Facebook, nouvelle ligne de front : Kiev recrute une «cyber-armée»
Au lendemain de l’entrée de Kiev dans la guerre de l’information et de la création d’une «cyber-armée», le ministère ukrainien de l’Information a suscité sa première controverse en recrutant des bloggeurs pour faire de la propagande.
Le ministère ukrainien de l’Information a commencé à accepter les candidatures de ceux qui veulent s’enrôler dans cette cyber-armée. Une fois enregistrés, les utilisateurs recevraient une instruction sur la façon d’agir.
Un de ces bloggeurs a publié la première partie des instructions qu’il aurait reçues de «l’état-major de la cyber-armée».
L’objectif est apparemment de créer le plus de faux comptes possible sur les réseaux sociaux tels que Twitter, Facebook et VK (équivalent russe de Facebook) sans éveiller de soupçons. On y explique qu’il est préférable d’utiliser de nouvelles adresses e-mail qui utilisent un server hébergé en Occident. Les utilisateurs doivent encore utiliser de vrais noms, faire attention à ne pas ajouter trop d’amis (pour rester crédibles) et choisir leur localisation géographique en Crimée ou en l’Ukraine de l’Est.
Pour que le compte semble plus authentique, les utilisateurs doivent poster quelques entrées personnelles et laisser des commentaires sur des sujets non-politiques. Mais d’autres instructions distribuées le même jour incitaient à créer des comptes dans le Donbass ou en Crimée, en ajoutant que c’était la «façon de travailler des agents du Kremlin».
Le fait que deux versions du texte aient été distribuées a suscité une réaction négative sur la page Facebook où ils ont été publiés.
Un réseau national ukrainien Vesti rapporte que le bloggeur Aleksandr Barabochko, un aide du ministre de l’Information ukrainien Iouri Stets, a dit que la version comprenant le passage sur «les agents de Kremlin» était correcte alors que l’autre version avait pu être envoyé à quelques utilisateurs en raison d’un problème informatique.
Le ministère de l’Information ukrainien a été créé à la fin de l’année 2014 pour garantir la sécurité de l’information dans le pays. Les journalistes ont baptisé la nouvelle institution «ministère de la Vérité», reprenant la dénomination du ministère de la propagande du roman de George Orwell 1984.
Au début du mois de décembre 2014, le ministère a annoncé la création d’un département de la guerre de l’information.
«Vous n’avez pas besoin de trolls ou des robots pour diffuser des informations honnêtes auprès des utilisateurs d’internet, c’est évident pour les vétérans des réseaux sociaux», a dit Iouri Stets en janvier, cité par TASS, avant d’ajouter«pour le faire, il faut réunir les personnes influentes sur les réseaux sociaux qui vont dire la vérité à tous ceux qui les liront».
Ces mesures suivent la déclaration officielle de Stets du 22 février qui a dévoilé le idée de créer une chaîne de télévision nationale baptisée «Avenir ukrainien», qui diffuserait à l’international.
L’Ukraine prend la guerre de l’information très au sérieux. Samedi, Kiev a révoqué l’accréditation de plus de 100 médias russes. La liste comprend les agences TASS et Rossiya Segodnya, toutes les chaînes russes de télévision sauf Dozhd, selon la porte-parole du gouvernement ukrainien Yelena Guitlianskaya. Les accréditations ne seront accordées aux médias concernés qu’après la fin du conflit en Ukraine.
La Russie a critiqué cette décision de Kiev. «La décision ouvertement discriminatoire du parlement ukrainien de révoquer l’accréditation des médias russes aux composantes du pouvoir dans le pays est une extension de la politique qui vise à nettoyer l’espace médiatique de points de vue alternatifs», a dit le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov dans une déclaration le 22 février également.
Cette décision contredit les efforts diplomatiques entrepris par les dirigeants des pays du «format Normandie» pour conclure les accords de Minsk et «remet en question la volonté de Kiev d’arriver à une solution pacifique», a ajouté le ministre russe.
Le porte-parole du président russe Dmitri Peskov a dit à TASS samedi que Moscou n’entendait pas répondre aux mesures de Kiev en limitant les activités des médias ukrainiens. «La Russie est un pays où l’activité des médias est réglementée par la loi et où les journalistes russes et étrangers ont un droit égal à obtenir de l’information», a-t-il affirmé.