Exécutions extra-judiciaires et mécanique du drone, Barack Obama fait mieux que George W. Bush
Des «Kill list», des cibles sous forme de cartes à jouer, une chaine de décisions bureaucratique au cadre juridique flou. Les révélations sur le programme américain de meurtres ciblés par drones laissent entrevoir une mécanique bien huilée.
S'il fallait retenir une chose des révélations du site The Intercept, c'est à quel point les Etats-Unis ont fait du recours aux assassinats ciblés par drones une pratique habituelle.
Un lanceur d'alertes anonyme publie des documents sur les drones américains https://t.co/bUshNKmnTopic.twitter.com/37rmA8AVh3
— RT France (@RTenfrancais) 15 Octobre 2015
Un cadre juridique flou, une chaîne de décision bureaucratique
Certains documents révélés par un lanceur d'alerte anonyme portent sur les frappes américaines en Afghanistan. Ils décrivent le processus de décision qui mène à ces assassinats ciblés. Or la Maison Blanche a toujours refusée à révéler le cadre juridique dans lequel elle inscrivait ces opérations, alors même que celles-ci sont devenues son principal moyen d’action dans sa «guerre contre le terrorisme».
The Intercept s'est également intéressé au processus de décision de la mécanique bureaucratique, avant qu'une décision d'élimination soit prise. Le site indique ainsi que les cibles potentielles sont représentées sous la forme de «cartes de base-ball». Reproduisant ces cartes que s’échangent les amateurs de ce sport sur leurs joueurs préférés, elles ont pourtant été créées par les professionnels du renseignement. Chacune est unique: elle contient la photo de la cible, ses ramifications terroristes, la menace potentielle que la personne fait peser.
In an astonishing act of civil courage, one American just shattered an unspeakable lie. https://t.co/2H81IMKPhapic.twitter.com/OwIqygfpqJ
— Edward Snowden (@Snowden) 15 Octobre 2015
Tout cela combiné avec des renseignements sur l'opération sera alors examiné par Barack Obama lui-même, lequel doit donner son feu vert. Ce feu vert prend à lui-seul 58 jours, à la suite de quoi l’armée a soixante jours pour mener la frappe.
Le nombre de victimes sous-évalué
C'est sous le nom de «kill list», que les personnes devant être éliminées sont désignées. Tne Intercept donne l'exemple de l'Opération Haymaker qui a eu lieu dans le nord-est de l’Afghanistan entre janvier 2012 et février 2013: 90 % des personnes tuées n’étaient pas des personnes visées.
De façon commode, les militaires américains ont cependant désigné ces victimes dans leurs statistiques comme des «ennemis tués au combat».
Whistleblower who leaked SECRET Drone Papers: personnel involved w assassination think they have "godlike powers" pic.twitter.com/7LldzMUrFX
— jeremy scahill (@jeremyscahill) 15 Octobre 2015
Pour le lanceur d'alerte anonyme, désigner ainsi toutes les victimes masculines comme des combattants est «folle»; il ajoute: «Mais nous nous sommes habitués à cela. Les agences de renseignement, le JSOC (forces spéciales américaines procédant aux frappes), la CIA, et tous ceux qui aident et soutiennent ces programmes, ils n’ont pas de problème avec ça».
#AmnestyInternational exige une enquête du Congrès après les révélations sur les drones https://t.co/vSNwxI7YpNpic.twitter.com/WZWRIeKsZu
— RT France (@RTenfrancais) 16 Octobre 2015
Des explications embarrassées
Selon le Monde, Josh Earnest, porte-parole de la Maison Blanche a tenté d'atténuer la portée des révélations de The Intercept. Il a ainsi estimé que le président Obama tentait d’être «aussi transparent que possible» sur les opérations antiterroristes. Selon lui, ces opérations «vont très loin pour éviter les victimes civiles.
Il n'en demeure pas moins que selon les chiffres du Bureau of Investigative Journalism, à la date de septembre 2015, l'administration Obama avait ordonné près de 500 frappes qui ont fait 2 464 personnes. Parmi elles, au moins 314 étaient des civils. En comparaison, en deux mandats, l'administration Bush a ordonné 52 frappes, tuant 416 personnes, dont 167 civils. Soit 10 fois moins de frappes que pour Barack Obama.