«Nous considérons inacceptable d'utiliser les évènements tragiques pour "marquer des points" dans le débat politique national» : dans un communiqué diffusé le 13 février, le ministère des Affaires étrangères russe s'est montré déterminé à ne pas laisser passer les propos d'un député turc, insistant sur le fait que les parlementaires devraient «s'abstenir de commentaires provocateurs, qui ne contribuent nullement à un dialogue constructif entre nos pays sur la question d'un règlement syrien».
Une réaction ferme, qui fait suite aux déclarations très offensives du secrétaire général du Parti d'action nationaliste (MHP) Devlet Bahceli, dont le parti est dans la coalition au pouvoir avec l'AKP du président Recep Erdogan.
«La nation turque devrait, si nécessaire et qu'il n'y a pas d'autre option, commencer à planifier son entrée dans Damas. [...] La Syrie, bien que cela ne soit pas officiel, est devenue en pratique une colonie de la Russie. La bride d'Assad est tenue par Moscou. La [responsabilité de] la violence contre nos martyrs, autant qu'elle l'est contre l'agresseur syrien, est sur les épaules de la Russie, qui a préparé le terrain et a encouragé [le gouvernement syrien] en coulisses», avait-il ainsi déclaré le 11 février, appelant le gouvernement turc à «revoir» ses relations avec Moscou.
Regain de tensions
La tension entre d'un côté Moscou et Damas, de l'autre Ankara, est au plus haut depuis plusieurs jours. La Turquie a affirmé le 10 février avoir «neutralisé» plus de 100 soldats syriens en réponse à une attaque qui aurait fait cinq morts le même jour dans les rangs de l'armée turque dans le nord-ouest de la Syrie. Une riposte et des pertes annoncées par la Turquie qui n'ont, à l'heure actuelle, été ni confirmées, ni démenties par Damas.
Quelques jours plus tôt, l'armée syrienne, qui combat dans la région des groupes islamistes, dont certains sont soutenus par Ankara, avait déjà touché des soldats turcs au cours de ses opérations visant à reprendre le contrôle de la province d'Idleb. Quatre militaires turcs avaient ainsi été tués le 3 février, exacerbant les tensions entre les deux Etats. Moscou avait expliqué que la mort de ces soldats, qui se seraient retrouvés sous le feu de Damas durant une opération contre des groupes terroristes, aurait pu être évitée si Ankara avait prévenu de son intention de mener une opération dans cette zone.
Selon la présidence russe, Ankara ne respecte pas les accords russo-turcs pour un cessez-le-feu en Syrie et ne fait rien pour neutraliser les terroristes dans la région rebelle d'Idleb. Evoquant les accords de Sotchi conclus en octobre dernier, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov a expliqué que la Turquie avait l'obligation de neutraliser les groupes terroristes mais que «tous ces groupes bombardent les troupes syriennes et mènent des actions agressives contre les installations militaires russes».
Ces échanges d'hostilités interviennent alors qu'une délégation russe se trouvait à Ankara pour des pourparlers visant à trouver une solution aux affrontements à Idleb.
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