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L'UE sanctionne les «actions unilatérales» et les «provocations» de la Turquie en Méditerranée

Les dirigeants de l'Union européenne ont décidé de mettre en place des sanctions individuelles en réactions aux «actions unilatérales et provocations» de la Turquie en Méditerranée orientale envers la Grèce et Chypre. La France s'en félicite.

Le porte-parole du Conseil européen Barend Leytsun a annoncé que, le 10 décembre, les dirigeants de l'Union européenne (UE) réunis en sommet à Bruxelles avaient décidé de sanctionner les actions de la Turquie en Méditerranée contre la Grèce et Chypre. «Le Conseil européen a adopté des sanctions, face aux "actions unilatérales et provocations" de la Turquie», s'est dans la foulée félicité le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes français Clément Beaune sur son compte Twitter.

«Les mesures décidées sont des sanctions individuelles, et des mesures supplémentaires pourront être décidées si la Turquie poursuit ses actions», a expliqué un diplomate européen à l'AFP.

La Turquie juge la décision «biaisée et illégitime», Emmanuel Macron loue la «fermeté» de l'UE

La Turquie a rejeté cette décision le lendemain, la qualifiant de «biaisée et illégitime». «Nous rejetons cette attitude biaisée et illégitime figurant dans les conclusions du sommet de l'UE», a ainsi déclaré le ministère turc des Affaires étrangères dans un communiqué.

Le président français Emmanuel Macron s'est lui félicité que l'Union européenne ait «démontré sa capacité à faire preuve de fermeté» face à la Turquie. «Nous avions donné une chance à la Turquie» en octobre, mais «nous avons unanimement constaté que la Turquie avait poursuivi ses actions provocatrices», a déclaré le président français à la fin d'un sommet européen à Bruxelles.

«L'ensemble des chefs d'Etat et de gouvernement ont acté ces sanctions, ce qui a d'ailleurs été immédiatement compris par nos amis turcs, qui ont réagi dès ce matin», a souligné Emmanuel Macron, ajoutant : «L'Europe reste évidemment toujours ouverte au dialogue.»

«Il y a six mois, on disait : la France est toute seule» sur ce dossier, a-t-il rappelé, en se félicitant que le «travail de conviction» de Paris soit désormais «mieux compris» car «ce processus est le seul à mettre suffisamment de pression sur la Turquie». «On a raison parfois d'être clairs et vocaux quand les comportements sont inacceptables», a-t-il encore estimé.

Une liste de noms va être établie dans les prochaines semaines et sera soumise à l'approbation des Etats membres, selon les conclusions adoptées par le sommet des 27 réunis à Bruxelles.

Ces noms seront inscrits sur la liste noire établie en novembre 2019 pour sanctionner les activités de forage de la Turquie dans les eaux de Chypre. Elle compte deux responsables de la Turkish Petroleum Corporation, interdits de visas et dont les avoirs dans l'UE ont été gelés.

L'Union européenne réévaluera la situation d'ici mars 2021

Toutes les sensibilités se sont exprimées au cours du sommet, et l'absence de consensus a notamment écarté l'adoption de sanctions économiques contre des secteurs d’activité, ainsi que la demande de la Grèce d'imposer un embargo européen sur la vente d’armes à la Turquie.

Les dirigeants européens ont par ailleurs donné mandat au chef de la diplomatie européenne Josep Borrell de leur «faire un rapport au plus tard en mars 2021 sur l'évolution de la situation» et de proposer alors, si nécessaire, d'étendre les sanctions à de nouveaux noms ou de nouvelles entreprises. «L'idée est de serrer la vis progressivement», a expliqué un diplomate européen.

La décision d'ouvrir la voie à des sanctions avait été prise par les dirigeants européens en octobre. Ils avaient faits des offres d'ouverture à l'égard d'Ankara, notamment sur l'union douanière, mais les avaient assorties de menaces de représailles si la Turquie poursuivait ses actions déjà condamnées par l'UE.

«Nous avons tendu la main à la Turquie en octobre. Depuis, les choses n'ont pas été très positives», avait déploré en début de semaine le président du Conseil européen Charles Michel. «Nous sommes prêts à utiliser les moyens dont nous disposons lorsque nous constatons qu'il n'y a pas d'évolution positive», avait-il averti. Les contentieux se sont multipliés avec la Turquie, engagée dans des actions provocatrices face à la Grèce et Chypre et engagée militairement dans les conflits en Libye, en Syrie et au Haut-Karabagh. Mais la Turquie est membre de l'OTAN et Ankara compte beaucoup de soutiens au sein de l'organisation.