Dix ans plus tard, Laurent Gbagbo fait son retour en Côte d'Ivoire au milieu de ses partisans
Accueilli par des soutiens en liesse, l'ancien président ivoirien est arrivé à Abidjan après dix ans d'absence. Une rentrée possible après son acquittement par la justice internationale et l'acceptation du pouvoir en place.
L'ancien président ivoirien Laurent Gbagbo a quitté le 17 juin Bruxelles et est rentré dans son pays en fin de journée après dix ans d'absence. Un retour permis par son acquittement de crimes contre l'humanité par la justice internationale et par le feu vert donné par Abidjan au nom de la «réconciliation nationale». Il a été accueilli par les acclamations des centaines de supporters enthousiastes, comme le montrent plusieurs vidéos dont celles du Front populaire ivoirien, le parti créé par Laurent Gbagbo.
Peu avant son arrivée, ses partisans l'attendaient à l'aéroport d'Abidjan, en chantant, comme l'a constaté une correspondante de Jeune Afrique sur place.
L’avion dans lequel se trouve Laurent #Gbagbo vient d’atterrir à Abidjan. Ses partisans chantent au bord du tarmac. pic.twitter.com/modntHD2q0
— Florence Richard (@FlorenceRic) June 17, 2021
Mais nombre de ses partisans ont aussi été dispersés par la police à coups de gaz lacrymogène dès le matin du 17 juin, d'après l'AFP. Un journaliste indépendant confirme : «Les tirs de grenades lacrymo, mais aussi de grenades assourdissantes s'entendent jusqu'au pavillon présidentiel à un rythme soutenu, à une heure du retour de [Laurent] Gbagbo». Peu de temps après, son épouse Simone s'est également rendue à l'aéroport.
Son épouse Simone Gbagbo vient d'arriver au pavillon, attirant avec elle une nuée de photographe. pic.twitter.com/cjR5zJFNw4
— Fçois Hume-Ferkatadji (@EfaSheef) June 17, 2021
Le retour de Laurent Gbagbo était attendu avec impatience par ses partisans depuis son acquittement en 2019 par la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye après des accusations de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité liées à son rôle dans la guerre civile entre 2010 et 2011.
Avant son départ de Bruxelles, son avocate Habiba Touré qui a voyagé avec lui a déclaré à l'AFP qu'il était «content, enthousiaste et veut jouer sa partition pour essayer de réconcilier les Ivoiriens. Il a besoin de parler à son peuple».
L'implication de Paris dans la crise post-électorale ivoirienne reste toujours controversée
Ses adversaires estiment toujours qu'il a précipité son pays dans le chaos en refusant de reconnaître les résultats de l'instance électorale donnant Alassane Ouattara vainqueur. De son côté, Laurent Gbagbo arguait alors que la proclamation des résultats du scrutin par la Cour constitutionnelle, le donnant gagnant, ne pouvait être contestée.
Le 28 mars 2011, après quatre mois de médiations infructueuses, les Forces républicaines pro-Ouattara (FRCI, anciens rebelles qui contrôlaient le nord du pays) lançaient une offensive vers le sud, prenant en quatre jours le contrôle de la quasi-totalité du territoire. Durant cette crise, 3 000 personnes ont été tuées.
Moins de deux mois plus tard, le 11 avril 2011, Laurent Gbagbo était finalement arrêté par les FRCI, après une bataille de dix jours dans la capitale et plusieurs jours de bombardements par la force française Licorne et l'ONU (qui avait reconnu la victoire d'Alassane Ouattara dans les urnes). La France avait de fait reçu mandat de l'institution internationale pour protéger ses ressortissants et maîtriser les forces pro-Gbagbo mais son interventionnisme dans le dossier ivoirien reste à ce jour controversé. Les militaires français avaient en outre pris le contrôle de l'aéroport d'Abidjan, suscitant une hostilité dans le camp des pro-Gbagbo. Les Français ont également appuyé les pro-Ouattara à déloger le président de sa résidence. Arrêté à Abidjan, Laurent Gbagbo est alors transféré à la CPI à La Haye.
Laurent Gbagbo reste sous le coup d'une condamnation en Côte d'Ivoire à 20 ans de prison pour le «braquage» de la Banque centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest (BCEAO) pendant la crise de 2010-2011, mais le gouvernement a laissé entendre qu'elle serait abandonnée.