Macron et d'autres leaders européens ont souvent parlé de souveraineté et de reprise de contrôle au printemps. Mais l’UE devrait annoncer la conclusion d’un accord avec la Chine pour conforter le processus de délocalisation. Mais où on est-on ?
Emmanuel Macron et les autres dirigeants européens avaient beaucoup parlé de souveraineté et de reprise de contrôle au printemps, notamment après le fiasco des masques. Mais chassez le naturel… L’Union européenne devrait annoncer de façon imminente la conclusion d’un accord commercial avec la Chine qui confortera le processus de délocalisation à l’œuvre depuis une vingtaine d’années. Cet accord est négocié en catimini sans aucune transparence vis-à-vis d’opinions publiques sous la menace d’un chômage dû à l’inconséquence chinoise. Où comment un scandale arrive.
Ils sont incorrigibles ! Une fois de plus, les dirigeants européens (et surtout français !) sont pris la main dans le sac du mensonge éhonté. Car que n’avons-nous entendu, durant le mandat de Donald Trump, puis durant la pandémie, sur la nécessité d’abord de redonner vie à une alliance transatlantique à l’agonie, puis sur la nécessité de recouvrer la souveraineté européenne. Que n’avons-nous entendu, dans la bouche du président Macron, colportés ensuite par une presse subventionnée complaisante, sur les relocalisations industrielles, sur le retour des activités stratégiques en France, blabla, blabla, blabla ?
Et hop ! Entre Noël et le Nouvel An, le quotidien de Bernard Arnault, Les Echos, nous apprend que la Commission Européenne s’apprête à signer un accord commercial avec la Chine, sur le modèle de celui que la même Chine a signé avec l’Australie. Comme par hasard, cet accord permettra de consolider l’inverse des annonces qui nous sont faites depuis plusieurs mois : les échanges commerciaux seront facilités, et nos industriels seront une fois de plus encouragés à délocaliser leur activité pour rendre l’Europe toujours plus dépendante de la grande manufacture chinoise.
Un accord de pharisiens
Bien entendu, personne ne présente cet accord scélérat sous son vrai jour. La Commission arguera à qui voudra l’entendre que cet accord protège contre le travail forcé et qu’il instaure des normes sociales protectrices pour les travailleurs chinois. Quel soulagement ! Nous ne rapatrierons en Europe ni la production de ballon de football, ni la production de micro-processeurs stratégiques pour notre indépendance digitale, ni la production de médicaments essentiels, mais nous aurons l’assurance qu’à l’avenir, il n’y aura ni enfants, ni prisonniers politiques, intégrés au processus de fabrication ! Tout va bien alors ! Nous pouvons avoir bonne conscience.
Et la bonne conscience hypocrite, c’est bien elle qui guide ce texte dont la Commission n’a pas encore jugé utile de dévoiler le contenu. On parlait souveraineté, on parle seulement de production éthique sur sol chinois. Et tous ceux qui ont suivi la propagande de Pékin depuis le début de la pandémie auront vérifié que rien n’a changé dans l’art de la propagande chinoise.
Ainsi, alors qu’il est très vraisemblable que la pandémie se soit répandue après une faute commise dans un laboratoire de Wuhan, la Commission européenne s’empresse de doubler la mise en s’attachant au poteau d’un prétendu libre-échange avec la Chine.
Bien entendu, personne, à Bruxelles ni ailleurs, ne juge utile de signaler que la Chine a mis sous une surveillance généralisée, à coups de «logiciels prédictifs» les Ouïghours qui ont le malheur d’éteindre leur téléphone portable trop souvent ou trop longtemps (comportements suspects qui valent une arrestation et un placement en détention). Ni qu’elle a pris le contrôle de Hong Kong au point que les partisans de la démocratie fuient la ville avant d’être arrêtés. Ni qu’elle ne cache plus son envie d’envahir Taïwan pour balayer les derniers stigmates de la résistance au communisme.
La Commission Européenne a vendu nos intérêts sans mollir
Au passage, on remarquera que le volet le plus critique de l’accord, c’est-à-dire la réciprocité du libre-échange, n’a pas été conclu. Autrement dit, les Chinois pourront vendre en Europe, investir en Europe, mais le marché chinois restera ouvert sous condition aux entreprises européennes, et celles-ci ne pourront toujours pas investir librement en Chine. Les milliardaires chinois peuvent acheter nos meilleurs châteaux de Bordeaux, nos plus belles cristalleries, mais nous ne pouvons toujours rien acheter en Chine sans l’approbation du Parti communiste chinois.
Pour la réciprocité des accords commerciaux, ce qu’on appelle vulgairement le libre-échange, on repassera donc. Et pour la démocratie aussi. Cet accord est négocié dans l’opacité, à rebours de la volonté des peuples.
L’Union européenne chercherait à se discréditer et à susciter une vague de soulèvement populaire qu’elle ne s’y prendrait pas autrement. Toute la question est de savoir quels sont les intérêts personnels de la Commission et de certains commissaires dans ce genre d’attitude. Un vrai mystère qui mériterait une enquête en bonne et due forme de l’organe chargé de la lutte contre la corruption au sein de l’Union.
Eric Verhaeghe
Les opinions, assertions et points de vue exprimés dans cette section sont le fait de leur auteur et ne peuvent en aucun cas être imputés à RT.