Alep libérée : quand l'AFP qualifie des décapiteurs d'enfants de «rebelles»
Si sur le plan humain, l'agence se réjouit du retour de la paix dans Alep, elle déplore la défaite des djihadistes toujours qualifiés de «rebelles modérés», même lorsqu'il s'agit d'un groupe à l'origine de la décapitation d'enfants.
Le 23 décembre, l'Agence France Presse (AFP) publie une dépêche dans laquelle, après avoir précisé que «pour la rébellion armée s'opposant au régime du président Bachar al-Assad, la perte d'Alep représente un revers cinglant», elle donne la parole à un certain Yasser al-Youssef.
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«"Sur le plan politique, c'est une grande perte [...] pour la révolution, c'est une période de recul et un tournant difficile", a estimé Yasser al-Youssef, un responsable du bureau politique du groupe rebelle Nourredine al-Zinki», explique la dépêche de l'AFP.
Les " rebelles modérés " brûlent les bus qui ont servi à leur évacuation ... #Aleppic.twitter.com/pdx08Zr9BK
— Rowlf (@Rowlfg) 18 décembre 2016
Des rebelles «modérés» qui torturent des journalistes et décapitent des enfants
Le texte oublie cependant de rappeler que les membres de ce fameux groupe «rebelle» allié au front Al-Nosra (désormais Fatah al-Cham), avaient, il y a quelques mois, publié une vidéo sur laquelle on les voyait égorger un enfant.
Par ailleurs, Amnesty International a signalé dans un rapport de juillet 2016 que Nourredine al-Zinki s'était rendu coupable de crime de guerres, notamment d'actes de torture sur des membres du personnel humanitaire, ainsi que sur... des journalistes.
Outre l'AFP, d'autres médias mainstream ont interviewé l'obscur Yasser al-Youssef, porte-parole du groupe Nourredine al-Zinki, comme le quotidien américain The Wall Street Journal dans un article du 30 septembre dernier, dans lequel les membres de cette organisation étaient là aussi qualifiés de «rebelles».
L'AFP a également interrogé Ahmad Qorra Ali, responsable «du puissant groupe islamiste rebelle modéré» Ahrar al-Cham, dont les membres fondateurs sont de hauts cadres d'Al-Qaïda. Ce dernier a martelé qu'Alep était maintenant «sous l'occupation de la Russie et de l'Iran».
Pour reprendre le contexte, l'AFP explique également : «en quatre semaines, du 15 novembre au 15 décembre, l'opération militaire a tué plus de 465 civils, dont 62 enfants, à Alep-Est». Et d'ajouter ... «selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH)», se basant donc sur une source unique et dont le manque de crédibilité a été démontré à maintes reprises.
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La dépêche tient aussi à préciser que «outre les bombardements, la population d’Alep-Est, estimée avant l’offensive à 250 000 personnes, subissait un siège asphyxiant depuis le 17 juillet, souffrant d’une pénurie quasi totale de nourriture, de médicaments et de carburant». L'AFP semble ici délibérément choisir de ne pas évoquer l'effort humanitaire constant de Moscou pour approvisionner Alep-Est.
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Ainsi, la presse mainstream qui certes, semble se réjouir que les Alépins puissent enfin regagner leur domicile et retrouver leur antique cité restée près de cinq ans aux mains des djihadistes qui ont livré la ville à feu et à sang, continue cependant de qualifier ces derniers de «rebelles modérés».
Pourtant, ces djihadistes, qu'ils soient membres du Front Fatah al-Cham (ex Front al-Nosra) ou d'autres groupuscules, ont commis des atrocités contre la population civile d'Alep, n'hésitant pas à utiliser hommes, femmes et enfants comme boucliers humains durant les bombardements des forces syriennes et de leurs alliés russes et iraniens.
L'été dernier, plusieurs dirigeants du groupe Al-Nosra, rebaptisé depuis Fatah al-Cham, avaient déclaré être soutenus matériellement par Washington dans leur opposition au gouvernement du président Bachar el-Assad.
En septembre, Moscou avait exhorté Washington de clarifier sa position et de bien différencier les milices d'opposition dites «modérées» et celles ouvertement «terroristes».