«Notre Europe c'est celle de l'action, de la solidarité. Et si certains n'en veulent pas, il se posera la question de leur place, de ce qu'on doit encore faire à 27 et c'est une question existentielle, fondamentale», alerte le 29 mars Amélie de Montchalin sur France inter. La secrétaire d'Etat aux Affaires européennes affirme que «nous devons absolument préparer ensemble la sortie de crise, la relance, préparer l'après et nous devons montrer qu'on est efficace parce qu'on sera ensemble».
Amélie de Montchalin insiste sur la nécessaire «solidarité» entre les pays de l'Union européenne : «Nous ne pouvons pas nous exonérer de cette solidarité […] Si certains pensent qu'ils peuvent s’exonérer, cela aura des conséquences majeures sur le projet européen», affirme-t-elle. Elle note d'ailleurs que «la Banque centrale européenne (BCE) a lancé [de manière inédite] un programme de 750 milliards d'euros de soutien aux Etats». «Nous avons levé les règles du Pacte de stabilité sur les déficits, c'est inédit», ajoute-t-elle, citant également un plan de 40 milliards d'euros de la Commission européenne.
«Maintenant la question c'est comment on repart ? Et c'est là où nous mettons, nous France, énormément d'énergie […] à bien faire comprendre qu'il n'y aura pas de sortie si chacun retourne à son chez soi, à son repli nationaliste», argumente-t-elle en expliquant que «notre Europe c'est celle de l'action, de la solidarité». «Et si certains n'en veulent pas, il se posera la question de leur place, de ce qu'on doit encore faire à 27 et c'est une question existentielle, fondamentale», prévient Amélie de Montchalin. Des propos qui font écho à ceux, la veille, de l'ancien président de la Commission européenne Jacques Delors. Celui-ci a en effet averti auprès de l'AFP que le manque de solidarité faisait «courir un danger mortel à l'Union européenne».
L'Allemagne et les Pays-Bas disent non à l'un des mécanismes de solidarité
Reste à savoir si Amélie de Montchalin fait ici une allusion à l'Allemagne, principale puissance économique de l'UE. Les coronabonds proposés par la France, l'Italie ou le Portugal afin de mutualiser les dettes par l'émission d'obligations sont une idée pour l'heure rejetée par l'Allemagne et les Pays-Bas, deux pays qui prônent une rigueur budgétaire stricte.
Le 27 mars, le Premier ministre néerlandais Mark Rutte s'est montré catégorique lors d'une conférence de presse : «Emettre des euro-bonds, c'est traverser la frontière vers une union de transfert, une mutualisation des dettes, et nous ne voulons pas de cela.» Les 27 de l'UE ont malgré tout accepté le 26 mars, sous la pression de l'Italie, où la pandémie a fait le plus de morts, d'examiner sous 15 jours des mesures fortes pour faire face à la récession annoncée.
Néanmoins, pour de nombreux politiques, cette inaction et ces tergiversations sont le symbole d'une UE en échec. Sur RT France, la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, a ainsi dénoncé une UE en «incapacité totale à apporter la moindre réaction, solidarité ou aide».
L'ancien ministre italien des Affaires étrangères et représentant spécial de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), Franco Frattini (centre-droit), a jugé pour sa part, pour RT.com, que la réponse initiale de l'UE était «inadéquate» et a déploré un manque de solidarité européenne : «Franchement, Bruxelles n'en fait pas assez. Aux tout premiers moments de l'épidémie, l'Italie était pratiquement seule contre le virus. Beaucoup ont dit que c'était à cause des habitudes italiennes, parce que les Italiens ne respectaient pas les règles. Puis soudain, ils ont réalisé que tous les autres pays étaient également touchés.»