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Que se passe-t-il à Solédar, ville du Donbass et théâtre des combats entre Russes et Ukrainiens ?

Le groupe Wagner, combattant côté russe, a affirmé avoir encerclé la ville de Solédar, menant désormais des combats dans le centre pour en prendre totalement le contrôle. Kiev a démenti l'information alors que le Kremlin est lui resté prudent.

Le patron de la société militaire privée (SMP) Wagner – qui combat aux côtés des Russes dans le conflit en Ukraine –, Evgueni Prigojine, a affirmé dans la soirée du 10 janvier que les unités de la SMP avaient pris le contrôle de «tout le territoire» de la ville de Solédar, située en République populaire de Donetsk (RPD, rattachée à la Russie fin septembre après un référendum soutenu par Moscou mais dénoncé par Kiev et ses alliés occidentaux) à quelques kilomètre de Bakhmout, point de passage stratégique vers Slaviansk et Kramatorsk depuis Lougansk.

«Il y a un chaudron au centre de la ville, où se déroulent des combats urbains», a déclaré l'homme d'affaires dans un communiqué mis en ligne par son service de presse sur Telegram. «Nous annoncerons le nombre de prisonniers demain [le 11 janvier]», a-t-il encore ajouté. 

Des unités d'assaut poursuivent les combats dans la ville

L'agence RIA Novosti a publié une photographie de nuit le montrant posant en tenue de combat entouré de ses hommes dans ce qui est présenté comme une mine de sel de Solédar. Des images similaires ont fleuri sur les réseaux sociaux, notamment l'une où on le voit inspecter les galeries, lampe torche à la main.

Wagner a publié une vidéo prise de jour dans laquelle on voit deux combattants masqués s'adresser à la caméra. On peut entendre des bruits de fusillade non loin. «La société militaire privée Wagner est en train de mener une opération de nettoyage dans le centre-ville de Solédar, près du bâtiment de l'administration. La SMP Wagner remplit pleinement les objectifs qui lui avaient été fixés», affirme un des combattants.

Le 11 janvier dans son briefing, le ministère russe de la Défense a affirmé que ses soldats avaient «libéré la localité de Podgornoïé», en RPD, et déployé des unités de parachutistes pour bloquer «le nord et le sud de la ville de Solédar». «Les forces aérospatiales russes frappent les points d’appui de l’ennemi. Des unités d'assaut poursuivent les combats dans la ville», a encore fait savoir le ministère.

L'Ukraine dément une prise de contrôle de Solédar par Wagner

«Les Russes prétendent avoir pris le contrôle de Solédar. Ce n’est pas vrai», a lui assuré, toujours le 11 janvier, le représentant du commandement de la direction Est de l’armée ukrainienne, Serguiï Tcherevaty, cité par le média public Suspilne Novyny.

L'armée ukrainienne a de son côté fait valoir dans un message diffusé le même jour sur Telegram que «Solédar était, est et sera toujours ukrainienne». Il n'est, selon elle, «pas vrai» qu'Evgueni Prigojine se trouvait à l'intérieur des mines de sel de Solédar.

De plus, la vice-ministre ukrainienne de la Défense, Ganna Maliar, a déclaré sur le même réseau social que «de violents combats se poursuiv[ai]ent à Solédar» et reconnu que les Russes avaient «tenté de percer la défense» ukrainienne mais «sans succès».

En fin d'après-midi, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a, de même, affirmé que les combats se poursuivaient.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, invite à la prudence

Côté Kremlin, le porte-parole Dmitri Peskov est resté prudent le 11 janvier sur la situation de la ville. «Attendez, ne nous précipitons pas. Attendons les déclarations officielles. Il y a une dynamique positive dans l’avancement», a-t-il expliqué devant la presse. Il a ajouté que les «progrès tactiques» en Ukraine coûtaient cher et s’obtenaient «au prix de l’héroïsme fantastique de nos soldats». «Donc, c’est une nouvelle occasion d'être fiers de nos gars qui sacrifient leur vie et leur santé pour nous offrir ces progrès tactiques», a-t-il conclu.

Solédar abritait environ 10 000 habitants avant le conflit. L'armée ukrainienne en a fait un point fort de son dispositif dans le Donbass après avoir été délogée en mai de Popasna, dans la République populaire de Lougansk (RPL, rattachée à la Russie depuis fin septembre), et forcée à se replier vers l'ouest.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré le 11 janvier dans un entretien à l'AFP que les combats à Solédar et Bakhmout étaient les «plus sanglants» depuis le début du conflit. «Beaucoup de sang, beaucoup de duels d'artillerie, beaucoup de combats de contact, surtout à Solédar», a-t-il ajouté.

Si elle était confirmée, la prise de Solédar par la Russie menacerait le bastion voisin assiégé de Bakhmout (anciennement Artiomovsk). Solédar est située à quelques kilomètres au nord-est de Bakhmout. C'est aussi la conclusion de la Défense britannique, citée par l'AFP, qui a vu dans cet effort pour prendre la ville une probable volonté d'«encercler Bakhmout depuis le nord» et de «perturber les lignes de communication ukrainiennes». Pour Londres, une partie des combats vise aussi à contrôler l'entrée d'une ancienne mine de sel à Solédar, car ses tunnels passent sous la ligne de front et pourraient servir à «s'infiltrer derrière les lignes ennemies».

Pour rappel : la Russie mène depuis le 24 février 2022 une opération militaire en Ukraine, que Kiev et ses alliés dénoncent comme une guerre d'invasion ne répondant à aucune provocation. Les autorités russes font quant à elles valoir la nécessité de protéger les populations du Donbass, dont les autorités locales sont en conflit avec Kiev depuis 2014 à la suite du coup d'Etat de Maïdan