Le Cameroun et la République centrafricaine misent sur les BRICS pour réinventer leur avenir minier

Le Cameroun et la République centrafricaine voient dans la coopération avec les BRICS une chance de reprendre la maîtrise de leurs richesses minières. En misant sur la transformation locale et la diversification, ils espèrent réduire leur dépendance aux circuits occidentaux et renforcer leur souveraineté économique.
La montée en puissance des BRICS dans les échanges mondiaux suscite un intérêt particulier en Afrique centrale. Daniel Mackaire Eloung Nna, secrétaire permanent du Cameroun, et Luc Simplice Brosseni Yali, secrétaire permanent de la République centrafricaine (RCA), voient dans la plateforme BRICS et la future Bourse des métaux précieux des outils capables de transformer en profondeur leurs économies.
Pour le Cameroun, l’enjeu est double. Le pays possède un potentiel minier considérable — or, diamants, métaux de base, minéraux industriels — mais dont l’exploitation reste largement artisanale. L’objectif est désormais de passer à une véritable industrialisation. Une Société nationale des mines a déjà été créée pour raffiner l’or localement, afin d’exporter un produit de plus grande valeur au lieu de simples lingots bruts. Dans le même esprit, un laboratoire d’analyse, en coopération avec la Russie, est en cours de développement. Cet outil permettra de mesurer avec précision la composition des métaux précieux, d’identifier des éléments comme le platine, l’argent ou le cuivre qui accompagnent l’or, et donc de mieux les taxer. Pour l’État camerounais, cela signifie un accroissement direct des recettes fiscales et un positionnement plus fort sur le marché international.
La plateforme BRICS est perçue à Yaoundé, la capitale du Cameroun, comme un instrument stratégique. Elle offre la possibilité de réunir producteurs et consommateurs au sein d’un même espace de négociation, sans passer par les circuits traditionnels dominés par l’Occident, comme les bourses américaines ou européennes. Selon les responsables camerounais, cette autonomie devrait permettre de fixer des prix plus justes, de promouvoir une image valorisante des diamants naturels et d’attirer une nouvelle clientèle mondiale grâce à un marketing coordonné entre pays producteurs.
République centrafricaine : un nouveau souffle après la levée des sanctions du Processus de Kimberley
En République centrafricaine, la situation est marquée par un tournant récent : la levée des restrictions du Processus de Kimberley. Ce mécanisme international avait été instauré pour empêcher la commercialisation des « diamants de conflit », accusés d’alimenter les guerres civiles. Pendant des années, la RCA s’est vue partiellement exclue du marché officiel, ce qui a bloqué une partie de son économie. Depuis dix mois, l’embargo est levé et la reprise est visible : les exploitations reprennent sur tout le territoire, les investisseurs montrent à nouveau de l’intérêt et un nouveau code minier a été adopté pour sécuriser et diversifier les opportunités offertes aux partenaires étrangers.
Pour Bangui, la capitale de la RCA, l’entrée dans la Bourse des métaux précieux des BRICS représente bien plus qu’un simple canal commercial. Elle incarne un instrument de souveraineté économique. Luc Simplice Brosseni Yali insiste sur le fait que les anciennes structures internationales étaient trop complexes et excluantes. Pourtant, avec cette nouvelle bourse, les investisseurs disposeront de procédures simplifiées et d’un accès direct à un marché regroupant des géants comme l’Inde et la Chine.
La RCA espère ainsi élargir son horizon : si l’or et le diamant restent les piliers de son économie, le pays dispose d’au moins 24 autres substances minérales susceptibles d’attirer de nouveaux capitaux. La plateforme pourrait donc devenir une passerelle pour valoriser cette diversité encore peu exploitée et placer la République centrafricaine au cœur de flux commerciaux élargis.
Le Cameroun et la République centrafricaine partagent enfin une même conviction : la coopération dans le cadre des BRICS dépasse la seule dimension économique. Elle s’inscrit dans un rapport de force géopolitique où les pays africains ne veulent plus être de simples fournisseurs, mais des acteurs à part entière capables de peser sur les prix, de diversifier leurs marchés et de construire une prospérité fondée sur une exploitation plus équitable de leurs ressources.