européen exporte pour 9 milliards d’euros d’aéronefs vers les États-Unis, ce qui représente 20 % des exportations françaises vers ce pays. Son directeur général, Guillaume Faury, reconnaît un contexte difficile : «Il faut que l’on arrive à terme à ce que les barrières douanières soient de nouveau abaissées, parce qu’elles sont assez dévastatrices ». Pourtant, Airbus possède des atouts pour amortir le choc : une forte demande internationale, des usines hors d’Europe, et notamment un site d’assemblage à Mobile, en Alabama, inauguré en 2015. Selon L’Usine Nouvelle, ce site pourrait bientôt produire un cinquième des A320, permettant à Airbus d’éviter certains droits de douane.
En revanche, les composants importés depuis l’Europe restent taxés, même pour les avions assemblés aux États-Unis. Selon une étude de Goldman Sachs citée par Libération, chaque A320 construit à Mobile subirait un surcoût de 5 à 6 millions de dollars. D’autres pièces, comme les moteurs Leap fabriqués en partie par Safran en France, alourdissent également la facture.
Boeing, le grand perdant
Mais si Airbus souffre, Boeing apparaît comme le plus vulnérable. Le Figaro rappelle qu’en 2024, l’avionneur américain a enregistré une perte nette de 12 milliards de dollars, contre un bénéfice de 4,2 milliards d’euros pour Airbus. Déjà touché par des problèmes de production et des scandales techniques, Boeing dépend fortement de composants venus d’Europe, du Japon, du Royaume-Uni ou encore du Canada. Le 787, par exemple, est externalisé à 60 % en valeur hors des États-Unis, selon Rémy Bonnery, expert cité par L’Usine Nouvelle. Le surcoût dû aux taxes pour ce modèle est estimé à 30 millions de dollars par appareil.
De plus, les taxes américaines pourraient déclencher des mesures de rétorsion, notamment de la part de la Chine. Or, cette dernière a déjà imposé des droits de douane de 34 % sur les produits américains. Le Figaro souligne que cela pourrait compromettre les récentes commandes chinoises de Boeing, qui représentent une part importante de son carnet de commandes futur. Pendant ce temps, Airbus, grâce à ses implantations aux États-Unis et en Chine, reste plus agile et moins exposé à ces ripostes.
Chaînes mondiales perturbées
L’aéronautique est un secteur profondément mondialisé. Un Boeing 787 intègre des pièces issues de huit pays différents. Toute perturbation douanière désorganise donc l’ensemble de la chaîne industrielle. Jean-Claude Maillard, PDG de Figeac Aéro, déclare : « Cela pénalisera donc le prix payé par les clients », en évoquant les nouvelles taxes.
Si Airbus demande à Bruxelles des contre-mesures « proportionnées et énergiques », comme le rapporte Libération, l’ensemble du secteur pourrait bientôt chercher à revoir ses chaînes logistiques. Pour l’instant, les compagnies aériennes absorbent encore les hausses de prix, mais à moyen terme, les conséquences risquent d’être répercutées sur le marché, les emplois, et les passagers.