RT: Quelle est l’importance du caucus dans le Wisconsin après les victoires qui jalonnent votre parcours et avant de partir à la «conquête» de New-York ?
Bernie Sanders : Nous avons récemment remporté les primaires dans six Etats sur sept et si nous arrivons à gagner dans le Wisconsin, ce qui est possible si la participation est élevée, cela fera sept sur huit, avant l’Etat de New-York. Si nous arrivons à New-York avec un véritable rebond, un vrai momentum, nous aurons des chances concrètes de l’emporter. Et si nous parvenons à battre Hillary Clinton dans son propre Etat, je pense que beaucoup de démocrates dans tout le pays vont se dire : «Vous savez quoi ? Bernie Sanders est celui qui ne fera pas que remporter l’investiture mais qui battra Donald Trump».
La totalité des sondages démontrent que je suis un candidat plus fort qu’Hillary Clinton contre Trump
RT: Sans vouloir mettre la charrue avant les boeufs, si vous l’emportez dans le Wisconsin et après à New-York, cela signifiera-t-il que certains super délégués du Parti démocrate passeront de votre côté ?
B.S.: Oh… pour être honnête avec vous, je crois que l’inclination de la plupart de ces super délégués est de soutenir Hillary Clinton, mais leur désir le plus fort, c’est de faire en sorte que des gens comme Donald Trump ne puissent pas entrer à la Maison Blanche. Là-dessus nos opinions convergent à 100%. La totalité des sondages démontrent que je suis un candidat plus fort qu’Hillary Clinton contre Trump. Le dernier sondage de CNN me donne 20 points d’avance [contre lui], une marge plus importante que celle d’Hillary. Et d’après le dernier sondage réalisé dans le Wisconsin, j’ai 19 points d’avance sur Trump, une différence significative par rapport à Hillary contre lui.
RT: Est-ce que cela veut dire qu’on a atteint maintenant le moment charnière de toute la campagne ?
B.S.: Absolument. Vous voyez, nous avons fait campagne dans le Sud profond, je n’ai pas besoin de vous dire que c’est une région plutôt conservatrice du pays. Sans embages, nos résultats y ont été lamentables. Clinton y a recueilli un très grand nombre de délégués. Mais vous savez quoi ? Nous avons quitté le Sud profond, nous allons vers l’Ouest, dans des Etats plus progressistes, et on gagne.
Nous devons changer notre politique commerciale
RT: En quoi Janesville est important, après vos vives critiques du libre-échange ?
B.S.: Nous sommes dans le bureau local de l’UAW (United Automobile Workers Union) qui à l’époque représentait les intérêts de milliers d’ouvriers travaillant à l’usine General Motors. Il y a quelques années, en 2008, ces postes de travail ont été supprimés. La plus grande partie du travail a été transférée au Mexique et beaucoup d’autres sociétés implantées dans le Wisconsin ont fait de même. Nous voyons que les accord commerciaux comme l’ALENA* et l’ALEAC**, les relations commerciales régulières et normales avec la Chine…font disparaître des milliers d’employés rémunérés dignement de notre pays. L’emploi part dans les pays avec un coût de travail faible d’où nous recevons les produits finis. Nous devons changer notre politique commerciale. Ce n’est donc pas par hasard si nous sommes assis dans le bureau local de l’UAW.
Il est clair qu’Hillary Clinton reçoit d’importants moyens des secteurs du pétrole et du gaz
RT: Que pouvez-vous dire des propos d’Hillary Clinton qui vous accuse de mentir lorsque vous évoquez les dons dont sa campagne bénéficie ?
B.S.: A mon avis, c’est une signe de sa nervosité et d'une sorte de désespoir de cette campagne. La personne en question [qui accuse Clinton, ndlr] n’est pas partisane de Bernie Sanders. Il s’agit d’un militant écologiste. Elle a indiqué que, selon Greenpeace, l’une des principales organisations écologiques au monde, Hillary Clinton avait reçu près de 4,5 millions de dollars de la part de sociétés de l’industrie fossile pour sa campagne. Les 43 lobbyistes officiels représentant le secteur pétro-gazier ont soutenu sa campagne en lui donnant le montant maximal autorisé par la loi. Je pense qu’il est clair qu’Hillary Clinton reçoit d’importants moyens des secteurs du pétrole et du gaz.
RT: Dans vos discours dans le Wisconsin vous avez plusieurs fois reproché des choses à Scott Walker [gouverneur de l’Etat]. Etait-ce justifié ?
B.S.: Je crois que la politique que Scott Walker mène avec conviction et qui consiste à attaquer les syndicats, accorder des avantages fiscaux aux sociétés, réduire les dépenses de l’éducation, essayer de priver les femmes du droit au choix [en ce qui concerne l’avortement, ndlr], ce n’est pas ce dont le peuple américain et l’Etat du Wisconsin ont besoin. Je dis souvent que ma politique au poste du président des Etats-Unis sera le contraire absolu de ce que fait Scott Walker en qualité de gouverneur de cet Etat.
RT: Donald Trump affirme qu’il pourra rétablir l’équilibre budgétaire américain en huit ans. Que pouvez-vous en dire ?
B.S.: C’est complètement dénué de sens.A mon avis, Trump n’est pas seulement la honte du peuple américain : même les républicains sensés ont honte de lui. Ce qu’il dit, c’est qu’en faisant A, B et C, de façon miraculeuse et non historique, l’économie va exploser et que les revenus générés par les impôts aussi. En réalité, cela n’a jamais marché et ne marchera pas. C’est tout ce qu’on peut dire là-dessus.
Madame Clinton voudrait que les débats télévisés passent à des heures où les audiences sont plus faibles
RT: Pourquoi y a-t-il tant de luttes dans vos débats de campagne, en particulier à New York ?
B.S.: Pour moi, c’est assez clair :Nous voulons que les débats des candidats soient diffusés sur les chaînes et à des moments où l’audience est maximale. Je crois que c’est une bonne chose à faire. Madame Clinton, de son côté, voudrait que les débats télévisés passent à des heures où les audiences sont plus faibles.
RT: Par exemple, pendant le match de basketball d’aujourd’hui [la finale du championnat de la NCAA (National Collegiate Athletic Association)] ?
B.S..: C’était l’une de leurs suggestions, ce qui montre bien où ils en sont.
RT: Le mois passé 43 millions de personnes vous ont regardé. Est-ce que des chiffres pareils vous surprennent ?
B.S.: Oui, bien sûr ! J’ai également été surpris par la collecte de dons, car nous avons reçu des dons individuels à hauteur de six millions de dollars ce qui représente 27 dollars par personne en moyenne. Qui aurait pu imaginer cela ?
* ALENA –Accord de libre-échange nord-américain
** ALEAC – Accord de libre-échange d'Amérique centrale