Est de la RDC : «Une femme violée toutes les quatre minutes»

Près de 900 viols ont été recensés dans l’est de la RDC en l’espace de deux semaines, selon les données collectées par les agents humanitaires de l’ONU. Au Burundi voisin, 45 000 réfugiés congolais sont hébergés dans un stade. Les rebelles du M23 tentent d’asseoir leur pouvoir dans les villes conquises.
Alors que la rébellion du M23, soutenue par le Rwanda, poursuit sa percée militaire lancée en début d’année dans le Nord et le Sud-Kivu, l’agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a recensé 895 viols dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) en l’espace de deux semaines, soit une moyenne de 60 par jour. Il s’agit des chiffres collectés durant la première quinzaine de février, selon les données collectées sur place par les agents humanitaires, relayées ce 8 mars par ONU Info.
«Cela correspond à une femme violée toutes les quatre minutes», précise Mady Biaye, le principal représentant en RDC de l’agence des Nations unies pour la santé sexuelle et reproductive (UNFPA), cité par ONU Info. Mady Biaye souligne que les 895 cas recensés récemment concernent uniquement les survivantes ayant bénéficié de soins médicaux dans les 23 sites soutenus par l’UNFPA à Goma, la principale ville du Nord-Kivu tombée, fin janvier, sous le contrôle du M23.
Avant cette offensive d’envergure des M23, les deux provinces étaient déjà en proie à une augmentation alarmante des violences sexuelles. En 2023, 123 000 cas ont ainsi été recensés dans l'ensemble de la RDC, dont plus de 70% à l’est du pays. L’an dernier, le nombre de cas signalés a encore augmenté, pour atteindre plus 130 000 victimes, en grande majorité des femmes et des jeunes filles.
Afflux record de réfugiés vers le Burundi
Pendant ce temps, des milliers de personnes continuent de franchir la frontière du pays avec le Burundi voisin, qui fait face à l’afflux de réfugiés le plus important depuis des décennies, selon le HCR. Depuis le 5 mars, environ 85 000 personnes ont fui l'est de la RDC vers les pays voisins, en raison de la récente escalade des combats dans les deux provinces du Nord et du Sud-Kivu. Avant cette date, près de 63 000 personnes étaient déjà arrivées au Burundi en moins d’un mois, précise l’agence onusienne.
Les autorités burundaises ont mis en place des structures d’accueil et de transit pour enregistrer, héberger et fournir une assistance d’urgence aux personnes qui arrivent. Plus de 45 000 réfugiés sont encore hébergés dans un stade local à Rugombo, à quelques kilomètres de la frontière avec la RDC, en attendant d’être transférés vers des sites pour réfugiés. Le stade a dépassé sa capacité d’accueil et de nombreuses familles sont désormais hébergées dans des champs ouverts, au sein de la communauté ou chez des sympathisants.
Administrations parallèles
Sur le terrain dans l’est de la RDC, les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, tentent de démontrer qu'ils peuvent rétablir l'ordre dans les villes et localités sous leur contrôle, tout en s'efforçant de mettre en place leur propre administration. Cet effort a notamment consisté à recycler des centaines de policiers congolais pour travailler sous l’autorité du M23. La rébellion a déjà mis en place une administration provinciale parallèle à Goma, capitale du Nord-Kivu et à Bukavu, capitale du Sud-Kivu.
Pendant ce temps, les autorités gouvernementales des deux provinces continuent d’administrer à partir d’Uvira et de Beni. Dans le même contexte, le pouvoir central à Kinshasa a nommé le 7 mars un nouveau vice-gouverneur policier de la province du Nord-Kivu. À ce poste, le commissaire divisionnaire Louis Second Karawa Dengamo va succèder au commissaire divisionnaire Romuald Ekuka Lipopo, qui occupait ce poste avant l'occupation de la ville de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, par la rébellion du M23 soutenue par le Rwanda.
La République démocratique du Congo est confrontée depuis plusieurs années à une guerre meurtrière provoquée par la rébellion du M23, particulièrement active dans l’est du pays. Le groupe armé a été créé en 2012 par des officiers qui se sont rebellés contre le gouvernement.