La visite d'une délégation de six parlementaires américains conduite par le sénateur républicain Lindsey Graham, qui s'est rendue à Taïwan le 14 avril pour une visite de deux jours, a été vivement dénoncée par la Chine. Présentée par le ministère des Affaires étrangères de l'île comme une nouvelle démonstration du soutien et de l'engagement «solides comme un roc» des Etats-Unis envers Taïwan dans le contexte de l'intervention russe en Ukraine, comme le rapporte l'agence de presse AP, la rencontre entre les élus et la présidente taïwanaise a suscité l'ire de Pékin.
Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Zhao Lijian, a ainsi déclaré que la Chine demandait aux Etats-Unis de «cesser tout contact officiel avec Taïwan», demandant aux Américains «d'honorer leur engagement» de ne pas soutenir la volonté d'indépendance de l'île. Selon le porte-parole, les membres de la délégation «devraient se conformer à la politique d'une seule Chine défendue par le gouvernement américain» et «éviter de s'engager plus avant dans cette voie dangereuse» que représente ce soutien affiché à Taïwan. «Nous continuerons à prendre des mesures fortes pour sauvegarder résolument la souveraineté nationale et l'intégrité territoriale», a ajouté Zhao Lijian.
Ceux qui jouent avec le feu se brûleront eux-mêmes
Illustrant cette détermination, l'armée chinoise a annoncé avoir organisé des exercices militaires dans la zone entourant Taïwan, en y envoyant des frégates, des bombardiers et des avions de chasse. «Cette opération est une réponse à la diffusion récente et fréquente de mauvais signaux par les Etats-Unis sur la question de Taïwan», a indiqué le commandement de l'Armée populaire de libération dans un communiqué publié alors que la délégation américaine tenait une conférence de presse dans l'île, sans la mentionner explicitement. «Les mauvaises actions [...] des Etats-Unis sont complètement futiles et très dangereuses. Ceux qui jouent avec le feu se brûleront eux-mêmes», a averti le commandement.
Dans un communiqué distinct, le ministère chinois de la Défense a qualifié la visite des représentants américains de «délibérément provocatrice», estimant qu'elle avait «conduit à une nouvelle escalade de la tension dans le détroit de Taïwan».
Pour la délégation américaine, il ne faut pas abandonner la démocratie... ni la production de semi-conducteurs
Selon Reuters, le sénateur Lindsey Graham a déclaré à la présidente de Taïwan, Tsai Ing-wen, que la guerre en Ukraine, conjuguée à un comportement jugé provocateur de la Chine, avaient uni l'opinion américaine comme jamais auparavant. «Abandonner Taïwan reviendrait à abandonner la démocratie et la liberté», a-t-il déclaré, avant d'évoquer «un retour de bâton grandissant dans le monde contre [...] les méchants». Autre sénateur membre de la délégation, Bob Menendez a reconnu que la visite causait un fort mécontentement chinois, en mettant en avant l'importance technologique de l'île. «Taïwan produisant 90 % des semi-conducteurs haut de gamme du monde [...] il faut comprendre que sa sécurité a un impact mondial», a souligné l'élu auprès de Tsai Ing-wen.
Depuis l'établissement de relations diplomatiques avec la République populaire de Chine en 1979, les Etats-Unis considèrent le gouvernement communiste de Pékin, et non plus Taïwan, comme le seul représentant de la Chine. Toutefois, Washington continue à vendre des armes à Taïwan pour sa défense. Début avril, les Etats-Unis ont approuvé la vente de technologies et d'armements militaires à Taïwan pour 95 millions de dollars, s'engageant également à lui fournir des spécialistes pour entretenir ses batteries sol-air Patriot. Pékin avait alors exprimé une «protestation résolue» à ce sujet, dénonçant une «ingérence flagrante dans les affaires intérieures de la Chine».