Le président russe a accordé un entretien à la chaîne de télévision NBC, la première auprès d'un média américain depuis trois ans. Elle sera diffusée dans son intégralité le 14 juin, deux jours avant le sommet qui réunira physiquement Vladimir Poutine et Joseph Biden, le 16 juin à Genève, en Suisse. Le dernier entretien que le président russe avait accordé à un média américain remonte à juin 2017, quelques mois après l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche.
L'occasion pour Vladimir Poutine de s'exprimer, entre autres, sur les mots qu'avait eus à son endroit son homologue américain au mois de mars, le qualifiant de «tueur sans âme». «Quand on a demandé au président Biden s’il estimait que vous étiez un tueur, il a répondu : "Oui, je le pense." Monsieur le président, êtes-vous un tueur ?», lui a ainsi demandé le journaliste de NBC News Keir Simmons.
J’ai toujours été guidé par les intérêts de l’Etat russe et du peuple russe
«Durant ma carrière, je me suis habitué aux attaques venant de tous les côtés, pour de nombreuses raisons, à des attaques de différentes qualités et finesses. Rien de cela ne m’étonne. Les personnes avec qui nous coopérons et nous disputons sur la scène internationale, et nous-mêmes, ne sommes pas de jeunes mariés : nous ne nous jurons pas amour et amitié pour l'éternité. Nous sommes des partenaires, et, sous certains angles, nous sommes rivaux», a expliqué à ce sujet Vladimir Poutine, estimant par ailleurs que l'étiquette de «tueur» correspondait à une accusation typique du «machisme hollywoodien».
«Je tiens à ajouter quelque chose, si vous me le permettez. J’ai entendu des dizaines d’accusations de ce type, surtout à l’époque des graves événements, durant la lutte contre le terrorisme dans le Caucase du Nord. De ce point de vue, j’ai toujours été guidé par les intérêts de l’Etat russe et du peuple russe», a encore souligné Vladimir Poutine.
Trump est une «personnalité extraordinaire, talentueuse», selon Poutine
C'est alors que le journaliste de la chaîne américaine a énuméré une série de Russes ayant trouvé la mort dans des circonstances polémiques (Anna Politkovskaïa, Alexandre Litvinenko, Sergueï Magnitski, Boris Nemtsov et Mikhaïl Lessine), procédé auquel Vladimir Poutine a réagi en ces termes : «Je ne voudrais pas être impoli, mais cela ressemble à une indigestion – une indigestion verbale. Vous avez cité les noms de nombreuses personnes qui ont effectivement souffert, qui sont mortes à différents moments, pour des raisons différentes, de la main de différentes personnes. [...] Vous avez évoqué Lessine : il a travaillé au sein de l'administration présidentielle, j’avais de très bonnes relations avec lui. Il a péri aux États-Unis. Est-il mort de cause naturelle ou non, je ne sais pas. C’est à vous que nous devons poser la question de savoir comment il est mort. Aujourd'hui encore, je regrette sa mort. J’estime que c’était une personne décente et honnête.»
Au cours de cet entretien, le chef d'Etat russe a par ailleurs été amené à comparer les présidences de Joseph Biden et de son prédécesseur. «J’estime toujours à l'heure actuelle que l’ancien président américain, monsieur Trump, est une personnalité extraordinaire, talentueuse. Dans le cas contraire, il ne serait pas devenu président des Etats-Unis. C’est une personne remarquable. Il peut plaire ou ne pas plaire. Ce n’est bien évidemment pas une créature de l’establishment américain : il n’avait jamais fait de la grande politique. [...] Le président Biden est de toute évidence totalement différent de Trump, parce que c’est un professionnel. Il a passé quasiment l’intégralité de sa vie d’adulte en politique. C'est ce qu'il fait depuis de nombreuses années», a ainsi développé Vladimir Poutine.
«J'ai grand espoir que, oui, il y ait certains avantages, certains inconvénients, mais qu'il n'y ait plus de manœuvres impulsives de la part du président américain en exercice», a-t-il encore dit, selon une traduction de NBC News.
Et le président russe de déplorer la dégradation des relations bilatérales entre Washington et Moscou. Selon lui, la responsabilité en revient au camp américain. «Ce n'est pas nous qui avons mis les relations russo-américaines dans leur état actuel. [...] Ce sont les Etats-Unis qui ont imposé et continuent d'imposer des sanctions contre nous, pour le moindre prétexte et même sans aucun prétexte, uniquement parce que nous existons ! Mais il faudra s'y faire : la Russie a existé, existe et continuera d'exister», avait en effet déclaré Vladimir Poutine le 4 juin, lors d'une intervention au Forum économique de Saint-Pétersbourg.