Syrie : Macron rappelle à Erdogan que le cessez-le-feu concerne aussi l'enclave kurde d'Afrin

Emmanuel Macron a demandé à son homologue turc d'appliquer la résolution des Nations unies qui exige un cessez-le-feu sur l'ensemble de la Syrie, et non pas seulement dans la Ghouta. Ce n'est pas la première fois que Paris interpelle Ankara.
La résolution, objet d'âpres négociations mais finalement votée par le Conseil de sécurité des Nations unies avec plusieurs jours de retard le 24 février, appelle «toutes les parties» à cesser les hostilités et concerne l'ensemble du territoire syrien, pas seulement la région de la Ghouta, à l'est de Damas.
C'est ce qu'Emmanuel Macron a cru bon de rappeler au président turc Recep Tayyip Erdogan ce 26 février 2018 lors d'un entretien téléphonique, alors que l'armée turque intervient depuis le 20 janvier dernier dans l'enclave kurde d'Afrin. «La trêve humanitaire s'applique à l'ensemble du territoire syrien, y compris à Afrin et devrait être mise en œuvre partout et par tous sans délai», a déclaré le président français à son homologue turc, d'après l'AFP.
Les trois chefs d'Etat ont «souligné la poursuite des efforts communs dans l'intérêt de mettre en place pleinement et le plus vite possible» la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU sur la trêve d'un mois en #Syrie 🇸🇾https://t.co/EPfqpEjN2q
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Mais la France, même secondée par l'Allemagne, risque d'avoir du mal à faire entendre sa voix, faute de levier militaire vraiment déterminant sur le terrain malgré sa participation à la coalition arabo-occidentale dirigée par les Etats-Unis.
Diplomatie du verbe
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que Paris tente de modérer l'ampleur de l'intervention turque dans le nord de la Syrie, opération destinée à prévenir toute émergence d'une entité kurde aux frontières de la Turquie. «On ne peut pas avoir une sécurité bâtie sur le terrain sans respect de la souveraineté syrienne contre un ennemi [les Kurdes] qui n'est plus Daesh», avait déclaré avec lucidité Emmanuel Macron le 31 janvier dernier, s'inquiétant en outre que l'opération turque contre les Kurdes, pourtant alliés des Etats-Unis, eux-mêmes techniquement alliés d'Ankara au sein de l'OTAN, ne se mue en invasion du nord de la Syrie.
#Syrie / #Ghouta : Tout en reprochant à l'#ONU 🇺🇳 son «incapacité à faire cesser les crimes de guerre» dont ils accusent l'armée syrienne 🇸🇾, les rebelles qualifient également de «crime de guerre» tout «déplacement forcé de la population»https://t.co/27Mqr5byfu
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Le lendemain, la Turquie opposait toutefois une fin de non-recevoir quelque peu cassante. «[La France] n'a pas de leçons à donner», avait alors rétorqué le ministre turc des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu, alors que la conception occidentale de la «souveraineté» syrienne semble entachée d'un deux poids deux mesures selon que l'on parle d'Afrin, d'Idlib ou de la Ghouta.
Dans cette enclave, l'armée régulière syrienne est confrontée à une réactivation de groupes armés islamistes, parmi lesquels Jaïch al-Islam, le Fatah al-Cham (alias Front al-Nosra), Ahrar al-Sham ou encore Faylaq al-Rahmane. Ces rebelles ont catégoriquement rejeté, dans un communiqué adressé à l'ONU le 23 février, toute idée d'évacuation de civils via des couloirs humanitaires, qualifiant une telle opération de mise à l'abri des civils de... «crime de guerre».
Alexandre Keller
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