Le 6 avril, Xenia Fedorova, présidente de RT France et directrice de l'information, a tenu à réagir aux propos de Jean-Yves Le Drian, ministre français des Affaires étrangères, qui accuse le média d'être un «organe de propagande» pour justifier une loi «anti-fake news».
«Nous entendons depuis des mois des accusations infondées contre RT France de la part de Monsieur Macron et de ses équipes. D'abord qualifiés d'usine à ''fake news'' sans la moindre preuve, nous serions désormais, selon Monsieur Le Drian, des "spécialistes en ingénierie de la désinformation"», déplore Xenia Fedorova.
C'est une attaque contre la liberté d'expression et nous sommes tous concernés, médias et citoyens
Sceptique quant à l'absence d'éléments concrets avancés par le gouvernement et Emmanuel Macron pour prouver l'utilité d'une loi «anti-fake news», elle juge que son objectif n'est pas «de protéger la démocratie». «En voulant censurer notre média, parce que notre ligne éditoriale ne convient pas au pouvoir en place, c'est une attaque contre la liberté d'expression et nous sommes tous concernés, médias et citoyens», ajoute-t-elle.
En effet, lors d'une conférence sur les «manipulations de l'information» le 4 avril au Quai d'Orsay, Jean-Yves Le Drian a précisé les contours de la future loi «anti-fake news», voulue par le président Emmanuel Macron. Dénonçant une «ingénierie de la désinformation», Jean-Yves Le Drian a multiplié les allusions à la Russie et ses «organes de propagande», en ciblant Russia Today ou Sputnik.
Une loi «anti-fake news» ou une loi anti-RT ?
Ces deux médias sont dans son viseur. Et s'ils ne produisent pas de fausses nouvelles, Jean-Yves Le Drian juge qu'ils ont des «stratégies plus sophistiquées qui consistent à créer une source d'information qui s'avère fiable dans la quasi-totalité des cas [...] afin de crédibiliser le moment venu une fausse nouvelle».
Le ministre a en outre annoncé la création, au sein du ministère des Affaires étrangères, d'un système de veille et d'alerte afin de «réagir rapidement à une campagne de manipulation de l'information visant nos intérêts à l'étranger». «Ce projet permettra au régulateur de suspendre ou de mettre un terme définitif dans des délais très rapides à la diffusion de contenus malveillants contrôlés sous l'influence avérée d'un Etat étranger», a-t-il souligné.
Egalement présente, la ministre de la Culture, Françoise Nyssen, assure que la proposition de loi, qui doit être examinée par les députés en mai, «ne vise pas à cibler les auteurs mais [la] diffusion» des fake news.
Christophe Bigot, avocat spécialisé en droit de la presse, faisait remarquer le 4 avril sur notre antenne que ce projet de loi était «inutile» puisqu'il existe déjà en France «des instruments dans le droit de la presse qui permettent de lutter contre ce qu'on a appelle les fake news». Fustigeant une proposition «archaïque», Christophe Bigot expliquait que cette loi «permettra d'interdire un média dès lors qu'il est étranger». L'avocat s'est aussi interrogé sur «la constitutionnalité de ce projet de loi» et a alerté sur les risques d'atteinte à la liberté de la presse eu égard à la difficulté dans certains cas de prouver qu'une information est fausse.