La Corée du Nord a tiré deux «projectiles» ce 10 août, à 5h32 et 5h50, depuis la ville côtière de Mamhung en direction de la mer du Japon, d’après un communiqué de presse diffusé par le Comité des chefs d'état-major interarmées de Corée du Sud (JCS) et repris par l’agence sud-coréenne semi-publique Yonhap. Les deux engins ont parcouru environ 400 km à l’altitude maximale de 48 km et à la vitesse de pointe de Mach 6,1. Selon le JCS, il s’agirait vraisemblablement de missiles balistiques de courte portée.
«Nous estimons qu'il y a une forte probabilité de nouveaux lancements étant donné que la Corée du Nord effectue actuellement des manœuvres estivales et que l'exercice conjoint Corée du Sud-Etats-Unis est en cours», a précisé le JCS. En effet, depuis le 5 août se déroulent des exercices militaires communs qui dureront deux semaines environ et sont vécus par Pyongyang comme une préparation éventuelle à l’invasion de son territoire. La Corée du Nord y voit par ailleurs un frein à la reprise annoncée des discussions avec les Etats-Unis sur la dénucléarisation.
Donald Trump minimise l'incident
Ces nouveaux tirs, les cinquièmes en moins de deux semaines, ont eu lieu quelques heures après une conférence de presse donnée devant la Maison Blanche par Donald Trump, juste avant de s’envoler pour dix jours de vacances. Le président américain a confié avoir reçu une «superbe lettre de trois pages» de la part de son homologue nord-coréen, ajoutant que celui-ci «n'était pas content au sujet des manœuvres militaires».
Mais le 45e président des Etats-Unis ne s’est pas arrêté là, critiquant lui aussi ces exercices. «Je ne les ai jamais aimés non plus. Et vous savez pourquoi ? Je n'aime pas payer», a indiqué celui qui voit dans ces manœuvres une provocation. L’été dernier, des exercices militaires avaient été annulés par Donald Trump, qui avait revu le budget de ceux de cette année à la baisse.
En s’alignant sur la position défendue par Kim Jong-un, le président américain a montré sa volonté de calmer le jeu et confié qu’il tenterait de rencontrer le dirigeant nord-coréen une quatrième fois depuis le sommet historique de juin 2018 à Singapour. Comme a son habitude, il a minimisé l’importance de ces tirs réguliers, estimant qu’ils étaient «communs» et n’avaient pas de lien avec le programme nucléaire. Le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo, a de son côté assuré qu’ils n’entravaient pas la reprise des négociations. «Nous sommes en consultations étroites avec nos alliés japonais et sud-coréens», a déclaré un haut-responsable du gouvernement américain à l’AFP.
Le 10 août, Donald Trump a indiqué sur Twitter que Kim Jong-un lui avait présenté de «petites excuses pour avoir testé des missiles de courte portée», ajoutant que ces «tests cesseraient quand les exercices militaires s’arrêteront». Il a enfin annoncé que dans sa lettre, le président nord-coréen avait exprimé son intention de reprendre les négociations «dès que les exercices communs entre les Etats-Unis et la Corée du Sud seraient terminés».
Un président en campagne pour 2020
La détente amorcée entre Washington et Pyongyang est présentée par l’administration Trump comme un des – sinon le principal – succès du milliardaire en termes de politique étrangère. Si Donald Trump ne règle pas la situation, cet échec serait considéré comme un aveu d’impuissance à un peu plus d’un an de l’élection présidentielle, lors de laquelle il briguera un second mandat.
Les pourparlers sont dans une impasse depuis l'échec du sommet de Hanoï en février dernier. Fin juin, alors que les deux dirigeants se rencontraient pour la première fois dans la zone démilitarisée entre les deux Corée, Kim Jong-un s’était engagé à ce que les discussions reprennent dans les «deux à trois semaines» suivant l’entrevue. Il n'en a rien été.
Alors que Mike Pompeo et son émissaire pour la Corée du Nord, Stephen Biegun, espéraient que leur visite en Thaïlande serait l’occasion de reprendre les discussions, la Corée du Nord a pratiqué la politique de la chaise vide. «Une énorme erreur», d’après un haut responsable cité par l’AFP. «Ils doivent cesser les provocations», a-t-il précisé, ajoutant que la Corée du Nord devait «aboutir à une dénucléarisation complète». Un couac qui pourrait bien coûter sa place à Stephen Biegun, que certains médias pressentent pour devenir ambassadeur à Moscou.
Alexis Le Meur