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Brexit : le Royaume-Uni sort officiellement de l'Union européenne (EN CONTINU)

Après trois ans et demi d'intenses discussions, négociations et autres débats entre Londres et Bruxelles, le Royaume-Uni sortira officiellement de l’Union européenne ce 31 janvier 2020, à 23h, heure de Londres, à minuit, heure française.

Samedi 1 février

Boris Johnson l'assure : le Brexit sera «un succès retentissant.»

«Quels que soient les obstacles, nous allons réussir», a ajouté l'ancien maire de Londres qui a aussi tenu à déclarer que le Brexit était le «début d'une nouvelle ère de coopération amicale avec l'UE».

Pour le Premier ministre britannique, «la chose la plus importante à dire ce soir, c'est que ce n'est pas la fin, mais le début, le moment où l'aube pointe et le rideau se lève sur un nouvel acte de notre grand drame national».

Dans une allocution, Boris Johnson pense que le Brexit était «la droite, saine et démocratique chose à faire».

Vendredi 31 janvier

Le drapeau britannique est retiré du Parlement européen à Bruxelles.

Le drapeau a aussi été enlevé du bâtiment du Conseil européen, dans la capitale belge.

Les institutions européennes ont commencé à retirer le drapeau britannique, à commencer par celui du Conseil européen à Bruxelles, a constaté l'AFP. Ceux qui flottent aux sièges du Parlement européen, à Strasbourg comme à Bruxelles, doivent subir le même sort, à quelques heures du Brexit.

Pour Emmanuel Macron, la campagne de 2016 au Royaume-Uni, ayant abouti au Brexit, a été faite «de mensonges, d'exagérations, de simplifications, de chèques promis et qui n'arriveront jamais».

«Il faut là aussi, à chaque instant, se souvenir de ce à quoi le mensonge peut conduire dans nos démocraties», a-t-il affirmé.

«Un pays vient de manière très concrète de décider de nous quitter [...] c’est un jour triste», concède Emmanuel Macron.

«Mais c’est un jour aussi qui doit nous conduire à procéder différemment, à bâtir avec plus de détermination encore une Union européenne plus puissante, efficace et qui parvienne à vous convaincre davantage, à retrouver le fil de cette histoire», a-t-il poursuivi, en rappelant «l’amitié» entre le Royaume-Uni et la France.

«Demain, rien ne changera dans nos relations avec le Royaume-Uni», assure Emmanuel Macron, qui a tenté de rassurer les Britanniques vivant actuellement sur le sol français : «Demain matin les choses ne changeront pas.» En revanche, le Brexit fera qu'ils «ne seront plus citoyens européens», et «ne pourront plus faire partie des listes aux municipales».

Emmanuel Macron estime que le Brexit est «un choc» et «un signal d’alarme historique […] qui doit nous faire réfléchir.» «Plus que jamais nous avons besoin de plus d’Europe», ajoute le président français.

«Ce Brexit est possible [...] parce qu'aussi nous n'avons pas assez changé notre Europe», a-t-il encore expliqué.

«Le Brexit est un phénomène ahistorique puisqu’il va à contresens de l’histoire européenne et de l’histoire de façon générale», a estimé l'ancien président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, sur France 24. Et de préciser : «Ce n’est pas un échec pour l’Europe, ce n’est pas l’Union européenne qui quitte le Royaume-Uni, mais le Royaume-Uni qui quitte l’Union européenne.»

L'Allemagne veut faire tout ce qui est en son pouvoir pour conclure les négociations avec la Grande-Bretagne sur ses relations futures avec l'Union européenne d'ici la fin de cette année, a déclaré ce 31 janvier le ministre allemand de l'Economie et de l'Energie Peter Altmaier.

«Avec le négociateur en chef, Michel Barnier, et la Commission [européenne], nous ferons tout notre possible pour conclure de manière positive d'ici la fin de l'année les négociations futures avec le Royaume-Uni», a déclaré Peter Altmaier lors d'une conférence de presse conjointe avec Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur.

«Nous avons convenu que ce [Brexit] offre une grande opportunité - malgré la mélancolie que l'on ressent - de renforcer et de réformer l'Union européenne», a-t-il ajouté au cours de cette même conférence de presse.

Le Premier ministre écossais, Nicola Sturgeon, a également publié sur Twitter, ce 31 janvier, une lettre adressée à l'ensemble de ses «amis et voisins européens, leur demandant de laisser une lumière allumée pour l'Ecosse». 

Et de continuer : «L'Ecosse est peut-être aux confins de l'Europe, mais nous avons toujours été – et nous voulons rester – en son cœur.»

Emmanuel Macron adressera un message aux Français à 18h15 pour expliquer les conséquences du Brexit pour la France et pour l'Union européenne, a annoncé l'Elysée.


Par ce court message vidéo, qui sera diffusé dans les médias et sur les réseaux sociaux, le chef de l'Etat veut «acter cet événement triste et historique» et «assurer les Français que dans la négociation qui s'ouvre (entre l'UE et le Royaume-Uni), il défendra les intérêts de la France et de l’Union», précise la présidence française.

Le Premier ministre écossais, Nicola Sturgeon, a profité du Brexit pour réaffirmer, ce 31 janvier, son engagement à organiser un nouveau référendum sur l'indépendance de l'Ecosse, et a évoqué la possibilité de poursuivre le gouvernement britannique devant la justice sur la question.

«Pour obtenir l'indépendance, un référendum, peut importe son occurrence, que ce soit cette année, comme je le souhaite ou après les prochaines élections écossaises, doit être légal et légitime», a indiqué Nicola Sturgeon depuis la capitale écossaise Edimbourg.

Le chef de file du parti travailliste Jeremy Corbyn, opposé au Brexit, s'est exprimé au micro de Reuters le 31 janvier. «C'est un jour très important pour tout le monde, qu'ils aient voté Leave ou Remain, parce qu'il décide de l'orientation future de notre pays», a-t-il indiqué. 

Jeremy Corbyn s'est ensuite montré soucieux vis-à-vis de l'Union européenne : «Les conditions qui ont conduit au non du Royaume-Uni existent également en France. Elles existent en Allemagne, [...] en République tchèque, en Italie et en Espagne. Ne vous dites pas que l'idée selon laquelle la colère présente en Grande-Bretagne sur la manière dont le système a traité la population ne se manifeste pas dans toute l'Europe.»

Et de conclure : «Ce n'est pas un jour de célébration pour qui que ce soit. C'est un jour de réflexion.»

Le chef de file du Brexit Party, Nigel Farage, s'est réjoui du départ officiel du Royaume-Uni de l'Union européenne pour lequel il a lutté de nombreuses années durant : «Une victoire massive pour le peuple contre le système.»

Nigel Farage a également relayé sur Twitter la photographie d'un drapeau sur lequel est inscrit «Liberated Thank You Nigel» («Libéré Merci Nigel»), en indiquant : «La démocratie a gagné.»

Donald Tusk, ancien président du Conseil européen et actuel président du Parti populaire européen, a adressé sur Twitter un message de camaraderie aux Britanniques, au crépuscule de leur aventure européenne : «Mes chers amis britanniques. Nous étions, nous sommes et nous serons toujours une Communauté. Et aucun brexit ne changera cela.»

Lors d'une conférence de presse aux côtés des présidents des deux autres institutions européennes, Charles Michel (Conseil européen) et David Sassoli (Parlement européen), Ursula von der Leyen (présidente de la Commission européenne) a souligné «l'élan politique» connu depuis le début de son histoire par l'Union européenne, «devenue une puissance économique». «L'expérience nous a montré que la force ne réside pas dans un splendide isolement mais dans notre Union unique» au monde, a-t-elle poursuivi en référence à l'attitude des Britanniques.

«C'est le choix du peuple britannique d'être seul et nous le respectons. Mais nous resterons voisins», a-t-elle souligné. Et de continuer : «Nous avons beaucoup de choses en commun et nous devons prouver au monde que l'on peut être voisins et travailler très étroitement, c'est ce que nous allons nous efforcer de faire.»

«Il ne fait aucun doute que le départ du Royaume-Uni aujourd'hui à minuit de l'Union européenne est une césure pour l'Europe», a déclaré le porte-parole de la chancelière Angela Merkel, Steffen Seibert, à quelques heures du départ officiel du Royaume-Uni de l'organisation supranationale. Avant de souligner que le pays resterait à l'avenir «un partenaire étroit et un ami».

«Je pense que c'est un jour triste, eu égard au lien qui unit la France au Royaume-Uni, [...] à la construction européenne, cette Europe de la paix que nous avons construite, et c'est un jour où la vigilance des autorités françaises nous permettra de maintenir le niveau d'exigence en termes de sécurité, y compris dans notre coopération en matière de lutte contre le terrorisme avec les autorités britanniques», a également affirmé le ministre français de l'Intérieur depuis le site du tunnel sous la Manche.

«Demain matin, nous serons dans des conditions différentes, mais pas pour nos concitoyens, pas pour les concitoyens britanniques, pas pour les entreprises et le monde économique. Le flux aujourd'hui, tel qu'il est organisé à Calais, sera maintenu demain», a déclaré le ministre français de l'Intérieur Christophe Castaner devant la presse, depuis le site du tunnel sous la Manche.

«Nous gérons une situation d'un Brexit, mais d'un Brexit ordonné, qui n'a pas vocation à compliquer la vie de nos concitoyens [mais] à assurer la bonne fluidité de nos échanges, demain et dans les temps qui viennent. Mais, en même temps, un Brexit sécurisé, parce qu'il n'est pas question que cette évolution institutionnelle ait des conséquences sur la sécurité», a-t-il indiqué suite à la visite du centre de contrôle frontalier de la police aux frontières.

«Un échec à conclure un accord commercial serait une menace majeure, et une menace existentielle pour notre économie en 2021. Nous avons donc besoin de cet accord», a déclaré le Premier ministre irlandais Leo Varadkar ce 31 janvier. 

Au son d'une cornemuse et brandissant le drapeau de l'Union Jack, plusieurs eurodéputés britanniques du Parti du Brexit ont quitté définitivement le Parlement européen, dans une mise en scène soigneusement orchestrée pour marquer le jour J. Devant les caméras, ces élus, parmi lesquels Ann Widdecombe, Rupert Lowe et Claire Fox, ont posé devant le bâtiment du Parlement, portant une affiche «Brexodus Express».

Il aura donc fallu attendre plus de trois ans pour que soit respecté le vote populaire des Britanniques qui, lors du référendum de juin 2016 mis en place par le Premier ministre David Cameron (Parti conservateur), avaient majoritairement choisi de quitter l'Union européenne (UE). Trois années et demi durant lesquelles les vents contraires auront été puissants pour tenter d'inverser cette décision, au point de faire éclore une crise politique sans précédent dans le pays.

Paralysée par l'inaction d'un Parlement incapable d'appliquer les résultats du vote, la situation a finalement été débloquée lors des élections législatives anticipées de décembre 2019. Le triomphe du conservateur Boris Johnson, qui avait axé sa campagne sur une sortie effective rapide – possible uniquement grâce au soutien décisif de l'architecte du Brexit, Nigel Farage  (Brexit Party) – s'est apparenté à un nouveau plébiscite du Brexit.

Après 47 ans de vie commune, les destins du Royaume-Uni et de l'Union européenne vont donc se séparer. En outre, de difficiles tractations s'annoncent entre le Royaume-Uni et les 27 Etats membres de l'UE pour déterminer les contours de leurs relations en matière commerciale, de sécurité ou de pêche. «Les négociations seront dures» mais «justes», a prévenu la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen sur la BBC, ce 31 janvier.

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