«Notre pays est détruit par des étrangers», a déclaré Tima Kurdi – avocat canadien d’origine syrienne qui est aussi la tante d’Aylan Kurdi, petit garçon de trois ans décédé en septembre 2015 alors qu'il était en route de la Turquie vers l’île grecque de Kos. Et «les pays occidentaux ne font rien», ajoute-t-elle.
Elle a dit avoir un temps estimé que la mort de son neveu serait «un coup de semonce, une prise de conscience pour le monde, un message de Dieu : "ça suffit !"». Le peuple syrien «avait subi des souffrances au cours de ces quatre années, et la Syrie appelait à l’aide, mais personne n’écoutait» ses supplications, car «la couverture médiatique n’a pas été suffisante», avant que l’image du corps de son neveu rejeté sur le rivage turc, ne fasse les manchettes des journaux autour du monde.
Cette photo a incité les politiciens des nombreux pays occidentaux à ouvrir leurs frontières afin d’accueillir les réfugiés. Toutefois, «quelques mois plus tard, ils ont commencé à oublier cette image, reprenant leurs activités habituelles, alors que les souffrances [du peuple syrien] ont perduré», explique-t-elle.
Quand les gouvernements occidentaux financent les rebelles «modérés», leur aide se retrouve finalement entre les mains des plus puissants groupes sur le terrain : al-Nosra et Daesh
Développant, elle souligne que l’Occident non seulement «n’a rien fait pour mettre fin à cette guerre cruelle», mais qu'il a aussi mené une «terrible» politique de changement de régime en Syrie, qui n’a fait qu’aggraver la situation. Le financement des soi-disant "rebelles modérées" par des pays occidentaux ne fait que prolonger les souffrances du peuple syrien, a-t-elle souligné, ajoutant qu’«il n’y avait pas de rebelles modérées en Syrie.»
Lire aussi : Plus de la moitié des Américains soutiennent l’interdiction temporaire des réfugiés
«Quand [les gouvernements occidentaux] financent les rebelles "modérés", leur [aide] se retrouve finalement, d’une façon ou d’une autre, entre les mains des plus puissants groupes sur le terrain : al-Nosra et Daesh», affirme-t-elle.
La solution militaire ne pourra jamais marcher en Syrie, selon elle : «Nous allons tout simplement assister à encore plus de souffrances, et encore plus de gens vont périr.» Elle ne prend le parti de personne dans ce conflit : elle ne soutient ni le président syrien Bachar el-Assad, ni l’opposition, mais elle a parlé à des nombreux Syriens qui vivent dans des camps de réfugiés en Turquie, et elle estime que la couverture du conflit par des médias occidentaux est biaisée.
Si le président Assad veut rester au pouvoir dans son pays, il doit se battre pour son pays, mais il ne tuerait pas son propre peuple, parce qu'il a besoin de son soutien
Les médias occidentaux informent que «seul le Président Bachar [el-Assad] tue son propre peuple», montre-t-elle, ajoutant que cela semblait totalement absurde aux Syriens. «Je veux que les gens comprennent une chose : si le président Assad veut rester au pouvoir dans son pays, il doit se battre pour son pays, mais il ne tuerait pas son propre peuple, parce qu'il a besoin de son soutien.»
Les informations circulant en Occident sur la Syrie «n'ont aucun sens», parce qu'il y a plus que le gouvernement [syrien] et la Russie, il y a également de nombreux rebelles qui se battent et tuent mon peuple», affirme-t-elle, ajoutant que «personne [à l’Ouest] n'évoque les viols», par exemple, commis par les rebelles.
Tima Kurdi estime que les forces de Bachar el-Assad faisait en effet «souffrir le peuple syrien», mais sans le vouloir. Elle a également souligné que les Syriens vivaient «dans le calme et sûreté» avant la guerre.
«La majorité du peuple syrien ne faisaient que vivre sa vie avant la guerre et n'était pas impliquée en politique», dit-elle, soulignant que «toutes les religions» coexistaient pacifiquement en Syrie. «Des sunnites, des chiites, des druzes, des alaouites, des chrétiens – nous avons tous vécu ensemble dans le respect mutuel», dit-elle, elle qui est né et a vécu à Damas. «La majorité du peuple syrien ne voulaient pas quitter leurs maisons» quand la guerre a commencé.
Elle aborde ensuite la question de la crise des réfugiés, expliquant que le seul moyen de l'arrêter est de mettre un terme à la guerre en Syrie.
Nous devons aider ces réfugiés qui souffrent. Ils ont le droit d’être protégés, ce sont des gens pacifiques, comme vous et moi
«J’encourage les gouvernements de chaque pays à aider à trouver une solution politique [pour arrêter la violence] dans mon pays. A apporter la paix en Syrie, de manière à ce qu'il n'y ait plus de réfugiés», explique-t-elle à RT.
Kurdi appelle également les gens partout dans le monde à avoir plus de compassion envers les réfugiés.
«Nous devons aider ces réfugiés qui souffrent. Ils ont le droit d’être protégés, ce sont des gens pacifiques, comme vous et moi. Il n’y a pas de différence. Il faut les aider à retourner à leur vie normale et les accueillir à bras ouverts jusqu'à ce que leur pays soit sécurisé pour qu'ils le retrouvent.»
«Je veux que les gens du le monde entier comprennent une chose : que feriez-vous si un jour vous étiez forcés de quitter votre pays et de tout laisser derrière vous ? Que voudriez-vous que les autres fassent pour vous ? Faites-le pour mon peuple !», conclut-elle.