Le président français François Hollande, accompagné de ministres et de chefs d’entreprises, arrive en Grèce le 22 octobre pour une visite de deux jours. Le député du parti Syriza, Stelios Kouloglou, partage avec RT France sa vision de la situation.
RT France : Pourquoi est-ce que la visite de François Hollande se passe maintenant ?
Stelios Kouloglou : Je pense que le moment est très propice parce que c’est à la fois après la signature du nouveau mémorandum [plan de sauvetage financier du pays] mais aussi après la victoire d’Alexis Tsipras aux élections [législatives] de septembre. Je pense que François Hollande veut souligner l’importance des accords signés mais aussi aider le gouvernement grec afin que la restructuration de la dette soit vraiment appliquée.
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RT France : Est-ce que vous pensez que cette visite peut changer quelque chose pour l’économie grecque ?
Stelios Kouloglou : On espère que oui, mais le mémorandum est déjà un fardeau très lourd. Cet accord va provoquer encore plus d’austérité et on ne peut pas trouver un seul économiste dans le monde qui puisse vous dire qu’après cinq ou six ans de récession, on a besoin de davantage d’austérité. Cet accord a été imposé avec l’aide de Bruxelles et de la France et maintenant il faut le respecter.
Ce n’est pas écrit, mais tout le monde sait que l’Allemagne a donné son accord au troisième mémorandum à condition qu’une firme allemande rachète à bon marché les quatorze aéroports périphériques du pays
Comme la Grèce se trouve dans une situation difficile, «on vend tous les meubles de la maison» et il y a le désir d’en profiter. Il ne s’agit pas seulement du patronat français mais le patronat grec cherche également à profiter de la situation en réduisant, par exemple, les droits des travailleurs, en imposant des lois qui limitent le droit de grève. Ce n’est pas écrit, mais tout le monde sait que l’Allemagne a donné son accord au troisième mémorandum à condition qu’une firme allemande rachète à bon marché les quatorze aéroports périphériques du pays. Je pense qu’il y a toujours ce désir de profiter [de bonnes affaires] mais nous devons essayer de trouver des solutions profitables pour les deux parties, ne pas vendre toute la «maison» grecque, à savoir l’électricité, l’eau et les transports, au prix le plus bas parce que ça va affaiblir le pays d’un point de vue stratégique. L’Allemagne cherche aussi à punir la Grèce parce que c’est le mauvais élève de la classe. Un pays affaibli, et dont le sentiment national a été blessé, va toujours provoquer des problèmes au niveau européen, pour la zone euro et pour les idées fondatrices de l’Union européenne, comme la solidarité ou la justice sociale.
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RT France : La presse française titrait ce matin que François Hollande était reçu «en héros» en Grèce. Est-ce que la France est vraiment un «allié fidèle» de la Grèce ?
Stelios Kouloglou : Je ne dirais pas qu’il sera accueilli en héros mais quand même, il y a toujours une alliance entre la Grèce et la France qui a une dimension historique, à la différence de l’Allemagne, avec laquelle les relations ont toujours été très épineuses aux plans historique et politique. Ces dernières années, c’est plutôt l’Allemagne et Madame Merkel qui ont imposé un programme à la fois très dur et inefficace. On espère toujours en Grèce que la France peut jouer son rôle d’allié traditionnel.
RT France : La France a quand même participé à la signature de l’accord qui pèse lourd aujourd’hui sur l’économie grecque. François Hollande est toujours considéré comme le «good cop» à la différence du «bad cop» allemand ?
Stelios Kouloglou : Il y a toujours une partie de la société qui estime qu’il s’agissait d’un jeu «bon flic-mauvais flic», que François Hollande et Angela Merkel se sont répartis les rôles. Mais ce n’est pas ce que pense la majorité, qui estime que si François Hollande avait le pouvoir et le désir de changer la politique qui domine au plan européen, il l’aurait fait d’abord au niveau de la France et ensuite en Grèce et dans d’autres pays. On pense que le président français ne voulait pas ou ne pouvait pas essayer de changer de politique et d’accomplir sa promesse électorale à propos de l’austérité. Il avait en effet déclaré avant son élection qu’il essayerait d’appliquer moins d’austérité mais une politique qui mène à la croissance. Il ne l’a pas fait en France. En Grèce, on choisit entre les solutions les moins pires.
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RT France : Certains économistes français estiment que la Grèce est le premier Etat souverain à se retrouver sous contrôle d’institutions financières extérieures. Etes-vous d’accord avec cette affirmation ?
Stelios Kouloglou : Oui, mais la Grèce n’est pas le seul pays. La souveraineté nationale, en ce qui concerne les affaires économiques, est limitée. Cela est dû au mémorandum qui nous dit ce qu’il faut faire et ce qu’il ne faut pas faire. Le gouvernement Tsipras a essayé pendant sept mois de changer les choses, d’établir une marge de manœuvre plus grande en matière de politique économique mais il a échoué. Cette réduction de la souveraineté nationale va de pair avec le mémorandum. C’était aussi le cas en Irlande et au Portugal. Si on signe un accord qui est tout à fait draconien et qui fait dépendre le versement des prêts du respect de conditions imposées par la Troïka, il est alors très difficile de garder sa souveraineté sur le plan économique. Maintenant on nous a imposé des mesures qui ne seront pas soutenables, par exemple, toutes les entreprises grecques doivent, selon les termes du mémorandum, doivent payer l’intégralité de leurs impôts à l’avance. Cela a été décidé pour que les créanciers puissent récupérer leur argent. Telle est donc la situation alors que les entreprises grecques éprouvent à l’heure actuelle d’immenses difficultés économiques.
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