L'élection présidentielle en Syrie, qui doit se tenir le 26 mai, a été au cœur des débats ce 28 avril au Conseil de Sécurité de l'ONU, lors d'une session mensuelle. Etats-Unis, France et Royaume-Uni ont ainsi d'ores et déjà annoncé qu'ils ne reconnaitraient pas son résultat, ce que Moscou a dénoncé comme constituant une forme d'«ingérence» allant à l'encontre du droit international.
Qualifiant le futur scrutin d'«imposture», l'ambassadrice des Etats-Unis à l'ONU Linda Thomas-Greenfield a appelé les autorités syriennes à prendre en compte la «participation des réfugiés, des personnes déplacées et de la diaspora à toute élection syrienne». Tant que cela ne sera pas le cas, «nous ne serons pas dupes», a-t-elle ajouté.
Adoptant une ligne similaire à celle de Washington, l'ambassadeur français Nicolas de Rivière a prévenu que la France ne reconnaîtrait «aucune validité» à cette élection. Tandis que les autorités syriennes ont convié des parlementaires d'une quinzaine de pays alliés en qualité d'observateurs, le diplomate a assuré que le scrutin se tiendrait «sous le seul contrôle du régime, sans supervision internationale».
«Des élections en l'absence d'un environnement sûr et neutre, dans un climat de peur permanente, lorsque des millions de Syriens dépendent de l'aide humanitaire [...] ne confèrent pas de légitimité politique, mais manifestent plutôt un mépris pour le peuple syrien», a pour sa part estimé Sonia Farrey, pour le Royaume-Uni.
Moscou déplore une opposition à «l'idée même» du scrutin
Elle aussi membre permanent du Conseil de Sécurité, la Russie a déploré la position occidentale de principe dans ce dossier. Le diplomate russe Vassili Nebenzia, a ainsi jugé «désolant de voir que certains pays sont hostiles à l'idée même de l’élection à venir et se sont déjà hâtés de [la] déclarer illégitime».
Le représentant de la Russie, intervenue dans le conflit syrien sur demande du président Bachar el-Assad (comme l'autorise le droit international), a déploré le «fond médiatique négatif autour du futur scrutin». Il a ainsi estimé que cette attitude allait à l'encontre des travaux du Comité constitutionnel syrien, chargé de rédiger une nouvelle constitution et réunissant pouvoir et opposition.
«Malgré toutes les difficultés, les autorités syriennes font des efforts pour assurer le fonctionnement de l’Etat», a encore souligné Vassili Nebenzia, dénonçant par ailleurs une «ingérence dans les affaires intérieures de la Syrie [...] inacceptable et contraire aux normes existantes du droit international».
Chinois, Russes, Iraniens et Cubains conviés par Damas
51 candidats, dont sept femmes, ont déposé officiellement leur candidature à l'élection présidentielle syrienne avant la date limite du 28 avril, selon l'agence de presse publique Sana. Pour être acceptée, leur candidature doit désormais recueillir le soutien de 35 des 250 députés du Parlement syrien. Autre nécessité pour les candidats : vivre «de manière continue» en Syrie depuis au moins 10 ans.
Parmi les candidats figure l'actuel président Bachar el-Assad, au pouvoir depuis 2000, date à laquelle il avait succédé à son père, Hafez el-Assad. Il briguera un quatrième mandat.
Comme le rapporte l'agence de presse syrienne, les autorités ont invité les parlementaires «de pays frères et amis à suivre le processus de l’élection du président de la République arabe syrienne [...] pour s’informer de son déroulement». Parmi les 14 nations conviées on retrouvé la Russie, la Chine, l'Iran, l'Algérie, le Venezuela, Cuba, l'Equateur ou encore la Bolivie.
Second scrutin organisé depuis le début, en 2011, de la guerre civile, l'élection présidentielle syrienne doit se tenir dans un contexte difficile, entre un regain de tensions sur le terrain et une situation humanitaire encore aggravée par la pandémie de Covid-19.
Confronté à l'insurrection de groupes terroristes et islamistes depuis des années, le président Bachar el-Assad est parvenu à reconquérir une large partie du territoire national, à l'exception de certaines zones, dont notamment celle occupée par les forces kurdes dans le nord du pays.
Mais, au-delà de l'aspect militaire, 10 ans après le début du conflit, la nécessité d'une solution politique reste prégnante. En parallèle au Comité constitutionnel inter-syrien de Genève, c'est notamment dans le cadre du processus d'Astana, qui se tient sous l'égide de la Russie, de l'Iran et de la Turquie, que se retrouvent à la table des négociations représentants du gouvernement syrien et délégations de l'opposition.