Génocide en Namibie : l'Allemagne rejette les demandes de réparation financière
SI l'Allemagne a reconnu le 28 mai avoir commis «un génocide» contre les ethnies Hereros et Namas en Namibie pendant l'ère coloniale, son gouvernement refuse de verser une réparation financière en faisant valoir son plan d'aide au développement.
L'Allemagne a rejeté le 9 juin les demandes de réparations émanant de Namibie pour le massacre de Hereros et Namas à l'ère coloniale, qu'elle reconnaît désormais comme un génocide, réitérant que l'aide proposée de 1,1 milliard d'euros serait versée «sur une base volontaire».
«Nous sommes d'avis que le texte que nous avons paraphé représente une bonne base pour clore enfin ces négociations» entamées en 2015, a affirmé le ministre des Affaires étrangères Heiko Maas devant le Bundestag, Chambre basse du Parlement. Cet accord présenté en mai fait l'objet de critiques en Namibie, des dirigeants de ce pays ayant eux-mêmes reconnu que la compensation négociée était «insuffisante».
«Cet accord se fait exclusivement sur une base volontaire, et il n'y aucune base légale au paiement» proposé par l'Allemagne, a expliqué le ministre allemand. «En cela, il n'est donc pas comparable à des réparations», a-t-il insisté, réaffirmant que l'aide financière proposée était aux yeux de Berlin «appropriée».
Selon le texte conclu en mai avec les autorités namibiennes, l'Allemagne s'est engagée à verser une aide au développement de 1,1 milliard sur 30 ans qui doit profiter aux descendants des deux tribus. Elle servira notamment à l'acquisition de terres, à la construction de routes en milieu rural, à l'adduction d'eau et à l'assainissement. Selon l'accord, qui doit être adopté par les parlements respectifs des deux pays, l'Allemagne va aussi présenter des excuses officielles pour ce génocide, considéré par les historiens comme le premier du XXe siècle. Au moins 60 000 Hereros et environ 10 000 Namas (hommes, femmes et enfants) perdirent la vie entre 1904 et 1908.
L'Allemagne refuse de présenter des excuses officielles
Le résultat des pourparlers est toutefois vivement contesté par des représentants des deux ethnies et l'opposition namibienne, qui accusent le gouvernement de Windhoek de les avoir écartés des négociations et exigent pour certains que la somme payée soit augmentée et qualifiée de réparations.
Les autorités namibiennes exigeaient des excuses officielles et des réparations mais l'Allemagne s'y est toujours opposée, invoquant les millions d'euros d'aide au développement versés à la Namibie depuis son indépendance en 1990. Berlin estime par ailleurs que sa reconnaissance d'un génocide n'ouvre la voie à aucune «demande légale d'indemnisation».
La convention de l'ONU sur la prévention et la répression du crime de génocide, élaborée en 1948 après l'Holocauste, ne s'applique pas de façon rétroactive. Un tribunal fédéral de New York avait d'ailleurs rejeté en 2019 la procédure initiée par les tribus Nama et Herero qui réclamaient réparation à l'Allemagne pour le génocide.