A une dizaine de jours des élections européennes, la droite dure aurait-elle pris du plomb dans l’aile ? Dans un article publié le 13 mai par la revue The Atlantic, l’écrivain Bernard-Henri Lévy raconte s’être rendu à Budapest pour y rencontrer le dirigeant du Fidesz Viktor Orban, dont il rapporte les propos. C'était là l’occasion pour ce dernier de revenir sur ses liens avec la France mais aussi de discuter d’une possible alliance avec le Rassemblement national.
Décrit par BHL comme ayant «le physique d’un lutteur à la retraite, Vladimir Poutine, sans les muscles, avec quelque chose de triste et de sombre dans son regard», Viktor Orban explique avoir «une bonne relation personnelle» avec Emmanuel Macron, jugeant néanmoins le président français «trop intellectuel pour le métier que nous occupons». L'évocation d'une bonne relation entre les deux hommes est pour le moins curieuse, Emmanuel Macron tentant de polariser le scrutin européen entre progressistes et populistes et se charge régulièrement d’attaquer le dirigeant magyar.
Le RN : une «ligne rouge»
Et lorsque le fondateur de La Règle du jeu lui demande s’il pense à Marine Le Pen pour porter le flambeau populiste à travers l’Europe, sa réaction est immédiate. «Absolument pas ! Je n’ai rien à voir avec Marine Le Pen. Rien», rétorque-t-il, comme pour affirmer le clivage.
«Laurent Wauquiez m’a averti que [cette alliance avec le RN] constituait une ligne rouge», poursuit le Premier ministre qui présente le président des Républicains comme un de ses nombreux «amis» en France parmi lesquels il cite Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac ou encore Valéry Giscard d’Estaing, qu’il «essaye de voir» à chaque fois qu’il est présent à Paris.
Viktor Orban précise ne pas vouloir s’allier à Marine Le Pen car celle-ci «n’est pas au pouvoir». «Lorsque des dirigeants politiques ne sont plus au pouvoir, ils peuvent dire et faire ce qu’ils veulent et donc échapper à tout contrôle. Je ne veux pas être mêlé à ça», analyse-t-il.
Marine Le Pen multiplie les signaux en direction du Premier ministre hongrois, comme le 5 mai dernier alors qu'elle se trouve en meeting à Bruxelles. «C'est à monsieur Orban de voir s'il se trouve plus en cohérence politiquement avec des membres du PPE [Parti populaire européen] qui ont voté contre lui [...] ou s'il se sent plus en cohérence politiquement avec des mouvements tels que les nôtres», avait-elle déclaré. Le 20 mars dernier, le parti de Viktor Orban avait été suspendu du PPE pour des déclarations et des prises de position jugées trop radicales.
Salvini en héraut
Mais qui pour diriger ce courant de droite en Europe ? Viktor Orban est affirmatif : «Matteo Salvini. Il dirige un grand pays. L'Europe peut sanctionner un petit pays comme la Hongrie. Il n'oserait pas s'en prendre à un pays comme l'Italie, avec 60 millions d'habitants. De plus, l'Italie a une voix puissante. Il se tient fermement contre les migrants – il occupe le front.»
Nous ne devons pas provoquer Vladimir Poutine. C'est pourquoi je m'oppose aux sanctions de l'UE contre lui
Poursuivant l’entretien, le dirigeant hongrois aborde ses relations avec Silvio Berlusconi ou encore Recep Tayyip Erdogan avec lesquels il partage la passion du ballon rond. Enfin, il aborde ses liens avec la Russie. «Nous devons faire attention. Très attention. Nous devons soutenir l'Ukraine, qui constitue le principal rempart entre nous et les Russes. Dans le même temps, nous ne devons pas provoquer Vladimir Poutine. C'est pourquoi je m'oppose aux sanctions de l'Union européenne contre lui», conclue-t-il.