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MH17 : des questions clés restent sans réponse trois ans après le début de l'enquête internationale

Trois ans après le crash du MH 17 en Ukraine, des questions cruciales restent sans réponse. De leur côté, les enquêteurs internationaux semblent ne pas prêter attention aux données fournies par la Russie.

Le 17 juillet marque l'anniversaire du crash du vol MH17 de la Malaysia Airlines en 2014 dans l'est de l'Ukraine, en plein conflit entre les troupes ukrainiennes et les forces rebelles antigouvernementales qui s'opposaient au coup d'Etat mené à Kiev avec le soutien de l'Occident.

La tragédie a coûté la vie aux 298 personnes qui se trouvaient à bord, et a donné lieu à une enquête internationale menée par l'équipe d'enquête commune (JIT) comprenant des experts en aéronautique et des enquêteurs néerlandais, belges, australiens, malaysiens et ukrainiens.

Cependant, les enquêteurs n'ont toujours pas été mesure de parvenir à des conclusions fermes et d'établir des faits concrets. Ils n'ont pas réussi non plus à nommer un seul suspect, ce qui réduit l'espoir de retrouver un jour la vérité.

Les médias occidentaux ont souvent accusé les rebelles et même la Russie d'être responsable du drame, en dépit du fait que la JIT n'ai pu donner des éléments convaincants pour soutenir ces conclusions préliminaires sur l'incident.

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Le type de missile utilisé reste incertain

La JIT a conclu que le Boeing 777 de Malaysia Airlines a été abattu par un missile de moyenne portée lancé à partir d'un système de défense aérienne Buk situé dans la zone contrôlée par les forces rebelles. Les enquêteurs sont également parvenus à la conclusion que le lanceur avait été amené sur place depuis la Russie. Ils ont cité comme preuves des images des satellites qui auraient permis de retracer l'itinéraire du lanceur.

L'année dernière, Almaz-Antey, le producteur des Buk, a présenté une simulation en afin d'examiner l'impact que le missile aurait eu sur l'avion de ligne. Ce test a révélé des contradictions majeures dans la théorie de l'équipe d'enquête, car, selon Almaz-Antey, le missile qui est censé avoir été utilisé contre l'avion ne fait plus partie de l'arsenal de l'armée russe.

Almaz-Antey a également déclaré que l’arme avec laquelle l’avion a été abattu, avait probablement été tiré depuis le territoire contrôlé par Kiev.

Toutefois, l’équipe internationale a choisi d’utiliser un missile américain «similaire» pour modéliser l’impact, bien que Almaz-Antey ait insisté sur le fait qu’il y ait des différences significatives par rapport au système Buk dans ses caractéristiques essentielles, dont celle de la trajectoire de vol.


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Les données de radars russes négligées 

L’enquête a prêté peu d’attention aux données fournies par les autorités russes, qui ont accepté de remettre toutes les informations en leur possession afin de parvenir à une compréhension complète de ce qui s’était passé en juillet 2014 dans l’espace aérien ukrainien.

En automne dernier, l’autorité aéronautique russe, Rosaviatsia, a fourni des données de radar montrant qu’aucun missile n’avait approché l’avion le jour de l’accident. En janvier, les autorités néerlandaises ont répondu qu’elles n’étaient pas capables de déchiffrer les données car elles étaient fournies dans un «format atypique».

Bien que la Russie ait expliqué qu’elle avait utilisé le format ASTERIX pour présenter les données brutes, les Hollandais ont déclaré que le radar russe était incapable de repérer un objet relativement petit de la taille d’un missile. Oleg Stortchevoï, chef de Rosaviatsia, a rejeté cette affirmation en précisant que la station radar peut détecter des objets beaucoup plus petits qu’un missile Buk.

Alors que les données de la boîte noire de MH17 indiquent que la tragédie a eu lieu à 13h20 et trois secondes GMT, le radar a enregistré pour la dernière fois l’avion à 13h20 et 87 centièmes, soit moins d’une seconde et demi avant la catastrophe, a ajouté Oleg Stortchevoï.

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Inquiétudes liées à l’impartialité

Depuis le début des investigations, Moscou a fait part de ses inquiétudes concernant l'impartialité de l'enquête. En dépit des accusations infondées sur l'implication russe dans l'accident, le Kremlin n’a eu que peu des possibilités pour contribuer à faire la lumière sur cette affaire.

L'année dernière, les autorités de l'aviation russe ont avancé de nouvelles critiques de la gestion néerlandaise de l'enquête MH17 et de la faible qualité de son rapport final sur l'accident qu’ils ont qualifié de «vague».

De plus, Oleg Stortchevoï a accusé les enquêteurs néerlandais d'étudier les messages des médias sociaux au lieu d'effectuer un examen médico-légal du site de l'accident, ce qui est d’après lui une approche «sans précédent». Le fonctionnaire a déclaré qu'une fois que les enquêteurs sont arrivés sur le lieu de l’incident, ils n'ont pas mené de reconstitution sur place visant à déterminer la séquence exacte des événements.

Les Néerlandais ont également refusé de coopérer avec Almaz-Antey, s’étant uniquement renseigné auprès du fabricant d'armes, et ne se sont pas rendus enRussie, en dépit de nombreuses invitations à le faire, a-t-il ajouté.

«Je pense qu'il n'y a presque pas d'espoir d'obtenir des réponses à la plupart des questions que nous avons à cause de cet accident tragique», a déclaré à RT Willy Wimmer, ancien vice-président de l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

«Cela ne correspond pas à l'expérience des [enquêtes] des accidents aériens que nous avons en Europe – je m’abstiendrai de parler des autres parties du monde», a-t-il affirmé, évoquant l'enquête de l'accident du vol Germanwings 9525.

Dans ce cas, d’après Willy Wimmer, cela n’a pris aux enquêteurs que «quelques jours» pour apprendre que l'accident avait été provoqué délibérément par le co-pilote, Andreas Lubitz. Il a souligné qu'il aurait fallu une autre enquête dans le cas de MH17, menée par une organisation «moins politisée que celle que nous avons aujourd'hui».

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