Le Mali a démenti le 24 décembre tout déploiement de membres de la société militaire privée russe Wagner, après les accusations en ce sens d'une quinzaine de pays occidentaux impliqués dans la lutte antidjihadiste dans ce pays sahélien.
Dans un communiqué publié dans la soirée du 24 décembre, le gouvernement du Mali a indiqué apporter «un démenti formel à ces allégations sans fondement [sur] un prétendu déploiement des éléments d'une société de sécurité privée au Mali».
L'Etat malien n'est engagé que dans un partenariat d'Etat à Etat avec la Fédération de Russie, son partenaire historique
Le 23 décembre, des puissances occidentales – dont la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni ou encore le Canada – s'étaient en effet émues d'un supposé déploiement de Wagner au Mali, dénonçant en même temps «l'implication du gouvernement de la Fédération de Russie dans la fourniture d'un soutien matériel» à la société militaire privée. Des allégations plusieurs fois balayées par Moscou.
Bamako appelle à être «jugé sur des actes plutôt que sur des rumeurs»
«Nous appelons la Russie à se comporter de manière responsable et constructive dans la région», insistait le texte, également signé par la Belgique, le Danemark, l'Estonie, l'Italie, la Lituanie, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, la République tchèque, la Roumanie et la Suède. Des pays engagés aux côtés de la France dans le nouveau groupement européen de forces spéciales Takuba, destiné à accompagner les soldats maliens au combat.
Le communiqué malien, signé par le porte-parole du gouvernement et ministre de l'Administration territoriale, le colonel Abdoulaye Maiga, affirme en outre que l'exécutif «exige que des preuves [de la présence de Wagner] lui soient apportées par des sources indépendantes». «[Abdoulaye Maiga] tient à préciser qu'au même titre que la mission européenne de formation, des formateurs russes sont présents au Mali dans le cadre du renforcement des capacités opérationnelles des forces de défense et de sécurité nationales», précise encore le texte, qui demande que Bamako soit «jugé sur des actes plutôt que sur des rumeurs» et rappelle que «l'Etat malien n'est engagé que dans un partenariat d'Etat à Etat avec la Fédération de Russie, son partenaire historique».
Interrogé le 21 octobre sur les activités d'entreprise de sécurité privées russes en Afrique, Vladimir Poutine avait alors rappelé que celles-ci n'étaient pas liées à l'Etat russe. Il avait ajouté que Moscou était prêt à agir si ces entreprises compromettaient les intérêts nationaux. Plus tôt, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait de son côté tenu à mettre les points sur les «i» à ce sujet, martelant que le gouvernement russe n'avait «rien à voir» avec la société Wagner. Le chef de la diplomatie russe avait par là même condamné la tendance européenne à s'inquiéter de l'arrivée de nouveaux acteurs étrangers sur le terrain sécuritaire malien et rappelé que l'activité des entreprises militaires privées n'était «pas du tout un phénomène russe» mais trouvait son origine dans les pays occidentaux.
Le 22 décembre, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken avait déjà mis en garde le Mali contre des conséquences financières et une déstabilisation du pays si le gouvernement recrutait le groupe Wagner. Suivis par l'Union européenne le 13 décembre, les Etats-Unis ont d'ailleurs imposé des sanctions contre cette société militaire privée. La diplomatie russe avait alors réagi, accusant les occidentaux «d'hystérie» à ce sujet.
Le Mali est le théâtre depuis 2012 d'opérations de groupes djihadistes liés à Al-Qaïda et à Daesh, ainsi que de violences perpétrées par des «milices d'autodéfense» et des bandits. Les forces régulières sont elles-mêmes accusées d'exactions. Les violences parties du nord du pays se sont propagées au centre, puis au Burkina Faso et au Niger voisins. Elles ont fait des milliers de morts civils et militaires ainsi que des centaines de milliers de déplacés, malgré le déploiement de forces onusiennes, françaises et africaines. La prise du pouvoir à Bamako par des militaires à la faveur d'un putsch en 2020 n'a pas enrayé la spirale de violences.