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Covid-19 : Allemagne, Norvège, Autriche... l'Europe fait un pas vers un déconfinement à haut risque

Malgré la pandémie de Covid-19 toujours présente, plusieurs pays européens ont déjà mis en place les premières mesures de déconfinement. Certains redémarrent alors que d'autres, dont la France, s'y préparent. Mais la prudence reste de mise.

L'Europe est le continent le plus touché par la pandémie de Covid-19, comptabilisant près des deux tiers des 164 000 morts liés au virus recensés dans le monde. Pourtant, certains pays du Vieux continent, qui semblent être parvenus, pour l'heure, à endiguer la pandémie, ont d'ores et déjà mis à exécution des stratégies diverses de déconfinement progressif, instaurant des mesures sanitaires et sécuritaires destinées à relancer les économies nationales tout en se préservant d'une seconde vague d'épidémie tant redoutée.

L'Allemagne, la Norvège, le Danemark et l'Autriche ont entamé, depuis quelques jours, une lente et délicate opération consistant à progressivement lever les restrictions sur les déplacements. Quant à la France, l'Italie et l'Espagne, respectivement deuxième, troisième et quatrième économies européennes, les premières mesures de déconfinement sont en discussion et n'entreront pas en vigueur avant début mai.

Situation «sous contrôle et gérable» en Allemagne

La chancelière allemande Angela Merkel entend relancer l’économie nationale, en récession depuis mars dernier, grâce à une stratégie de déconfinement progressif, à géométrie variable selon les 16 Länder que compte l’Allemagne. En effet, la plupart des magasins d'une surface inférieure à 800 mètres carrés (les commerces d'alimentation, librairies, concessionnaires automobiles, magasins de vêtements et autres fleuristes) peuvent à nouveau accueillir des clients dès ce 20 avril.

Nous ne pourrons pas vivre notre ancienne vie avant longtemps. La distance et la protection resteront la règle et la mesure de notre vie quotidienne

Avec plus de 135 000 cas officiellement recensés et environ 4 000 décès, la pandémie de Covid-19 semble «sous contrôle et gérable», selon les termes du ministre allemand de la Santé, Jens Spahn. Ce «succès d'étape» est néanmoins «fragile», de l'aveu d'Angela Merkel. Lors d'une conférence de presse, le 15 avril, la chancelière s'était tout de même dite «très préoccupée» par un éventuel relâchement des Allemands dans le respect des restrictions mises en place pour lutter contre la pandémie. «Nous ne pourrons pas vivre notre ancienne vie avant longtemps. La distance et la protection resteront la règle et la mesure de notre vie quotidienne», a prévenu quant à lui Armin Laschet, dirigeant d'une des régions les plus touchées, la Rhénanie du Nord-Westphalie, et candidat à la présidence du parti conservateur CDU.

Toutefois, écoles et lycées, mais aussi salons de coiffure, ne pourront rouvrir leurs portes qu'à partir du 4 mai. Les lieux culturels, salons de massages, de beauté, tatoueurs, bars et restaurants, ou encore les aires de jeu et terrains de sports, demeurent en revanche fermés jusqu'à nouvel ordre. Les grands rassemblements, tels que les concerts ou compétitions sportives, resteront enfin interdits au moins jusqu'au 31 août. Afin d’éviter au maximum les risques de transmission voire de seconde vague épidémique, les mesures de distanciation sociale dans l'espace public restent prolongées, et le port du masque «fortement conseillé» par la chancelière.

Enfin, les autorités allemandes entendent accompagner ce déconfinement progressif par un ensemble de mesures destinées à endiguer la pandémie. Pour ce faire, Berlin compte multiplier les tests – déjà 1,7 millions ont été réalisés – afin d'être en mesure d'isoler les individus contaminés. De plus, l’Allemagne compte augmenter sa production de masques pour atteindre 50 millions d'unités par semaine à partir du mois d'août, dont 10 millions de masques FFP2.

Réouverture des crèches en Norvège

Après cinq semaines de semi-confinement, la Norvège, où la pandémie de Covid-19 semble également «sous contrôle» avec seulement 154 décès dus au virus, a de son côté commencé  à réouvrir les crèches, comme l'a constaté un journaliste de l'AFP.

«Nous pouvons rouvrir la société petit à petit. Nous ferons cela ensemble, de façon contrôlée et progressivement», a expliqué la Première ministre norvégienne Erna Solberg. Il s'agit du premier pas d'une levée lente et progressive des restrictions. Cette réouverture des crèches est officiellement justifiée par les autorités norvégiennes selon des considérations sanitaires − puisque les enfants ont pour l'heure été globalement épargnés par le Covid-19 − et est censée faciliter le retour au travail des parents.

Selon la feuille de route prévue pour le déconfinement progressif en Norvège, les physiothérapeutes et les psychologues peuvent aussi reprendre leurs activités à compter de ce 20 avril, tandis que les coiffeurs et les dermatologues le pourront au courant de la semaine. Quant aux écoles primaires, collèges, lycées et universités, leurs portes se rouvriront partiellement le 27 avril.

Enfin, si les boutiques n'ont jamais été obligées de fermer, les bars et la plupart des restaurants ne peuvent toujours pas accueillir du public. Les rassemblements culturels et sportifs sont également interdits au moins jusqu'au 15 juin. En outre, les grandes villes ont déjà renoncé aux traditionnels défilés d'enfants du 17 mai, jour de fête nationale.

Réouverture prudente au Danemark et en Autriche

Au Danemark, certaines écoles ont rouvert dès le 15 avril, suscitant toutefois les craintes de certains parents. En effet, une campagne baptisée «Mon enfant ne doit pas être un lapin de laboratoire pour le Covid-19» a été lancée sur Facebook. «Aller à la crèche est sans danger», a assuré de son côté le gouvernement danois. Par ailleurs, l'interdiction de séjour dans les résidences secondaires doit également être levée dans les prochains jours. 

L'Autriche avait de son côté permis le 14 avril la réouverture prudente de ses petits commerces et jardins publics, tout en invitant la population à limiter ses déplacements et en conservant de sévères prescriptions sur le port du masque et les distances entre personnes. 

France, Italie, Espagne : un déconfinement en gestation

Les trois pays européens les plus touchés par la crise sanitaire, qui sont respectivement l'Italie, l'Espagne et la France, enregistrent désormais des nombres de malades et de décès globalement en baisse d'après les chiffres officiels, après des semaines de hausse. En conséquence, ces trois Etats se préparent eux aussi à de premières mesures de déconfinement.

Du côté de la France, qui a dépassé ce 20 avril la barre des 20 000 morts dus au coronavirus, le porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a réclamé de la patience, faisant valoir que le gouvernement avait «besoin de temps» pour préparer son plan de déconfinement qui sera présenté avant la fin avril. «Je sais que c'est très frustrant de pas avoir ce [20 avril au] matin toutes les réponses pour savoir ce qui se passera le 11 mai mais nous avons besoin de temps pour travailler», a-t-elle expliqué sur France info, en répétant que le «plan n'est pas prêt». Et de poursuivre : «Nous avons aujourd'hui tous les ministères qui travaillent d'arrache-pied, en lien avec la mission de Jean Castex, pour savoir, au fond, dans chacune des étapes de votre vie après le confinement qu'est-ce qui devra se passer.»

En Italie, qui compte au moins 23 660 décès liés au Covid-19, les premières mesures d'allègement ne seront pas prises avant le 3 mai, d'après les autorités. Mais peu à peu les entreprises rouvrent, même si c'est de façon partielle et avec beaucoup de précautions. «Nous sommes de retour !», a lancé sur son compte Instagram le célèbre glacier romain Giolitti, qui annonce une reprise de ses livraisons dès le 21 avril. 

En revanche, au Royaume-Uni, qui a enregistré plus de 16 000 décès jusqu'à présent, le confinement instauré le 23 mars a été prolongé le 16 avril, d'au moins trois semaines, et le gouvernement n'envisage pas encore d'en sortir.

L'OMS met en garde

De son côté, alors que le risque d'une deuxième vague de pandémie est bien présent, le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, avait mis en garde lors d'une téléconférence de presse à Genève le 11 avril : «Je sais que certains pays préparent déjà la transition pour sortir des restrictions de confinement. Comme tout le monde, l'OMS aimerait voir les restrictions levées. Mais lever les restrictions trop rapidement pourrait entraîner une résurgence mortelle.»

Le patron de l'organisation internationale avait encore averti : «Le reflux [de la pandémie] pourrait être aussi mortel que sa propagation s'il n'est pas géré convenablement.»