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Burkina Faso : après le coup d'Etat, la Cédéao suspend le pays, sans autres sanctions

La Communauté des Etats ouest-africains, qui demande la libération du président récemment renversé Christian Kaboré, s'en est tenue pour l'instant à une suspension de la participation du Burkina Faso à ses instances.

A la suite du coup d'Etat survenu le 24 janvier, le Burkina Faso a été suspendu ce 28 janvier par la Communauté des Etats ouest-africains (Cédéao), à l'issue d'un sommet virtuel de l'organisation qui n'a pour l'instant pas décidé d'autres sanctions. La Cédéao a demandé la libération de l'ancien président Roch Marc Christian Kaboré, placé en résidence surveillée, ainsi que des autres officiels arrêtés lors de la prise de pouvoir par les militaires emmenés par le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba. Le sommet, qui a duré environ trois heures, a en outre décidé de l'envoi à Ouagadougou, à compter du 29 janvier, d'une mission des chefs d'état-major des armées de la Cédeao, qui sera suivie  d'une mission ministérielle le 31 janvier.

Un nouveau sommet de la Cédéao se tiendra le 3 février à Accra (Ghana), en présence cette fois des chefs d'Etat de la région, afin d'étudier le compte-rendu de ces missions et de décider d'imposer ou non d'autres sanctions, comme il l'a fait pour le Mali et la Guinée où des militaires ont également pris le pouvoir récemment.

Le 27 au soir, dans sa première allocution depuis sa prise de pouvoir, le nouvel homme fort du Burkina Faso a déclaré à la télévision nationale que son pays avait «plus que jamais besoin de ses partenaires». Disant comprendre les «doutes légitimes» suscités par le coup d'Etat, il a assuré que le Burkina «continuera[it] à respecter les engagements internationaux, notamment en ce qui concerne le respect des droits de l'homme», précisant que l'indépendance de la justice serait elle aussi assurée. Le lieutenant-colonel Damiba s'est en outre engagé «au retour à une vie constitutionnelle normale», dès lors que «les conditions seront réunies», sans cependant mentionner un calendrier précis. Un allègement du couvre-feu mis en place le 24 janvier a cependant été annoncé : initialement instauré de 21h à 5h, il passe de minuit à 4h.

Les militaires veulent définir une «feuille de route» pour le pays

La population reprochait notamment au président déchu de ne pas avoir réussi à endiguer la dégradation sécuritaire depuis 2015, notamment dans le nord et l'est du pays. Dans le sillage du Mali et du Niger, le Burkina Faso est pris dans une spirale de violences attribuées à des groupes armés djihadistes affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique, qui ont fait plus de 2 000 morts et contraint au moins 1,5 million de personnes à fuir leurs foyers.

Depuis sa prise de pouvoir, le lieutenant-colonel Damiba a consulté les ministres renversés ainsi que les syndicats, demandant aux premiers de ne pas quitter le territoire sans autorisation, promettant aux seconds de les consulter et de les impliquer dans la transition. Dans son allocution télévisée, il a assuré vouloir associer toutes les «forces vives» de la nation pour «une feuille de route» en vue de redresser le Burkina Faso.

Plusieurs organisations semblent enclines à travailler avec lui.  «Nous avons intérêt à ce que cette armée réussisse à stabiliser le pays», affirme l'association Sauvons le Burkina Faso, qui réclamait ardemment la démission du président Kaboré. Plusieurs partis d'opposition à ce dernier, dont le plus important, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, proche de Blaise Compaoré, l'ancien président chassé en 2014 après 27 ans de pouvoir) ont également exprimé «leur disponibilité à apprécier la vision qui leur sera soumise» par les militaires. Roland Bayala, porte-parole de la Coalition des patriotes africains du Burkina Faso (COPA/BF), qui avait appelé à manifester contre le passage d’un convoi militaire français dans le pays en novembre, a demandé à la Cédéao «de faire attention à ses sanctions contre le peuple burkinabé», qui ne va pas «se laisser faire», selon ses mots.

La question de l'avenir de Roch Marc Christian Kaboré devrait également se poser prochainement. En résidence surveillée, il est en bonne santé selon plusieurs sources, et disposerait d'un médecin. Lors de son intervention le 27 janvier, le nouvel homme fort du pays n'a pas prononcé son nom. Il a en revanche conclu son discours par une devise bien connue des Burkinabés, celle du pays sous l'ancien président Thomas Sankara: «La patrie ou la mort, nous vaincrons». Leader progressiste et icône panafricaine, Thomas Sankara a été tué en 1987 lors d'un coup d'Etat fomenté par des proches, parmi lesquels Blaise Compaoré qui avait pris le pouvoir.  Le procès de ses assassins, commencé en octobre 2021 mais mis en pause par le putsch, reprendra le 31 janvier.